D’après une histoire vraie ☆☆☆☆

Delphine vient d’écrire un roman autobiographique dont le succès l’écrase. En panne d’inspiration, elle est tétanisée devant la page blanche alors que ses fans s’impatientent. C’est alors qu’elle rencontre Élisabeth qui s’immisce peu à peu dans sa vie au point d’en prendre la direction.

J’avais adoré le livre de Delphine de Vigan. J’attendais beaucoup du film de Roman Polanski. J’ai été cruellement déçu. Déception d’autant plus forte que mes attentes étaient fortes.

Pourtant l’auteur de Rosemarys’ baby et de Possession ne semblait a priori pas le moins bien placé pour adapter cette histoire. Hélas il se plante dans les grandes largeurs.

D’abord dans le choix de ses actrices. Qu’il s’entête à faire jouer Emmanuelle Seigner, sa compagne, sa muse, est une chose. Mais qu’il lui confie le rôle principal de Delphine est un contre-sens majeur. Elle aurait dû jouer Élisabeth et Eva Green Delphine. Et non l’inverse. Emmanuelle Seigner, qui distille un charme vénéneux, aurait été parfaite dans le rôle de la perverse Élisabeth. Elle fait en revanche une calamiteuse Delphine, censée être une innocente victime. Symétriquement, Eva Green prend le parti d’un jeu outré à la diction ampoulée pour jouer cette mystérieuse manipulatrice. Une catastrophe.

Ensuite dans l’adaptation du livre de Delphine de Vigan. Il reposait, jusqu’à son magistral point final, sur une ambiguïté : Élisabeth était-elle bien réelle ou le produit du cerveau malade de Delphine ? La pellicule cinématographique ne peut nourrir une telle ambiguïté – même si Sixième sens a montré qu’on peut construire un film sur une illusion. De la première à la dernière scène, Élisabeth est bien visible et Polanski n’essaie même pas de nous laisser douter qu’elle n’existe que dans le cerveau de Delphine.

Enfin et surtout le roman de Delphine de Vigan était une réflexion d’une étonnante maîtrise sur le métier d’écrivain doublée d’une confession d’une troublante sincérité. L’auteure avait en effet connu un immense succès pour son précédent roman Rien ne s’oppose à la nuit en 2011. Dans son « roman » suivant, publié quatre ans plus tard, elle confesse, à la première personne, ses difficultés à s’en relever. D’abord, le choc frontal du succès. Ensuite l’angoisse de la page blanche. Toute cette dimension autobiographique est perdue dans le film qui se focalise sur le couple Delphine-Élisabeth et réduit leur face-à-face aux clichés du film d’horreur dans une maison isolée à la campagne.

Bref de deux choses l’une. Si vous avez lu le livre de Delphine de Vigan ne faites pas la même erreur que moi et n’allez pas voir son adaptation qui vous décevra fatalement. Si vous ne l’avez pas lu, courrez l’acheter.

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La Planète des singes – Suprématie ★☆☆☆

Caesar, le chef des singes, décide de lancer une vendetta personnelle contre le colonel McCullough qui a tué sa femme et sa fille.

Mon résumé est bien court ? C’est que le scénario de ce troisième volet du reboot de l’indépassable chef d’œuvre de 1968 avec Charlton Heston est indigent.

Mais revenons un instant en arrière.
En 1963 le Français Pierre Boulle écrit un bref roman de 270 pages qui devient immédiatement un best-seller. Les droits sont achetés par Hollywood qui le porte à l’écran en 1968. Le film est un succès mondial. Sa scène finale – qui ne figurait pas dans le livre – est restée dans toutes les mémoires. Des suites, de plus en plus médiocres, sont tournées en 1970, 1971, 1972 et 1973. En 2001, Tim Burton en refait l’adaptation. Il est de bon ton d’en dire du mal. La Planète des singes serait un accident de parcours dans la filmographie éblouissante du grand réalisateur. Pourtant, il n’est pas si mauvais. Sa scène finale, sans égaler celle de 1968, n’est pas sotte.
En 2011, Hollywood décide de redémarrer (« rebooter ») la franchise. Trois films sont prévus qui raconteront comment les Singes sont devenus les maîtres de la Terre. Leur titre a manifestement plongé dans la confusion la plus absolue leurs traducteurs français. Rise of the Planet of the Apes a été traduit La Planète des Singes : Les Origines. Dawn of the Planet of the Apes devient L’Affrontement. Et le troisième opus, War of the Planet of the Apes est traduit Suprématie. J’avoue un certain désarroi. Voire un léger agacement.

Mais le plus grave n’est pas là. La Planète des singes repose sur un mécanisme simple et formidablement efficace : le renversement des hiérarchies biologiques ou raciales. L’homme détrôné de sa place centrale est remplacé par un animal de cirque. Or ce ressort a été totalement abandonné dans le dernier épisode. Caesar est devenu humain, trop humain. C’est un personnage en quête de vengeance. Une vengeance qu’il veut exercer contre un humain qui, lui, est réduit au rang d’une brute animale ivre de violence.

La Planète des Singes : Suprématie a coûté 150 millions de dollars. Pour ce prix là, on en a sans doute pour son argent en guise d’effets spéciaux de chimpanzés filmés en motion capture, de combats et de batailles. Mais ce déploiement extravagant de moyens n’a aucun sens s’il est au service d’un scénario étique qui a perdu de vue les fondamentaux de la série.

