Claude Chabrol, première vague (1958-1973) ★★★☆

Le Champo, à Paris, programme pendant l’été une rétrospective Claude Chabrol. Douze films sont à l’affiche, tournés entre 1958 et 1973. Il s’agit des premiers de ce réalisateur particulièrement prolifique : il en tourna environ soixante-dix pour le cinéma et la télévision jusqu’à sa mort en 2010.

Chabrol est connu comme l’un des chefs de file de la Nouvelle Vague. Il avait en effet fait ses premiers pas comme critique aux Cahiers du cinéma avec Godard, Truffaut, Rivette. Ses tout premiers films (Le Beau Serge tourné sous la neige dans la Creuse avec l’argent d’un héritage touché par sa femme, Les Cousins, grand succès au box office) rompent avec les règles hiératiques du cinéma de l’époque : petits budgets, acteurs inconnus, sujets naturalistes, tournage en noir et blanc…

Mais très vite, le cinéma de Chabrol prend un autre chemin. Les Godelureaux en 1961 raconte l’histoire burlesque d’une bande de zazous parisiens, façon La Dolce Vita, Breakfast at Tiffany’s ou La Grande Bouffe. Sous la bouffonnerie affleure la critique cynique d’une société sans repères qui s’ennuie.

La rétrospective enjambe les années soixante, pendant lesquelles Chabrol s’égare dans un cinéma plus commercial, pour se focaliser sur ce qui constitue peut-être le sommet de sa carrière : les films réalisés avec son épouse Stéphane Audran et les acteurs auxquels le lie une amitié indéfectible, Michel Bouquet, Michel Duchaussoy, Jean Yanne….
La Femme infidèle (1969), Que la bête meure (1969), Le Boucher (1970), Juste avant la nuit (1971), Les Noces rouges (1973) sont des oeuvres balzaciennes. Devant la caméra de Chabrol, c’est la France pompidolienne qui est racontée, son conformisme, ses petits mensonges, mais aussi parfois sa grandeur d’âme (qu’on pense au héros du Boucher interprété par Jean Yanne). Claude Chabrol fait oeuvre de sociologue sinon de moraliste. Qui se demande à quoi ressemble un bourgeois dans la France de Pompidou doit voir Michel Bouquet dans La Femme infidèle ; qui veut avoir une idée de la vie en province à cette époque gagnerait à regarder Le Boucher.

Claude Chabrol utilise souvent comme point de départ des romans de série B, des polars américains ou français dont il a racheté les droits. Les histoires qu’il raconte sont des thrillers avec des meurtres, des cadavres, des policiers… Il prend son temps pour les filmer, comme de subtiles mécaniques hitchcockiennes, avec un tempo un peu mou qu’on trouverait un peu lent aujourd’hui. La France qu’il raconte n’existe plus : ses personnages fument au restaurant, boivent du whisky à toutes heures du jour et mettent sans vergogne la main aux fesses de leurs peu farouches secrétaires .

Claude Chabrol est-il pour autant démodé ? Non. Car son cinéma, avec une étonnante économie de moyens, reste d’une étonnante modernité, dans ses cadrages, dans l’utilisation de la musique de Pierre Jansen (ultra-contemporaine même si elle revisite parfois les canons de la musique classique), dans l’écriture millimétrée du scénario.

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Touch ★★★☆

Sentant venir sa fin prochaine, Kristofer quitte son pays, l’Islande pour l’Angleterre. Il remonte l’histoire de sa vie et se rend à Londres où, cinquante ans plus tôt, jeune étudiant, il travailla dans un restaurant japonais et y tomba amoureux de la fille du propriétaire.

Il ne faut pas se fier à l’affiche, horriblement kitsch, au titre (dont je n’ai pas compris le sens), ni même au pitch sirupeux de ce film. Touch n’est pas une RomCom en cuisine. C’est au contraire un film d’une grande délicatesse qui joue sur une corde qui me fait fondre : la nostalgie des amours passées.

Il est construit à partir de flash-backs entre le présent, les premiers mois de l’année 2020, une époque que nous avons tous en mémoire car c’est celle où le monde entier s’est confiné pour se protéger du Covid, et le passé, la fin des sixties dans un quartier populaire de Londres soigneusement reconstitué.
Il met en scène un vieil Islandais, Kristofer, dont le médecin vient de diagnostiquer une maladie neurodégénérative. Kristofer revient sur les lieux où, cinquante ans plus tôt, il a vécu une idylle. Son voyage se transforme en quête et en enquête sur les traces de Miko, cette jeune femme qui le marqua pour la vie et qui a mystérieusement disparu.

