Molly Bloom (Jessica Chastain) est une fille du Colorado élevée par un père tyrannique (Kevin Costner) qui rêve d’en faire une championne olympique de ski. Ses rêves de médaille évaporés suite à une mauvaise chute, elle débarque à Los Angeles et devient l’assistante d’un joueur de poker qui organise des parties homériques avec quelques stars de Hollywood. Elle apprend tant et si bien de son mentor qu’elle se met à son compte. À Los Angeles d’abord puis à New York. Molly Bloom a beau tout faire pour rester honnête, son succès insolent causera bientôt sa chute et son arrestation par le FBI. Défendue par un ténor du barreau (Idris Elba), sera-t-elle blanchie par la justice ?
L’ascension, la chute et la rédemption d’une idole déchue racontée avec une voix off et des flashbacks. Un air de déjà vu ? Sans doute. Le Loup de Wall Street, Lord of War, Boogie Nights étaient écrits sur le même schéma et constituent des modèles difficilement dépassables. D’autant que Molly Bloom n’a pas le charisme du trader Jordan Belfort ou du trafiquant d’armes Yuri Orlov. Le Grand Jeu, inspiré de son autobiographie, tente de façon trop voyante de la réhabiliter pour être tout à fait honnête.
Sauf que Le Grand Jeu a pour héroïne Jessica Chastain et pour réalisateur et scénariste Aaron Sorkin.
Jessica Chastain is back. Moins de deux ans après Miss Sloane, la WonderWoman de Hollywood est à nouveau seule à l’affiche. Juchée sur de vertigineux stilettos, maquillée comme une star du X, coiffée à la Veronica Lake, habillée dans les tenues les plus provocatrices, les seins moulés dans de vertigineux décolletés, elle est de tous les plans. Froidement dominatrice. Magistralement impériale. Follement séduisante. Comme dans Zero Dark Thirty où, dans une tenue moins élégante, elle endossait déjà un rôle similaire de maîtresse femme. Qu’elle fasse ainsi la nique à tous les seconds rôles masculins réduits au rôle de faire-valoir n’est pas anodin à l’époque du scandale Weinstein qu’elle n’a pas hésité à dénoncer. Ce film, cette actrice participent d’une évolution de Hollywood qui n’hésite plus à donner le premier rôle à une femme qui n’est ni mère ni putain. Julia Roberts avait ouvert la voix avec Erin Brockovitch en 2000 ; les Jessica Chastain movies sont en train d’en faire une autoroute.
Après avoir scénarisé l’une des meilleurs séries (The West Wing) et l’un des meilleurs films (The Social Network) de la décennie précédente, Aaron Sorkin passe (enfin) derrière la caméra. Sa marque de fabrique : des conversations à bâtons rompus, des joutes verbales d’une folle intensité, d’incessants allers-retours temporels. Accrochez vous à votre fauteuil. Ne perdez pas un détail. Et révisez vos règles de poker si vous ne voulez pas être complètement largués. Dextérité vaine ? Brio inutile ? Le reproche serait excessif. Car Aaron Sorkin a une vertu rare. Il parie sur l’intelligence du spectateur. Pas sur son cœur. Le Grand Jeu est un film froid, cérébral – qui aurait pu s’éviter une séquence inutile entre le père et sa fille au bord de la patinoire de Central Park. Laissons à d’autres réalisateur de RomCom le soin de nous attendrir. Remercions Sorkin de nous rendre moins bêtes.
Lorsqu’un film suscite des commentaires autant abondants que contradictoires, c’est que c’est un bon film.
Contrairement à vous , je ne crois pas que Le Grand Jeu soit exclusivement un film « froid et cérébral ». C’est un film qui dit aux femmes qu’il faut faire semblant d’être froides et cérébrales si elles veulent garder le cap dans un monde machiste: ici celui des joueurs de pokers fortunés et célèbres.
Ce qui fait l’intérêt et la complexité de ce biopic, au demeurant très bavard, c’est sa multiplicité de lectures.
1)L’enfance de Molly Bloom (Jessica Chastain) sabordée par un père autoritaire (Kevin Costner), ses débuts difficiles dans la vie, son ingéniosité à rebondir en organisant , à son compte, des parties de poker, sa faculté d’encaisser les coups au sens propre comme au figuré lorqu’elle est finalement arrêtée par le FBI. Eh bien sûr sa rédemption puisqu’elle sera finalement acquittée. Idris Elba dans le rôle de l’avocat se sort admirablement de ses longues tirades.
2)Un film féministe : une jeune femme belle et intelligente va gagner des sommes considérables en organisant pour des hommes riches et puissants ce qui les excite au moins autant que le sexe: le jeu. Car dans le jeu les dépressifs éprouvent du plaisir à perdre et les prédateurs (une mention spéciale pour Michael Cera) du plaisir à mettre à mort, au moins financièrement, leur adversaire.
3) Peut-être le but du film, comme vous le suggérez est-il de réhabiliter Molly Blom qui a tout de même traficoter dans des affaires illégales?
4) » Le grand jeu » plus que le poker lui-même (on se passerait d’ailleurs des tentatives répétées de cours accélérés)c’est la comédie à laquelle se livre Molly bloom en endossant la panoplie caricaturale de la femme sexy ( stilettos, décolletés vertigineux, vêtements provocants et moulants, cheveux longs ondulés) tout en résistant catégoriquement aux avances de ces messieurs!Une autre façon de dominer le monde machiste pour ne pas se faire écraser par lui.
5) Ce film nous rappelle aussi que notre vie d’adulte se joue dès l’enfance. C’est ainsi qu’il faut interpréter la scène que je juge ,comme vous ,superfétatoire entre le père et sa fille. Le cours express de psychothérapie est tout de même très amusant! Mais l’idée que Molly ait voulu prendre le pouvoir sur un groupe d’hommes pour venger sa mère , trompée et bafouée par son père est d’un ridicule consternant!
6) Contrairement à vous, , ce film a touché mon coeur. Molly n’est ni une salope, ni une manipulatrice. Elle est belle, intelligente, charismatique, déterminée, courageuse, honnête, bienveillante (et j’en passe) .et que lui valent toutes ces qualités? D’être seule à se battre sans amour, sans ami (e).