Johnny a dix ans. Sa mère l’élève seule, avec son frère aîné et sa sœur benjamine. Mais le travail de sa mère dans un débit de tabac, sa vie sentimentale agitée et son penchant pour la bouteille obligent Johnny à assumer des responsabilités qui ne sont pas de son âge.
Johnny est en CM2 l’élève de Monsieur Adamski, un enseignant fraîchement débarqué à Forbach, en Moselle, près de la frontière allemande. Le jeune garçon, brûlant du désir d’apprendre, a tôt fait de devenir le « chouchou » de son maître que sa fragilité émeut.
Samuel Theis avait co-réalisé en 2014 un film exceptionnel, Party Girl, tourné à Forbach, et interprété par sa propre mère, Anéglique Litzenburger – qui fait un rapide caméo dans l’un des premiers plans de Petite Nature – qui racontait l’histoire d’une vieille prostituée en bout de course hésitant à se ranger des voitures. Huit ans plus tard, il réalise son second, toujours à Forbach et toujours en partie autobiographique. Samuel Theis ne cache pas en effet qu’il a mis beaucoup de lui dans le personnage de Johnny, un gamin issu d’un milieu difficile qui réussira – comme Samuel Theis lui-même – à s’élever par l’école.
Tel est en effet le premier sujet de Petite Nature qui m’a fait penser à Eddy Bellegueule que je suis étonné qu’aucune critique ne mentionne. Certes, Johnny est un chouïa plus jeune que l’Eddy d’Edouard Louis. Mais le milieu dont il vient est le même, pauvre et violent – même si la mère de Johnny est plus une Fantine qu’une Thénardier. Et Johnny comme Eddy rêve de le quitter – je vous laisse avec le dernier plan pour savoir s’il y parviendra.
Le deuxième sujet est l’Education. Il est incarné par Monsieur Adamski, le « maître » de Johnny. « Maître », un terme qui fleure bon sa IIIème République et dont je ne savais pas qu’il était encore utilisé dans les écoles primaires. Le personnage est incarné à la perfection par Antoine Reinartz, un acteur qu’on a déjà souvent vu (Arthur Rambo, Chanson douce, Roubaix, une lumière, 120 b.p.m., etc.), mais qui peine à se frayer un chemin jusqu’au haut de l’affiche. Son investissement dans son travail, l’attention qu’il porte au jeune Johnny, la générosité avec laquelle sa compagne et lui le prennent sous sa coupe devraient faire chaud au cœur à tous les enseignants qui s’y reconnaîtront peut-être et à tous les parents d’élève qui espèrent que les professeurs de leurs enfants lui ressemblent.
Le troisième sujet est diablement glissant. Les critiques que j’aie lues en font le moyeu du film alors que, selon moi, il n’en constitue qu’un des rayons. Il s’agit de l’attirance qu’éprouve Johnny pour son maître. On imagine d’abord que Johnny se cherche un père de substitution. On comprend bientôt qu’il y a plus que cela. Le film pourrait basculer dans le scabreux ou se retrouver dans l’impasse. Il réussit à l’éviter. Ce n’est pas la moindre de ses qualités.
Magnifique critique avec un jolie métaphore sur le thème de la bicyclette. Il y a aujourd’hui beaucoup moins de maîtres que de maîtresses à l’école, mais comment diable pensiez-vous que les enfants appelaient les quelques hommes encore présents dans les écoles primaires ?
J’aurais penché pour Monsieur… mais je n’ai aucune expérience
Madame et Monsieur arrivent au collège plutôt