On me dira que Touch est bien mielleux et prévisible. Ce ne sera pas faux, même si, en ce qui me concerne, je n’avais pas anticipé les bifurcations prises par le scénario. J’ai trouvé les deux protagonistes si beaux, si jeunes, si touchants que j’ai aveuglément adhéré à la romance qui les rapproche, au risque d’y perdre tout sens critique.

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Pooja, Sir ★☆☆☆

L’inspectrice Pooja est envoyée dans une ville du sud du Népal en état de siège, où la minorité madhesi proteste pour la défense de ses droits. Le fils d’un député vient d’y être kidnappé. Pooja mène l’enquête en dépit des obstacles qui se dressent devant elle.

Avez-vous déjà vu un film népalais ? Pour moi Pooja, Sir est le premier. Cette rareté doit-elle vous inciter à aller le voir ? Pas sûr.

Ce film rappelle beaucoup un autre, sorti il y a un an tout juste : Santosh mettait en scène une veuve recrutée dans la police indienne qui enquêtait sur un infanticide et se retrouvait en butte à la misogynie de ses collègues.

Pooja elle aussi est une femme au milieu des hommes. Pour se faire respecter elle surjoue la masculinité : coupe à la garçonne, vêtements unisexe, bourrue plus que nécessaire, elle exige de ses subordonnées d’être appelée « Sir ». Voilà le titre expliqué.

Le réalisateur Deepak Rauniyar charge la barque. Son film évoque plusieurs thèmes : le machisme dans la police donc et plus largement le patriarcat rigide qui prévaut dans la société népalaise, mais aussi le racisme dont est victime la minorité indienne au Népal, du fait de sa religion et de sa carnation, mais encore la corruption rampante qui mine les administrations népalaises, civiles et militaires.

Ces sujets sont graves et importants. Ce film a l’avantage de nous les faire connaître. Mais leur évocation, trop insistante, se fait au détriment de l’intrigue policière qui multiplie les rebondissements peu crédibles au risque de perdre le spectateur.

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Materialists ★☆☆☆

Lucy (Dakota Johnson) est une « match-makeuse » professionnelle. Elle travaille pour l’une des plus prestigieuses agences de rencontres new-yorkaises qui, moyennant quelques dizaines de milliers de dollars, vous trouvera l’âme sœur.e vous correspondant le mieux.
Lucy est célibataire et matérialiste. Son cœur balance entre Harry (Pedro Pascal), un banquier terriblement séduisant, et John (Chris Evans), son ex, éternellement fauché.

J’ai beaucoup hésité à aller voir ce film hollywoodien sorti depuis le 4 juillet. Son affiche et son pitch me laissaient redouter une romcom sans originalité. Si je me suis laissé convaincre, c’est moins par le charme de ses trois têtes d’affiche que sur le nom de sa réalisatrice. Celine Song a en effet signé Past Lives en 2023. Elle y disséquait avec beaucoup de finesse les ressorts du couple. J’en attendais autant de Materalists.

J’ai été amèrement déçu. Certes Dakota Johnson, Pedro Pascal et Chris Evans y sont, chacun à leur façon, sexy en diable. Mais c’est bien là la seule qualité de ce film trop long et au scénario languissant. On se tromperait en croyant qu’il porte un regard froid et cruel sur l’industrie du dating, sur les espoirs qu’elle suscite, sur les déceptions qu’elle cause, sur la part qu’y prennent les apparences et le matérialisme. Au contraire, Materialists délivre la même morale mielleuse que celle qu’Hollywood nous ressasse depuis La Mélodie du bonheur : l’amour, le vrai, ne s’embarrasse pas des différences sociales. Can’t buy me love

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The Things You Kill ★★☆☆

Après un long séjour d’une quinzaine d’années aux Etats-Unis, Ali est revenu vivre en Turquie. Il enseigne à temps partiel la littérature comparée à l’Université. Il essaie désespérément d’avoir un enfant avec sa femme. Il passe le plus de temps possible avec sa vieille mère, que son père maltraite.

