Après la guerre de Sécession, un soldat démobilisé, Tom Jeffords (James Stewart), cherche de l’or en Arizona. La guerre y fait rage entre l’armée de l’Union et les Indiens apaches du chef Cochise (Jeff Chandler). Jeffords, qui avait secouru un jeune Apache blessé et bénéficié en retour de la clémence des Indiens, ne partage pas les préjugés des Blancs à leur égard. Il veut apprendre leur langue, comprendre leur culture et trouver avec eux un accord pour mettre fin aux guerres interminables qui les opposent aux Blancs.
La Flèche brisée est un film marquant dans l’histoire du western. Bien avant Danse avec les loups ou Pocahontas, il rompt avec l’imagerie traditionnelle qui prévalait jusqu’alors. Le western participait d’un mythe, celui de la frontier sans cesse repoussée. Les colons blancs, appuyés par l’armée américaine, y entreprenaient une œuvre prométhéenne : ils construisaient une nation, se battant contre une nature ingrate et contre ses occupants, violents et fourbes, ravalés à un statut quasi-animal de bêtes sauvages dont il fallait se défier et qu’il fallait exterminer. Ils étaient du côté du Bien, les Indiens du côté du Mal.
Loin du manichéisme d’un John Ford, Delmer Daves, qui a voyagé chez les Indiens et appris leur langue, cherche à les réhabiliter. Il y réussira en partie. Jeff Chandler, l’interprète légendaire de Cochise, personnifiera pour longtemps ce chef apache à la fois indomptable et ouvert au dialogue. Dans le rôle de « passeur de cultures », James Stewart effectue grâce à ce rôle et grâce à celui qu’il tient dans Winchester 73 qu’il tourne la même année, un tournant dans sa carrière. Le gendre idéal qu’il incarnait dans les comédies de Capra, de Cukor ou de Lubitsch, a vieilli. Il est plus aguerri, plus philosophe. Il devient le héros de western par excellence : L’Appât, L’Homme de la plaine, L’Homme qui tua Liberty Vallance, La Conquête de l’Ouest….