Reza vit à la campagne avec sa fille et son fils. Son exploitation piscicole bat de l’aile car des promoteurs immobiliers ont décidé de s’accaparer sa terre. L’eau lui est coupée, la banque menace de saisir sa maison hypothéquée, la police l’accuse à tort d’avoir cassé le bras d’un contremaître.
Un homme intègre arrive sur nos écrans lesté d’un parfum de scandale. Car son réalisateur s’est vu assigné à résidence, son passeport retiré, à la suite de sa projection à Cannes et à la publicité dérangeante que lui a valu le prix Un certain regard. Mohammad Rasoulof inscrit désormais son nom au panthéon des réalisateurs persécutés pour leur liberté de parole, à côté notamment de Jafar Panahi ou de Keywan Karimi.
C’est qu’il ne fait pas bon chatouiller le régime des mollahs et en dénoncer les dérives. Ce qui est autorisé en Russie (Léviathan, Une femme douce), en Égypte (Le Caire confidentiel), en Algérie (Les Bienheureux) ou en Bulgarie (Taxi Sofia) ne l’est pas en Iran. Tous ces films ont en commun de dresser le portrait d’une société, d’en démonter les mécanismes corrompus, d’en pointer les hypocrisies.
Un homme intègre le fait avec une particulière efficacité. L’histoire a des allures de western et en reprend certains des codes. Si Reza se fait dès la première séquence du film confisquer son fusil, il utilisera ses poings et surtout son intelligence pour défendre sa famille.
« Manger ou être mangé ». Un homme intègre excelle à décrire les dilemmes moraux auxquels le régime accule. Pour défendre sa famille, Reza voit son intégrité mise à mal. Il a le choix entre tout perdre ou retourner contre ses agresseurs les armes qu’il a jusqu’alors refusé d’utiliser. Sa femme vit le même dilemme. Elle dirige une école de jeunes filles. Son emploi garantit au couple un revenu stable. Mais, si elle veut le conserver, elle est obligée, elle aussi, de prendre le même type de décisions iniques que celles qui sont opposées à son mari.
Comme quoi, il n’est pas besoin d’aller voir Star Wars pour toucher du doigt les ambiguïtés de la Force. Ou pour réaliser qu’entre le bien et le mal, l’intégrité et la compromission, il n’y a pas l’épaisseur d’un sabre laser ou d’une pastèque iranienne.