Oksana Chatchko (1987-2018) fut l’une des trois cofondatrices du mouvement Femen. Elle grandit dans une petite ville ukrainienne. Passionnée d’art, elle se consacre à la réalisation d’icônes à côté de ses études à la faculté de philosophie. C’est alors qu’elle rencontre deux jeunes femmes de son âge et fonde le mouvement Femen. Chatchko en inspire l’esthétique : buste nu, slogan peint à même le corps. Le mouvement mène des opérations coup de poing en Ukraine, en Biélorussie – où elles sont torturées par la police – et en Russie – où elles manifestent contre Poutine le jour de l’élection présidentielle.
Les Femen quittent l’Ukraine pour la France où elles obtiennent l’asile politique. Elles se divisent bientôt, Oksana Chatchko critiquant le virage autoritaire et fashion tendance pris par le mouvement sous l’impulsion d’Irina Chevtchenko.
Oxana est le troisième film de Charlène Favier. On avait beaucoup aimé son premier, Slalom, sur l’emprise exercée par un entraîneur de ski sur une jeune sportive de compétition. Noée Abita y jouait le rôle principal. Elle a un petit rôle dans Oxana, celui d’Apolonia Sokol, qui héberge Oksana à son arrivée en France dans une communauté d’artistes dans le dix-huitième arrondissement. D’ailleurs qui a vu le récent documentaire consacré à cette jeune artiste surdouée, Apolonia, Apolonia, se souvient qu’y apparaissait en arrière-plan le personnage d’Oksana.
Oxana a une qualité incontestable : nous raconter, avec une grande fidélité, l’histoire du mouvement des Femen, sa naissance, sa célébrité grandissante, son expatriation en France, ses tiraillements…. Inna Chevtchenko, sa figure emblématique, dont on apprend qu’elle n’a pas participé à la création du mouvement mais l’a rejoint plus tard pour en accaparer la direction, en prend pour son grade. Je me suis demandé comment elle avait réagi à cette version des faits et si elle avait saisi la justice pour la faire interdire.
On s’interroge en regardant Oxana sur la valeur ajoutée de la fiction sur le documentaire. Ce que le film nous raconte des Femen, un documentaire – tel que celui tourné en 2014 par le réalisateur suisse Alain Margot Je suis Femen – l’aurait aussi bien voire mieux raconté. L’intérêt de la fiction est du côté de son personnage principal et du portrait incandescent qu’elle en fait. Oksana est une jeune femme ardente et entière. Pénétrée de religion, elle veut entrer dans les ordres gamine et en est dissuadée par un pope qui lui conseille de développer ses talents artistiques et de peindre des icônes. Le féminisme est pour elle une autre religion à laquelle elle se consacre à corps perdu.
Le défaut hélas d’Oxana est que cette incandescence, selon moi, fait long feu. L’actrice qui l’incarne a beau payer de sa personne, son interprétation m’a semblé bien fade. Je n’ai pas vibré, je n’ai pas trouvé touchante cette figure qui avait vocation à l’être.