Jeanne (Noémie Merlant auréolée du triomphe de La Jeune Fille en feu) vit seule avec sa mère Margarette (Emmanuelle Bercot ressemble de plus en plus à Nathalie Baye). La jeune fille, d’une timidité maladive, et sa mère, follement extravertie, s’accordent sur leur refus de laisser un homme s’immiscer dans leurs vies. Margarette travaille dans un bar tandis que Jeanne est gardienne de nuit dans un parc d’attractions. Un nouveau manège vient d’y être installé qui exerce sur elle une attraction trouble. Elle lui a donné un nom : Jumbo.
Il y a mille façons de filmer les émois des premières histoires d’amour et l’audacieuse transgression qu’elles supposent chez des jeunes gens à peine sortis de l’enfance. Zoé Wittock, une jeune réalisatrice belge, n’opte pas pour la plus convenue en imaginant une idylle entre une jeune fille timide et… une machine. Cette pulsion a un nom : l’objectophilie. La réalisatrice l’aurait découverte en lisant un article sur Erika Eiffel, une jeune femme qui a épousé… la Tour Eiffel ! Et on se souvient que David Cronenberg lui a consacré un de ses films les plus troublants – dans une filmographie déjà bien troublante – Crash.
Le pari était osé. Il est raté.
Jumbo évolue sur une corde raide. Le spectateur est encore en terrain de connaissance quand Jumbo lui fait partager le désarroi d’une jeune femme, étouffée par une mère toxique, terrifiée à l’idée d’une relation avec un homme. Mais il est définitivement perdu quand se noue une histoire d’amour entre Jeanne et Jumbo, aussi classiques qu’en soient les étapes (approches, union, trahison, séparation, retrouvailles).
On aimerait être troublé quand Jeanne et Jumbo font l’amour, dans une scène qui se veut à la fois poétique et surréaliste durant laquelle la malheureuse Noémie Merlant est noyée dans des litres d’huile de moteur. Las ! On ricane plus qu’on se pâme ; on baille plus qu’on s’encanaille.