Maren (Taylor Russell) a dix-sept ans. Elle a hérité de ses parents une tare encombrante : elle est cannibale. Quand son père la laisse à elle-même après une énième tentative de crime qu’il n’a pas réussi à prévenir, Maren n’a d’autre solution que de prendre la route pour retrouver sa mère au fond du Minnesota. En route, elle découvre qu’elle n’est pas la seule dans son cas. Un vieux « mangeur » (Mark Rylance) aimerait la prendre sous sa coupe. Mais Maren préfère se rapprocher de Lee (Timothée Chalamet), un garçon de son âge.
Luca Guadagnino et Timothée Chalamet s’étaient fait la courte échelle pour accéder au succès. Avec Call me by your name – un film que je suis peut-être le seul spectateur au monde à ne pas avoir adoré – le premier lançait la carrière du second qui a depuis fait un sacré bout de chemin, enchaînant films d’auteur (chez Woody Allen ou Wes Anderson) et blockbusters (Dune). Il est devenu l’icône de toute une génération, un véritable James Dean des temps modernes. Luca Guadagnino a quant à lui peiné à transformer l’essai : il n’a guère réalisé que le remake sans intérêt d’un giallo italien des 70ies Suspiria.
Les remettre tous les deux à l’affiche, c’était parier sur la fidélité et sur la curiosité de tous les amoureux de Call me by your Name. C’était aussi parier sur le parfum de scandale que le sujet transgressif du film et son interdiction aux moins de seize ans font naître.
Bones and All a des précédents. Ce n’est pas la première fois qu’on voit des cannibales amoureux à l’écran ou qu’on explore les frontières ambiguës entre l’amour passion et l’entre-dévorement : Trouble Every Day de Claire Denis, Only Lovers Left Alive de Jim Jarmusch. Ce n’est pas la première fois non plus qu’on filme un road movie d’un couple en cavale au travers des Etats-Unis : Les Amants de la nuit de Nicholas Ray, l’iconique Bonnie and Clyde bien sûr de Arthur Penn, La Ballade sauvage de Terrence Malick, plus près de nous American Honey de Andrea Arnold.
Mais Bones and All ne marche pas. À qui la faute ? Aux deux héros entre lesquels aucune alchimie ne se crée ? Au scénario plan-plan qui ne ménage aucune surprise ? À l’absence de tout malaise que la situation aurait pourtant dû logiquement susciter ?
Le seul personnage intéressant du film est celui joué par le grand Mark Rylance qui crée un trouble hélas vite dissipé.