Au XIIème siècle, un meurtre a été commis à la Cour impériale. Une missive de la plus haute importance a été dérobée. L’enquête est confiée à un soldat sans grade qui comprend vite qu’il est le jouet de forces qui le dépassent.
Full River Red est devenu un phénomène de société en Chine où il a battu l’an passé tous les records du box office. Il est l’œuvre de Zhang Yimou qui, après avoir signé quelques uns des plus grands films du cinéma chinois (Le Sorgho rouge, Épouses et Concubines…), est devenu le réalisateur officiel du régime communiste, qui lui a notamment confié la supervision de la cérémonie d’ouverture des J.O. à Pékin en 2008.
Full River Red n’est pourtant pas un film à grand spectacle à l’image de La Grande Muraille, cette ode à peine déguisée au nationalisme chinois que Zhang Yimou avait réalisée à grands frais en 2016 avec Matt Damon en guest star hollywoodienne. On n’y trouve pas de batailles cyclopéennes ou de monstres venus d’une autre planète. Tout s’y passe à huis clos, en petit comité, dans les arrière-cours de la cité impériale.
L’intrigue de Full River Red est particulièrement complexe. Elle réserve son lot de surprises, pas toujours compréhensibles. Le scénario est constitué d’une succession métronomique de scènes qui mettent en présence les différents protagonistes selon des combinaisons variables : l’inspecteur interroge successivement le chef de la garde, les prostituées qui ont passé la nuit avec la victime, le directeur de cabinet du Grand Chancelier. Entre chacune de ses scènes, les protagonistes se déplacent à l’intérieur du palais au son d’une anachronique musique qui mélange des instruments traditionnels et une rythmique très contemporaine.
Full River Red s’étire sur près de trois heures dont on sort essoré, sans être tout à fait sûr d’avoir saisi tous les ressorts de l’intrigue mais soulagé d’avoir compris son titre. Il fait référence à un des poèmes les plus célèbres de l’histoire chinoise, attribué au général Yue Fei. Une sorte de Marseillaise avant l’heure qui a une résonance toute particulière : son évocation des « territoires perdus » renvoie à la reconquête de Taïwan.
Le succès de Full River Red interroge doublement. Il montre les limites du soft power chinois : ce film-là est trop loin de nos canons, trop long, trop alambiqué, pour séduire un public occidental. Plus tristement, il montre les limites de l’universalité du septième art : ce qui plaît en Chine ne plaît pas nécessairement ailleurs. Tous les spectateurs du monde ne se ressemblent pas et ne vibrent pas aux mêmes spectacles.