Alireza Khatami est un réalisateur iranien exilé au Canada. Son précédent film, Chroniques de Téhéran, utilisait un procédé sacrément audacieux pour décrire les multiples facettes de la vie quotidienne des Iraniens. Celui-ci est d’un tout autre genre. Comme le résume parfaitement Gaël Golhen dans Première, c’est Kiarostami revu par Lynch. Il raconte, sur le mode apparemment banal de la chronique familiale, une histoire qui vire au polar et au fantastique.

Car, tiraillé par ses problèmes personnels, la précarité de son emploi à l’Université, ses difficultés à avoir un enfant, Ali nourrit des doutes sur les circonstances du décès brutal de sa mère. Il en vient à en accuser son père, un tyran domestique qui terrorise toute la famille, bat sa femme mais possède aussi peut-être des qualités cachées.

Prix du jury et prix de la critique au dernier festival Reims Polar, The Things You Kill est particulièrement réussi si on accepte les questions que le film laisse ouvertes. Je m’en suis posé une. Puis deux. Puis trois. Et je suis sorti de la salle sans réponses. C’est une sensation un peu frustrante – même si les films hollywoodiens ont souvent le défaut inverse de refermer scrupuleusement toutes les portes qu’ils ont ouvertes. Le spectateur veut savoir. Le cinéaste a trois possibilités : lui donner la réponse, lui laisser la deviner (ce qui est à mes yeux la marque des meilleurs scénarios comme Mulholland Drive) ou encore, ce qui est je crois le cas ici, n’en donner aucune pour la bonne et simple raison qu’il n’y en a pas.

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Le Boucher (1970) ★★★☆

Dans une petite commune du Périgord, une romance se noue, malgré leur différence de classe, entre la directrice de l’école, l’élégante Hélène Davile (Stéphane Audran), et le boucher, Paul Thomas dit Popaul (Jean Yanne). Ils partagent des confidences : Hélène lui dit qu’elle tente d’oublier une rupture douloureuse, Popaul qu’il s’est engagé dans l’armée et a combattu en Indochine et en Algérie pour fuir un père violent.
La quiétude du village est troublée par un meurtre crapuleux. Un second cadavre, celui de la jeune femme au mariage de laquelle Hélène et Popaul avaient assisté est découvert par les propres élèves d’Hélène à l’occasion d’une sortie scolaire.
En trouvant sur les lieux du crime le briquet qu’elle avait offert à Popaul quelques jours plus tôt, Hélène comprend qu’il est l’auteur de ces crimes.

Compagnon de route de la Nouvelle Vague, Chabrol tournait des films depuis le début des 60ies. Il n’a pas arrêté d’en tourner jusqu’à sa mort en 2010. Son oeuvre (plus de soixante-dix films pour le cinéma et la télévision) dresse un portrait cruel et satirique de la bourgeoisie française sous la Vème République dont Chabrol aimait cyniquement railler les travers. Chabrol aimait faire craquer le vernis des apparences et des conventions, montrer, dévoiler les turpitudes qu’il peinait à cacher.

Avec La Cérémonie (1995), Le Boucher est peut-être son film le plus célèbre. Ce n’est pourtant pas le plus représentatif. Ce n’est pas un film grinçant. C’est au contraire un film très doux qui raconte les débuts d’une histoire d’amour en apparence banale.
Mais, avec cette bluette sentimentale, digne d’un roman-photo, Chabrol croise une intrigue policière au suspense vite dissipé.

Le résultat est paradoxal, à la limite de la crédibilité. Le geste final de Popaul est à la fois aberrant et inévitable. On n’oubliera pas de longtemps le plan final tourné au bord de la Dordogne à l’aube blanchissante.

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Sorry, Baby ★★★☆

Agnes (Eva Victor) accueille pendant quelques jours chez elle dans le Massachussetts sa meilleure amie Lydie qui est partie vivre à New York, s’y est mariée et lui annonce qu’elle attend un enfant. Agnes et Lydie ont passé leur doctorat en littérature anglaise ensemble dans la faculté où Agnes vient d’être titularisée. Quelques années plus tôt, la jeune femme y a vécu un traumatisme dont elle partage avec Lydie le secret et dont elle peine à se relever.

