Alors que la guerre de sécession fait rage, une famille de colons français, négociants en parfums, est prise au piège de l’avancée des Nordistes au Missouri. Le père (Bruno Todeschini), qui a émancipé leur servante noire et l’a prise comme maîtresse, la mère (Constance Dollé, l’inoubliable Suzanne du Village français), confite en dévotion et leurs trois filles (Alice Isaaz, la cadette sulfureuse, Déborah François, plus garçonne, et Maryne Bertieaux, l’aînée écrasée par le chagrin de la mort de son fiancé et bientôt tuberculeuse) remettent leur sort entre les mains d’un mercenaire (le flamand Kevin Janssens) pour traverser les États-Unis et rejoindre en Californie le bateau qui les ramènera en France. C’est sans compter sur les embûches dressées sur leur chemin et sur une horde de cowboys lancés à leur poursuite.
La bande-annonce de L’État sauvage nous avait mis l’eau à la bouche. Ce n’est pas tous les jours que le cinéma français se frotte au genre du western – à la notable exception des Frères Sisters qui m’avait personnellement laissé sur ma faim. Ce n’est pas tous les jours qu’il le fait avec tant de moyens, reconstituant soigneusement la société sudiste dans une première partie digne de Autant en emporte le vent et filmant la suite dans des décors naturels à couper le souffle.
Hélas le genre est essoré et L’Etat sauvage ne peut que faire le constat désillusionné de cette impasse. Kelly Reichardt avait déjà en 2010 raconté dans La Dernière Piste l’interminable errance d’une famille de colons à travers les vastes étendues sauvages de l’Ouest américain. Les Frères Sisters bien sûr, mais aussi Hostiles, The Homesman, True Grit ou L’Assassinat de Jessie James par le lâche Robert Ford avaient tenté de ressusciter un genre ultra-référencé en le vidant de son manichéisme et en le lestant d’une noirceur parfois bien encombrante.
Malgré son ambition, son hyper-stylisation, sa musique, L’État sauvage se contente de répéter des situations déjà mille fois filmées : le chariot qui manque de verser dans un à-pic vertigineux, le cowboy fauché par une balle traîtresse tandis qu’il chevauche dans un sous-bois, l’assaut final du dernier carré de survivants résistant à la mitraille ennemie…
Il n’est pas jusqu’au féminisme dont il se revendique qui n’ait des airs de réchauffé : Natalie Portman était autrement plus convaincante dans Jane Got a Gun en 2016.