« Your Name » a été le premier film au box office japonais en 2016. Vu par près de quinze millions de spectateurs, ce dessin animé a reçu un accueil aussi enthousiaste que les chefs d’œuvre de Miyazaki. C’est donc son succès qui nous interroge, autant que son contenu. Comme le succès de « 1Q84 » de Murakami, celui de « Your Name » est riche d’enseignements sur le Japon contemporain.
Commençons par le plus évident. Il s’agit d’un dessin animé. Il n’est pas inintéressant de constater que les plus grands succès au box office japonais sont des dessins animés. C’est d’ailleurs le cas aussi en France où Walt Disney et Pixar trustent les premières places. Sauf qu’il s’agit au Japon de réalisations nationales, destinées à un public certes adolescent mais aussi adulte. C’est le cas des réalisations de Miyazaki. C’est aussi le cas de « Your name ». Leur succès n’est pas la conséquence de l’engouement d’un public familial – et nombreux – mais d’une culture de l' »anime » qui traverse toutes les classe d’âge.
« Your Name » est une histoire d’amour entre deux adolescents. Mitsuha et Taki ont dix-sept ans. Le dessin animé japonais touche un public adulte en mettant en scène des enfants. C’est le cas des grandes œuvres de Miyazaki ; c’est aussi le cas de « Your Name ». Infantilisation mièvre d’un public en quête de plaisirs régressifs ? ou recherche de l’expression du sentiment amoureux dans ce qu’il a de plus pur, de plus virginal ?
« Your Name » joue sur la confusion des genres. Il ne s’agit pas d’homosexualité, ni de bisexualité. Le propos est beaucoup plus innocent. Mais, en imaginant que Mitsuha et Taki puissent échanger leurs corps, il remet en cause les frontières de genre : Mitsuha affiche des manières de garçon manqué qui impressionne ses camarades, Taki a une douceur féminine ce qui le rend plus séduisant auprès des filles ! Étrange mélange d’une posture transgressive et d’un discours finalement très conservateur (les filles savent coudre et les garçons ne croisent pas les jambes)
« Your Name » nous parle d’une ville – imaginaire – frappée par une catastrophe naturelle. On pense évidemment au tsunami de 2011 et à Fukushima. On pense aussi à l’attachement des japonais pour la nature, à leur panthéisme, un thème déjà omniprésent chez Miyazaki.
Enfin « Your name » repose sur un scénario compliqué et riche en rebondissements aux frontières du fantastique. La référence qui vient à l’esprit est ici l’œuvre littéraire de Murakami. S’y ajoutent le goût du cinéma américain pour les failles temporelles et les voyages dans le temps de « Retour vers le futur » à « Premier contact » en passant par « Looper » ou « Interstellar ».