François Schaar (Daniel Auteuil) est un ténor du barreau propulsé au cœur de l’arène médiatique depuis qu’il assure la défense des parents de deux enfants assassinés par un pédophile. Alors que la pression s’accroît, un lourd secret familial, tu depuis presque trente ans, est sur le point d’être révélé.
J’ai entendu de si mauvais retours de ce film que :
a. j’ai bien failli renoncer à aller le voir et ai laissé passer plus de dix jours depuis sa sortie ;
b. je l’ai trouvé bien moins mauvais que ce que j’escomptais.
Joachim Lafosse est un jeune réalisateur belge, plus si jeune, qui, à chacun de ses films, frappe fort et juste. À perdre la raison (2012) – avec une Emilie Dequenne dont on disait encore hier soir avec des amis combien elle était une grande actrice – essayait d’éclairer les motifs d’un quintuple infanticide ; L’Economie du couple, mon film préféré de l’année 2016, disséquait un interminable divorce ; Les Intranquilles nous plongeait dans le quotidien tourmenté d’un peintre bipolaire. Les distributeurs ne s’y sont pas trompés qui mentionnent ces deux derniers films en haut de l’affiche d’Un silence.
On conçoit aisément le potentiel dramatique que Lafosse a décelé dans l’affaire Hissel, du nom de l’ancien avocat de familles de victimes de Marc Dutroux. On ne saurait rien en dire de peur de spoiler les deux coups de théâtre qui viennent clore le film.
On aura déjà anticipé le premier si on a lu quelques critiques du film qui l’évoquent sans voile. Il se laisse d’ailleurs très vite deviner dans le film – même si on n’en perçoit pas immédiatement les contours précis. Le scénario ne le traite pas frontalement. Il s’agit plutôt, en biais de traiter du silence – n’est-ce pas le titre du film ? – et de la honte de ceux qui, pensant bien faire, l’ont imposé. C’est ici le rôle d’Astrid, l’épouse de François, à travers les yeux de laquelle l’intrigue est racontée depuis sa toute première scène qui provoque un long flashback. Le rôle casse-gueule est interprété par Emmanuelle Devos qui parvient non sans mal à s’en dépêtrer. C’est qu’il n’est pas facile de jouer l’épouse aimante, qui a cru bon de pardonner à son mari mais qui, trente ans plus tard, découvre combien elle a eu tort de taire ses crimes.
Et le silence – pourquoi le titre utilise-t-il l’article indéfini ? – a des effets dévastateurs. Il corrompt tout, pendant des années. C’est le rôle de Raphaël, le second enfant des Schaar, un enfant adopté et un adolescent en échec scolaire, de porter ce fardeau.
Je comprends qu’on n’ait pas aimé ce film glaçant, son absence revendiquée de tout pathos, ses décors nocturnes, ses dialogues théâtralisés qui sonnent parfois faux. Pour autant, il ne mérite pas les critiques cinglantes que j’en ai entendues.