Dixon Steele (Humphrey Bogart) est un célèbre scénariste hollywoodien en panne d’inspiration. Il est suspecté d’avoir tué l’employée d’un restaurant revenue un soir chez lui à son bras pour l’aider à écrire l’adaptation d’un livre médiocre qu’il n’avait pas eu le courage de lire. Mais le témoignage d’une voisine, Laurel Gray (Gloria Grahame), le disculpe. Bientôt se noue une idylle avec elle, qui lui redonne le goût de l’écriture. Mais Dixon cache un fond anxieux et paranoïaque qui resurgit à chaque occasion et hypothèque le bonheur du jeune couple.
Le Violent est un chef d’œuvre oublié, éclipsé par Boulevard du crépuscule de Billy Wilder et All About Eve de Joseph Mankiewicz qui sortirent la même année et traitaient d’un sujet à la mode à l’époque : les coulisses de Hollywood. Il a pour héros, ou plutôt comme anti-héros, un scénariste interprété par Humphrey Bogart qui était alors au sommet de sa gloire et qui accepta pourtant le rôle antipathique d’un homme pathologiquement jaloux et violent.
Le film est l’adaptation d’un polar de Dorothy Hughes, une auteure à succès elle aussi reléguée dans l’oubli, In a Lonely Place, traduit en français sous plusieurs titres, Tuer ma solitude, Un homme dans la brume et même Le Violent. Nicholas Ray, qui n’avait pas encore tourné Johnny Guitare (1954) ni surtout La Fureur de vivre (1955) mit dit-on beaucoup de lui-même dans le personnage de Dixon Steele, lui aussi rongé par ses démons intérieurs. Il confia le rôle de Laurel à Gloria Grahame qu’il avait épousée deux ans plus tôt et dont il était en train de divorcer (elle avait été surprise en fâcheuse posture avec le premier fils de Ray, qui avait alors treize ans à peine).
Le Violent n’est pas un polar. L’enquête sur le meurtre de Mildred Atkinson n’en constitue pas le sujet essentiel. C’est une description quasi-clinique de la pathologie de Dixon : une anxiété incontrôlable qui l’entraîne aux pires excès. On parlerait aujourd’hui de masculinité toxique et on ne lui consacrerait certainement pas un film.