Au grand dam de Élisabeth sa sœur aînée (Mélanie Laurent), Pauline Beaugrand s’est amourachée du capitaine Neuville (Jean Dujardin). Le fringant officier doit aller combattre en Autriche et promet à sa fiancée de lui écrire chaque jour. Il n’en fait rien, la laissant dépérir. Élisabeth prend alors la plume et écrit, à la place de l’absent, des missives tendres où il narre une vie aventureuse. Mais, convaincue qu’il ne reviendra jamais, elle décide de faire mourir Neuville aux Indes pour permettre à sa sœur, vite consolée par un nobliau dégénéré, de tourner la page et fonder un foyer.
Mais tout se dérègle quand Neuville, qui avait en fait déserté les armées napoléoniennes, revient pouilleux et sans le sou.
Le Retour du héros mérite-t-il les critiques cinglantes qui ont accompagné sa sortie ? Je suis partagé. Et sans doute la présence à mes côtés de mon fils cadet, fan inconditionnel de Jean Dujardin dont il connaît par cœur chacune des répliques dans OSS117, m’a-t-elle influencé.
Certes Le Retour du héros n’est pas un chef d’œuvre. Loin s’en faut. C’est une grosse comédie signée par Laurent Tirard dont la marque de fabrique n’est pas la subtilité (Le Petit Nicolas, Astérix et Obélix : au service de Sa Majesté, Un homme à la hauteur). Un gros glaviot craché dans un landau ; une godiche qu’on subjugue en la giflant [c’est bien connu : les femmes aiment qu’on les gifle] ; des Cosaques le sabre entre les dents qui menacent de mettre à feu et à sang la douce Bourgogne [c’est bien connu : les Cosaques ont envahi la Bourgogne en 1812]. On est plus proche de Claude Zidi ou d’Édouard Molinaro que de Philippe de Broca ou de Jean-Paul Rappeneau.
Pour autant Le Retour du héros n’est pas aussi calamiteux qu’on le dit. D’abord par son scénario qui réussit à tenir la durée. Quand Neuville revient, Pauline pourrait révéler son imposture et le film s’arrêter faute d’enjeu. Mais Laurent Tirard et Grégoire Vigneron parviennent à multiplier les rebondissements inattendus, qui prennent à contre-pied le spectateur et le conduisent sans regarder sa montre à une conclusion qui n’était qu’à moitié escomptée.
Mais Le Retour du héros vaut surtout par son interprétation. Il faut dire un mot des rôles secondaires joués par une brochette d’acteurs impeccables dont le visage est souvent familier mais le nom injustement oublié : Féodor Atkine, Laurent Bateau, Christian Bujeau. Noémie Merlant dans le rôle de la sœur benjamine un peu cruche et Christophe Montenez dans celui de son mari pusillanime sont tordants.
Et bien sûr les deux héros principaux. Jean Dujardin qui réjouira ses fans – et désespèrera ceux qui considèrent non sans motif que sa carrière fait du surplace : toujours aussi séduisant, toujours aussi drôle. Mais surtout Mélanie Laurent qui n’est pas loin de lui voler la vedette sans en faire des tonnes, par quelques mimiques, quelques regards, quelques soupirs. La démonstration si besoin en était qu’elle compte désormais parmi les plus grandes.
Il n’y a pas à rougir, en effet, de rire d’une comédie bien ficelée ! Car l’on s’amuse dans ce film, du début à la fin, d’une réplique, d’un mot d’esprit , d’une mimique, d’un rebondissement, d’un clin d’oeil à l’histoire , à la littérature épistolaire, aux romans d’aventures, certes attendus mais bienvenus! Prétendre ne pas s’y être amusé serait pour moi pur snobisme intellectuel de khâgneux prétentieux. Et c’est un exercice ô combien difficile et que nous devons saluer que de faire rire tout le monde de la même chose. Il me semble que Mélanie Laurent mène le jeu et damne le pion à Jean Dujardin qui « fait » du Jean Dujardin. Dans certains plans (et je ne fais pas allusion aux scènes où il est grimé en pouilleux) il apparaît même vieilli et épaissi, au détriment de son image de tombeur. Une mention particulière pour les costumes et les décors : la vie de chateau en Bourgogne. Ce film est un rayon de soleil auquel j’accorderais volontiers une étoile supplémentaire. Au diable, pour un temps, les films à thèses, les biopics, les documentaires déguisés en fiction qui viennent plomber nos soirées!