En 2013, Sur les chemins de l’école racontait les difficultés que surmontaient quatre gamins, au Kenya, au Maroc, en Argentine et en Inde, pour se rendre à l’école en défiant les bêtes sauvages de la savane, en traversant les montagnes de l’Atlas, à dos de cheval dans la Patagonie ou en poussant un fauteuil roulant. Il attirait en salles plus d’un million de spectateurs, décrochait le César 2013 du meilleur documentaire et devenait le film le plus rentable de l’année.
Escomptant sans doute le même succès, We have a Dream est construit exactement sur la même trame : croiser le destin de cinq enfants à travers le monde, en France, au Kenya, au Népal, au Rwanda et au Brésil. À l’accès à l’éducation, thème éminemment consensuel, est substitué celui, plus consensuel encore du handicap et de la lutte contre les discriminations. Au titre anglophone, emprunté, malgré qu’il en ait, à Martin Luther King, aurait pu être ajouté le sous-titre Disability is not Inability, qui sert de slogan à l’école qui accueille Charles, le jeune aveugle kenyan qui rêve de devenir coureur de fond.
Chacun des enfants filmés par la caméra globe-trotter de Pascal Plisson a un handicap et un rêve. Maud, la Française, amputée de la jambe droite à la naissance, veut faire de la danse comme sa sœur jumelle. Nirmala et Khendo, amputées elles aussi d’une jambe après le tremblement de terre qui a frappé le Népal en 2015, poursuivent le même rêve. Xavier est un albinos rwandais qui aimerait étudier et devenir docteur malgré tous les préjugés dont il est victime. Antonio enfin, nourrisson adopté par deux parents infertiles, autiste et hyper-actif, est fasciné par le métier de pompier.
Qui dira du mal de We Have a Dream passera pour un pisse-froid ou pire un misanthrope, insensible au handicap de ses enfants, à leur résilience et à la bienveillance de leurs parents et de leur entourage qui, à force d’amour et de patience, les aident à trouver leur place et à tracer leur chemin. Il est probable sinon certain que des spectateurs, émus aux larmes, voient en nombre ce documentaire et en tressent les louanges.
Pour autant, sans parler de la mise en scène, reproduisant sans imagination une formule éculée, montage en parallèle de plusieurs histoires filmées aux quatre coins du monde, il y a chez cet Arthus-Bertrand de l’enfance courageuse un trop-plein de bien-pensance qui laisse mal à l’aise. Tout est positif dans We have a Dream, depuis le courage de ces enfants, beaux, sages et parfaits comme des publicités de cartes postales, depuis l’amour que leur dispensent leurs parents, jusqu’à la qualité des soins qu’ils reçoivent dans les institutions qui les accueillent.
Xavier, Charles, Antonio, Maud, Nirmala et Khendo sont les oursons, certes handicapés, d’un monde de Bisounours.