Le pape François. Wim Wenders. Affiche attrayante pour le cinéphile, pour le croyant et, plus largement, pour tous ceux qu’intéresse la personnalité du 266ème Souverain pontife, le premier pape du Nouveau monde, le premier venu de l’hémisphère Sud, le premier Jésuite, le premier à avoir choisi le prénom de François d’Assise.
Sans doute le croyant, conquis d’avance, ressortira-t-il de la salle plus convaincu encore – sauf à appartenir aux franges les plus conservatrices de l’Église que le modernisme du nouveau pape pourrait effrayer. Car François a de quoi séduire. Il a le sourire généreux, l’œil malicieux. Surtout il tient un discours d’une humanité bouleversante qui résonne avec les défis de notre temps sans rien renier au dogme. Chaussant les bottes de Jean-Paul II, son antéprédécesseur – dont pourtant il n’évoque jamais la mémoire – il parcourt le monde, de Bangui à Philadelphie, de Jérusalem à Rio à la rencontre des plus humbles et des plus puissants (on voit défiler dans le bureau du pape Obama, Trump, Poutine et Erdogan – mais ni François Hollande ni Emmanuel Macron).
L’observateur lucide de la papauté analysera le contenu de ce documentaire comme le témoignage de ce que son service de relations publiques entend laisser voir au monde. Il ne s’agit pas en effet d’un biopic qui raconterait la vie de Jorge Mario Bergoglio mais plutôt d’un exposé méthodique des grands dossiers dont le pape s’est saisi : la pauvreté et l’inégalité des revenus, l’environnement, la famille, l’immigration… François est filmé seul. On ne le voit jamais entouré de ses collaborateurs. Cette présentation, si elle est cohérente avec l’objet du documentaire qui a le pape pour héros, renvoie de la papauté, qui repose sur un seul homme, une image paradoxalement fragile
Les sujets les plus polémiques ne sont pas tus. En réponse à une question sur le « lobby gay », François affirme que les homosexuels sont des enfants de Dieu et doivent être traités avec amour. Au sujet des prêtres pédophiles il prône une tolérance zéro – qu’on aimerait voir mise en pratique avec la même fermeté que celle avec laquelle il la promet. Seule sortie de route : les femmes dont la « complémentarité » (sic) avec les hommes est vantée, François renvoyant dos à dos « machistes et féministes » (re-sic).
Reste le cinéphile, laissé pour compte. On se pince de voir la signature de Wim Wenders sous cette œuvre de propagande, ce documentaire convenu, qu’on croirait tout droit sorti du Centro Televiso de Vaticano. Où est passé le réalisateur si prometteur de Paris Texas et des Ailes du désir ? Pourquoi a-t-il abandonné la fiction pour le – mauvais – documentaire ?