Evelyn Wang (Michelle Yeoh) est épuisée. Epuisée par la laverie automatique qu’elle doit gérer et par le contrôle fiscal qu’elle subit. Epuisée par sa famille : son père grabataire, sa fille unique, Joy, qui vient de faire son coming out, et son mari Waymond qui est sur le point de la quitter.
Mais la vie de Evelyn bascule brutalement lorsque, dans l’immeuble des impôts où elle subit un interrogatoire humiliant avec une inspectrice revêche (Jamie Lee Curtis), elle se retrouve plongée dans le multiverse. Dans ces univers parallèles, hantés par une puissance démoniaque qui a pris possession du corps de sa fille, Evelyn découvre la multiplicité de destins qu’elle aurait pu avoir si elle avait fait des choix de vie différents : championne de kung-fu, star de cinéma, cheffe dans un restaurant gastronomique ou encore lesbienne avec des hot dogs à la place des doigts (sic)
Everything Everywhere All at Once nous vient des Etats-Unis où il a fait un tabac au box-office précédé d’une réputation flatteuse et méritée. Car EEAOT – comme l’appelent déjà les fans de ce film qui, à n’en pas douter, deviendra culte – a une sacrée ambition. Comme Eternal Sunshine of the Spotless Mind, comme Matrix, comme désormais la plupart des grands blockbusters américains (la franchise X-Men, Superman, etc.), EEAOT joue à saute-moutons d’un univers à un autre, au risque parfois d’y paumer le spectateur. Les jeunes adorent ce zapping épileptique et les plus âgés trouvent leur compte à cette histoire touchante.
Le problème, le gros problème de EEAOT est que cette débauche d’effets spéciaux, cette imagination débordante, sont mises au service d’une thèse affligeante : le sempiternel bonheur familial qui passe, pour Evelyn, comme de bien entendu, et sans rien spoiler à un scénario cousu de fil blanc, par sa triple réconciliation avec son père, son mari et sa fille. Certes, me dira-t-on Eternal Sunshine of the Spotless Mind était, tout bien considéré une comédie romantique un peu niaise ; et Matrix la parabole philosophique boursouflée de la Caverne de Platon. EEAOT est donc de la même farine.
C’est ici, une fois cette prémisse posée et EEAOT, ESSM et Matrix mis dans le même sac, que dans notre petit multiverse cinématographique s’ouvre à nous, amis cinéphiles, deux options logiques : soit hisser ces trois films là dans notre panthéon cinématographique, malgré leur morale un peu niaise ; soit au contraire, au risque d’un sévère déclassement des deux premiers, les reléguer du piédestal où tous les palmarès les ont déjà hissés.
À vous de choisir !