Kirsten Johnson est documentariste. Elle vient de perdre sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer. Elle va bientôt perdre son père, frappé du même mal, auquel elle est profondément attachée.
Pour conjurer l’inévitable, elle décide d’en faire le héros d’un documentaire loufoque où il jouera sa propre mort et son arrivée au paradis.
Dick Johnson Is Dead est à la fois très drôle et très émouvant. Ce documentaire bénéficie d’un personnage en or : Dick Johnson lui-même, un anti-Tatie Danielle. Cet octogénaire tout en rondeur, ancien psychiatre, est le père ou le grand-père qu’on rêverait tous d’avoir. D’où tient-il son inaltérable bonne humeur ? De sa foi profonde (il est adventiste du septième jour) ? De la vie qui semble-t-il lui fut douce même si on n’en apprend pas grand-chose ? De l’amour dont l’entourent sa fille et son fils ?
On le découvre à quatre vingt ans passés, veuf depuis déjà quelques années, entouré de ses petits-enfants bruyants et joueurs. Son état de santé déclinant l’oblige à fermer son cabinet de consultation (on travaille vieux aux Etats-Unis) et à quitter Seattle pour aller habiter à New York avec sa fille. Il lui faut vendre sa voiture et renoncer à conduire. C’est la première renonciation, douloureuse, à son indépendance. Il y en aura d’autres…
Dick Johnson Is Dead n’entretient aucun suspens et ne contient aucun coup de théâtre. La vie hélas n’en présente guère dont on sait d’avance l’inéluctable conclusion. C’est avec cette conscience éclairée et un solide sens de l’humour que Kirsten Johnson l’affronte. L’acceptation sereine de l’irrémissible dégradation de l’état de santé de son père est sa seule ligne de conduite. Elle n’exclut pas un profond chagrin et une sourde colère. Elle est ponctuée de ces scènes de pure comédie où elle filme la mort de son père dans un escalier glissant, au volant, sur un trottoir, etc.
Son documentaire pourra sembler nombriliste et un peu vain. Il n’en reste pas moins un témoignage profondément touchant d’amour filial.