Antoine de Maximy part filmer un nouvel épisode de J’irai dormir chez vous dans les Carpates. Il y fait, comme lors de ses autres voyages, toutes sortes de rencontres. Mais, en s’enfonçant dans le nord du pays, il pénètre dans un territoire hostile. Il a un accident de voiture. Son corps n’est pas retrouvé ; mais la police le tient pour mort. Avec l’aide d’un policier pataud (Maxime Boublil), sa monteuse (Alice Pol) décide depuis Paris d’élucider les causes de cette mystérieuse disparition et peut-être de retrouver Antoine.
Comme un Philippe de Dieleveult qui prendrait son temps (seuls les plus de cinquante ans comprendront la référence), comme un Tintin sans Milou, Antoine de Maximy sillonne le monde avec pour seul bagage ses trois caméras et sa curiosité. Son seul objectif : rencontrer des autochtones, se lier avec eux et, si possible, comme l’annonce le titre de son 52 minutes, se faire inviter à dormir chez eux. En général, il reçoit un bon accueil qui leste ses reportages d’un optimisme bon enfant et en fait une ode à l’hospitalité humaine. Mais parfois, les choses se passent moins bien. De ces déboires est née l’idée d’un film.
J’irai mourir dans les Carpates est un « documenteur », un documentaire qui ne raconte pas tout à fait la vérité. Il se présente comme une fausse enquête policière. Le personnage qui en a la charge est Agnès, la monteuse d’Antoine, le policier assigné à l’enquête étant trop maladroit et trop amoureux d’Agnès pour avoir la moindre utilité. On aurait pu craindre que la romance qui se noue timidement entre les deux personnages interprétés par Alice Pol et Max Boublil ne parasite l’histoire ; mais ils sont l’un et l’autre si attendrissants dans leur rôle qu’on leur pardonne volontiers de nous éloigner du principal sujet du film.
Qu’est-il advenu d’Antoine dans les Carpates ? On l’apprendra en visionnant les minicassettes qu’il a filmées et en prêtant, comme dans Blow Up d’Antonioni, un soin attentif aux détails les plus insignifiants de ces enregistrements. On y découvrira au passage le beau métier du montage et les qualités qu’il nécessite.
J’irai mourir dans les Carpates se conclut comme il a commencé : dans la bonne humeur. Ce faux documentaire n’aura révolutionné ni l’histoire du cinéma ni celle du documentaire ; mais il aura fait passer un moment sympathique avec un animateur débordant de gentillesse et avec deux acteurs pleins de talent. Seul bémol peut-être : l’image caricaturale à souhait qu’il renvoie de la Roumanie, loin de la réalité d’un État membre de l’Union européenne qui a bien changé depuis le temps de Dracula.