Produit par A24, la société américaine tellement tendance, Sorry, Baby a été projeté à Sundance en janvier, y a remporté le prix du meilleur scénario avant de clôturer la dernière Quinzaine des cinéastes à Cannes. Sorry Baby révèle une réalisatrice et une actrice née en 1994, venue du web où ses vidéos sont devenues virales. Elle m’a rappelé par sa taille, sa silhouette dégingandée et le thème de son film, Greta Gerwig et son personnage dans Frances A.

Sorry, Baby est organisé selon une construction intelligente en cinq chapitres. Le premier et le dernier, qui enserrent le récit, se déroulent au présent, à quelques mois d’intervalle à peine pour laisser le temps à Lydie d’accoucher. Les trois autres se succèdent dans le passé depuis cet événement fondateur qu’on a tôt fait de deviner. Cette structure  est parfaitement adaptée au sujet du film : la reconstruction post-traumatique.

Sorry, Baby vaut surtout par son actrice principale. Elle est atypique, perchée en haut de son 1m80, sans le moindre maquillage ni le moindre bijou. Son agression l’a traumatisée mais elle ne s’y réduit pas et ne verse jamais dans la misanthropie. Au contraire, elle saisit les mains qui lui sont tendues : celles de sa meilleure amie avec laquelle les liens noués à l’université ne se sont jamais distendus, celles d’un inconnu avec qui elle partage un sandwich sur un parking désaffecté, celles de son voisin dont la maladresse et la gentillesse la touchent.

Eve Victor ne se contente pas de raconter une histoire. Elle le fait selon une grammaire mûrement réfléchie. Grâce à son scénario destructuré, on l’a dit. Grâce aussi à l’attention qu’elle porte au cadrage. Son héroïne est toujours filmée dans l’embrasure d’une porte, à travers une fenêtre, comme si son corps immense était entravé dans un cadre qui la limite.

Sorry, Baby est un film doux et amer à la fois, touchant sans être mielleux. Une réussite.

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Les mots qu’elles eurent un jour ★★☆☆

En 1962, Yann Le Masson, un documentariste français, compagnon de route du FLN, a filmé une quinzaine d’Algériennes qui venaient d’être libérées de prison après une loi d’amnistie. Elles avaient été arrêtées et condamnées pour leur participation à la lutte pour l’indépendance. Ces images, longtemps égarées, ont été retrouvées, mais leur son a disparu à jamais. Raphaël Pillosio est parti sur les traces des survivantes pour reconstituer ce moment.

Les mots qu’elles eurent un jour est un documentaire sorti dans quelques rares salles parisiennes en juin dernier et vite déprogrammé faute de spectateurs. Il n’en valait pas moins le détour.

C’est un documentaire historique qui prend des airs d’enquête policière. Le genre exégétique est à la mode : qu’on pense au roman à succès d’Anne Berrest La Carte postale ou au film de Zeibou Breitman Le Garçon. Tout part de la découverte d’un document, d’une photo, d’une archive qui excite la curiosité de celui qui le découvre et qui n’a alors de cesse d’en reconstituer la généalogie.

Cinquante ans après les faits, Raphaël Pillosio se heurte à plusieurs obstacles prévisibles : bon nombre de survivantes sont mortes – si j’ose dire ; la mémoire des rares témoins oculaires est vacillante. À force de patience, il parvient néanmoins à identifier la plupart des personnages et à retrouver leurs traces.

Le bilan est amer. L’engagement de ces femmes pour l’indépendance n’a pas été payé de retour. L’égalité à laquelle elles aspiraient leur a été déniée. La plupart ont été sommées par le FLN de rentrer dans le rang et de retourner à l’invisibilité qu’elles n’auraient jamais dû quitter. Celles qui n’ont pas accepté ce sort ont dû prendre le chemin de l’exil.

Dès lors, la démarche de Raphaël Pillosio prend une autre dimension. Il s’agit de redonner la parole à ces femmes deux fois condamnées au silence : par la perte du son de ce documentaire et par la relégation dont elles ont été victimes.

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Dìdi ★★★☆

Nous sommes à Fremont, en Californie, près de San Francisco en 2008, à l’époque où naissaient Facebook et les réseaux sociaux.
Christopher a treize ans. Ses amis l’ont surnommé Wang-Wang ; sa mère qui l’élève seule avec sa grand-mère l’appelle plus affectueusement Dìdi. Sa sœur aînée, avec laquelle il ne cesse de se chamailler, s’apprête à faire son entrée à l’université. Son père, absent, travaille au loin à Taïwan.

