Depuis la mort de sa femme, Pierre (Vincent Lindon) essaie bon an mal an de concilier son travail à la SNCF et l’éducation de ses deux fils aujourd’hui adultes. Le cadet, Louis (Stefan Crépon, découvert en informaticien geek dans Le Bureau des légendes), brillant étudiant en classe prépa au lycée Fabert, rêve de poursuivre ses études à la Sorbonne. L’aîné, Félix (Benjamin Voisin, César du meilleur espoir masculin 2022 pour Illusions perdues), se cherche. Il sèche les cours de son IUT, délaisse ses entraînements de football et fréquente un groupuscule d’extrême-droite.
Jouer avec le feu est l’adaptation de Ce qu’il faut de nuit, le roman de Laurent Petitmangin, un de mes coups de cœur de la rentrée littéraire 2020. Son titre, sa bande annonce nous entraînent dans une fausse direction. On pourrait penser qu’il s’agit d’un film sur l’extrême-droite, sur l’embrigadement d’un de ses membres, sur la manière dont il se déroule et sur la façon de s’en prémunir à la façon de Un Français ou de Chez nous. Mais le vrai sujet du film est ailleurs : il est, comme son affiche le montre, dans la relation triangulaire entre un père et ses deux fils.
Vincent Lindon est sur le devant. D’abord, parce qu’il est l’acteur le plus connu des trois, celui qui attirera les spectatrices qui en sont les plus enamourées – et repoussera peut-être les spectateurs exaspérés par ses tics et/ou ses opinions politiques tranchées. Ensuite parce que le film interroge l’amour paternel. J’y reviendrai. Mais il ne faut pas oublier la relation qui unit les deux frères, soudés par la mort de leur mère, excellemment interprétés par deux des plus remarquables jeunes pousses du cinéma français.
Un père ne doit-il jamais s’arrêter de s’inquiéter pour son enfant au risque de l’empêcher de prendre son autonomie ? Comment peut-il lui éviter de prendre une mauvaise voie ? Doit-il faire appel à son intelligence pour l’en dissuader ou à la contrainte pour le lui interdire ? L’amour paternel lui fait-il devoir de soutenir son fils inconditionnellement ou, si celui-ci franchit les limites de l’acceptable, a-t-il le droit ou le devoir de s’en désolidariser ? Autant de questions qui touchent au plus profond les hommes – et les femmes aussi peut-être – qui, comme moi, ont des enfants de l’âge de ceux du film.
Autant ces questions sont vertigineuses, autant la façon dont le film essaie d’y répondre m’aura laissé sur ma faim. Les acteurs ne sont pas à blâmer ; mais leur direction est sujette à caution, qui les filme constamment au bord de l’explosion. Et le défaut de Vincent Lindon est précisément d’être constamment au bord de l’explosion.
Le film se termine par une ellipse saisissante. Je ne me souviens plus si le livre était construit de la même façon. Le temps qu’un plan se termine, le suivant se déroule un ou deux ans plus tard. On ne dira pas ce qui s’est passé entretemps et qu’on comprend vite. C’est l’occasion pour Vincent Lindon de prononcer un sentencieux monologue (réquisitoire ou plaidoyer ?) qui, un peu comme dans les fables de La Fontaine, éclaire la signification du film. On peut applaudir à sa lucidité ; on peut aussi pinailler sur sa grandiloquence.
j’ai bcp apprécié Voisin que je trouve remarquable soit dans « Illusions perdues » soit dans le film (le titre m’échappe ô vieillesse ennemie ! qui se passe au bord de la mer avc la soeur de Carla Bruni en mère trop compréhensive et soi-disant juive ….Bref j’aime bcp Benjamin Voisin …BREF JE COMPRENDS d’après votre critique que le film n’est pas un chef d’oeuvre mais présente quand même quelque intérêt.
Ca donne surtout envie de lire le bouquin !