« Le Roi soleil », c’est le nom d’un rade banal à Versailles à une encablure du château, tenu comme beaucoup de cafés franciliens par un gérant chinois assisté d’une serveuse (Lucie Zhang), où se retrouvent à l’ouverture quelques clients de passage : deux flics fatigués après une nuit de service difficile (Pio Marmaï et Sofiane Zermani), un urgentiste (Panayotis Pascot), un trader sous substances, une gouape fébrile et un vieux monsieur qui, comme chaque semaine vient vérifier les numéros gagnants du Loto. Quand il découvre, stupéfait, qu’il a gagné le gros lot, tout dérape….
Trois semaines seulement après Last Stop: Yuma County, sort un film français qui lui ressemble. Soit une demi-douzaine de personnages coincés dans un lieu clos qui essaient, quasiment en temps réel, de s’en sortir, si possible en sauvant leur peau et si possible encore en dérobant quelques millions de dollars/d’euros.
Sept personnages se retrouvent par la force des choses réunis dans un bar avec un cadavre sur les bras et cherchent ensemble l’histoire qu’ils raconteront à la police pour pouvoir se partager un magot de plusieurs centaines de millions d’euros. Le pitch est alléchant. Il est sacrément ambitieux. Il ressemble à un puzzle, à une équation à sept (et bientôt huit avec l’arrivée inopinée de la patronne) inconnus. J’ai dit dans ma critique de Last Stop le plaisir communicatif offert aux spectateurs à participer, en même temps que les acteurs, à l’écriture du scénario.
Il faut des scénaristes sacrément malins pour relever une telle gageure. Ceux de ce Roi soleil le sont plus souvent qu’à leur tour. D’autant qu’ils jouent avec les temporalités pour explorer les diverses alternatives possibles. Ils auraient dû le faire à mon avis encore plus, pour nous donner notamment notre revanche contre tous ces films qu’on a envie d’interrompre pour dire au réalisateur : « Stop ! si la femme de la victime reçoit cet appel téléphonique, c’est la première chose qu’elle ira raconter à la police ! ».
Puisqu’il faut bien choisir et avancer, le scénario fait donc des choix. C’est là peut-être que le bât blesse. Car le scénario [spoiler] prend une direction malvenue : celle du défouraillage tarantinesque façon Reservoir Dogs, celle aussi de Last Stop, qui voit l’élimination métronomique d’un personnage après l’autre, laissant comme seul suspense au spectateur l’identité du dernier survivant.