Nous vient des Etats-Unis, auréolé du prix du public du festival de Sundance 2024, ce premier film, qu’on imagine volontiers en tout ou en partie autobiographique, signé par un jeune réalisateur taïwano-américain né en 1994 à Fremont.

Dìdi peut se lire à trois niveaux.

C’est d’abord un film sur la pré-adolescence, la sortie de l’enfance. On a beau en avoir vu des dizaines, depuis Les Quatre Cents Coups et La Boum, on se laisse toujours prendre à leur charme. Leurs héros y vivent avec une intensité folle leurs premières fois : premier élan amoureux, premiers interdits transgressés, premières tentatives souvent maladroites de passer pour plus grand qu’on n’est auprès de ses aînés (une phrase dont Lacan ferait son miel)… Qui a eu un jour quatorze ans et a fumé sa première cigarette en cachette de ses parents ou a embrassé un Stéphane ou une Stéphanie pendant un cours d’EPS ne pourra qu’être ému.e par la « nervosité » de Dìdi à côté de la si jolie Viviane.

C’est ensuite un film sur le choc des cultures. C’est d’ailleurs ce qui en fait a priori le sel et l’intérêt. Dìdi n’est pas seulement l’histoire mille fois racontée d’un pré-ado dans une banlieue américaine anomique mais celle d’un pré-ado sino-américain qui doit jongler entre deux cultures. Ce genre de films-là, qui raconte l’histoire d’une intégration pas toujours facile d’une minorité dans une terre d’immigration, n’est pas nouveau non plus, en France (Dans la cuisine des Nguyen, Tout simplement noir…) ou aux Etats-Unis (la série Fresh Off the Boat qui raconte la vie d’une famille taïwanaise en Floride). Il est aussi politiquement correct en diable.

Mais Dìdi comporte un troisième niveau de lecture. C’est l’histoire d’une relation mère-fils et frère-sœur profondément émouvante. Le jeune Christopher mène la vie dure à sa mère et à sa sœur. Mais on sent bien que l’animosité qu’il manifeste à leur égard est la manière maladroite pour lui de leur exprimer son amour. On me dira que cette relation a déjà, elle aussi, été filmée, qu’elle est aussi très bisounours. Ce n’est pas faux. Mais Dìdi le fait avec une justesse qui m’a infiniment ému.

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Stranger Eyes ★☆☆☆

Une petite fille est kidnappée, laissant ses parents fous d’inquiétude. Quelques mois plus tard, ils reçoivent des images volées par une caméra cachée, épiant les moindres gestes de leur vie privée. Leur auteur se révèle être un voisin qui vit seul avec sa mère aveugle.

Nous vient de Singapour un petit film étonnant dont on se demande – et dont je me demande encore – à quel genre il ressortit. S’agit-il d’un film policier, comme son pitch, son affiche et son titre l’annoncent ? Ou est-ce plus que cela ? Il s’inscrit prétentieusement dans la filiation du Fenêtre sur cour de Hitchcock. Pari osé et écrasant. Il ne se hisse pas bien sûr à son niveau. Mais il en a la même structure. Sa trame policière n’est que le prétexte à autre chose, comme dans le célèbre film du « maître du suspense ».

À autre chose ? Oui… mais à quoi ? Stranger Eyes ne cesse de nous déconcerter. Nous est très vite révélé l’auteur des mystérieux DVD déposés en cachette sous la porte du couple éploré, alors qu’on aurait pu légitimement penser que son indentification consisterait tout l’enjeu de l’enquête. Dès lors, le film prend un autre tour : il quitte le couple pour s’intéresser à ce mystérieux voyeur qui travaille dans un supermarché dont il a la charge de la sécurité. Puis, tout aussi soudainement, l’enfant disparu est retrouvé. Le film est-il terminé ? Non. C’est là que commence son dernier tiers, qui explique les motifs du comportement de ce mystérieux voisin.

J’en ai sans doute trop dit et on pourra légitimement me reprocher ce divulgâchage. Mais hélas, mis à part cette structure bizarre, qui ne respecte pas les canons du genre, Stranger Eyes n’a pas grand intérêt. En tous cas, la soi-disant mise en abyme de nos sociétés panoptiques où rien n’échappe aux caméras de surveillance est un sujet trop éculé pour justifier à lui seul l’intérêt.

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