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La Quête d’Alain Ducasse ☆☆☆☆

Alain Ducasse est à la tête d’un empire. Il dirige vingt-trois restaurants dans le monde : à Paris, à Monte-Carlo, à Tokyo, à Londres, à Hong Kong… Il accumule dix-huit étoiles Michelin au total. Un record. Gilles de Maistre l’a suivi pendant deux ans autour du monde : des États-Unis au Japon, de la Mongolie aux Philippines. Le fil rouge de son documentaire : l’ouverture au cœur même du château de Versailles du dernier restaurant d’Alain Ducasse

La Quête d’Alain Ducasse est un titre subtilement polysémique. Il s’agit d’une part de partir à la recherche d’Alain Ducasse. Il s’agit d’autre part de comprendre ce que lui recherche. La réponse à la seconde question est simple : il recherche l’excellence. Excellence des produits qu’on le voit soigneusement sélectionner. Excellence des hommes – les femmes sont peu nombreuses dans son entourage – dont il dit qu’il les encourage à s’autonomiser alors qu’on le voit surtout veiller au grain à chaque détail et distiller autour de lui une crainte révérencieuse. Excellence des procédés : le glocal, alpha et oméga du management gastronomique.

Le problème est que l’homme Alain Ducasse nous reste opaque. On ne nous dit rien de son parcours sinon qu’il a conquis ses premières étoiles au Louis XV de Monte-Carlo et qu’il a échappé de justesse à la mort dans un accident d’avion dont il fut le seul rescapé en 1984. On ne nous dit rien de sa famille – il a épousé en 2007 une architecte de dix-sept ans plus jeune que lui  et il en a eu quatre enfants – de ses amis, de ses relations ou de la nationalité monégasque qu’il a acquise pour des motifs qu’on soupçonne volontiers. On n’apprendra guère plus sur l’organisation administrative et financière des établissements Ducasse : comment réussit-il à maintenir le même niveau d’excellence dans autant d’établissements ? Comment peut-il être partout sans courir le risque de n’être nul part ?

Le problème de ce documentaire est qu’il est tout entier à la gloire d’Alain Ducasse. Eût-il été financé par son service de communication qu’il n’aurait pas été moins louangeur. Les premières minutes, aux fausses allures de clip, rythmées par une musique entraînante, commentées par une voix off racoleuse, donnent le ton. Un ton qui hélas, reste toujours le même, confit en admiration, durant tout ce publireportage.

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Un beau soleil intérieur ☆☆☆☆

Isabelle (Juliette Binoche), la cinquantaine, peint et se cherche. Elle a un amant régulier (Xavier Beauvois) qui ne la satisfait pas, des vues sur un bel acteur de théâtre (Nicolas Duvauchelle) qui tarde à se déclarer, un ex-mari (Laurent Grévill) qui revient de temps en temps dans son lit et dont elle suspecte qu’il ait eu une liaison avec la galeriste qui l’expose (Josiane Balasko), une liaison avec un bel inconnu rencontré sur une piste de danse (Paul Blain). Comme le lui dira un radiesthésiste (Gérard Depardieu), fin psychologue, mais médiocre médium, Isabelle cache « un beau soleil intérieur ».

Les cinquantenaires ont la côte. Le cinéma français aime décrire leurs tourments. Après Isabelle Huppert (L’Avenir), Agnès Jaoui (Aurore), Ariane Ascaride (Le Fil d’Ariane) et Valérie Lemercier (Marie-Francine), c’est au tour de Juliette Binoche, née en 1964, d’endosser le perfecto et de chausser les cuissardes de la célibattante trop jeune pour baisser le pavillon, mais trop vieille pour virevolter d’un amant à l’autre.

Cinéaste chevronnée, la réalisatrice de Beau travail, Vendredi Soir et White Material rate son passage à la comédie.

La faute à un scénario sans queue ni tête, vaguement inspiré des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes. Juliette Binoche passe, à son corps/cœur défendant, d’un amant à l’autre sans solution de continuité. Le film est une succession de rencontres. Il aurait pu y en avoir trois de plus. Ou deux de moins. Très vite l’ennui s’installe.

La faute à un chef opérateur qui alterne, avec une rare maladresse les plans américains et les (très) gros plans lorsque la réalisatrice veut souligner l’intimité des âmes, au risque de zoomer sur les comédons des acteurs.

La faute enfin et surtout à des personnages inconsistants, indécis et veules. On me dira qu’ainsi est la vie. Je répondrai que le cinéma pourrait nourrir de plus hautes ambitions que de filmer platement la vie. On retrouve la marque de Christine Angot – qui a co-écrit le scénario avec Claire Denis – dont je n’ai jamais aimé les romans violents et égocentriques à l’exception notable du tout dernier. Les contradictions de Juliette, loin de la rendre touchante, sont vite horripilantes. Un exemple : à l’occasion d’un festival artistique dans le Limousin, elle se révolte soudainement contre les lieux communs que ses amis artistes échangent, finit la nuit avec un local rencontré en boîte… mais rompt avec lui après que l’un de ses amis lui reproche de ne pas être du même milieu qu’elle.

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Blade Runner 2049 ★☆☆☆

Comme Deckhart (Harrisson Ford) trente ans plus tôt, K (Ryan Gosling) est un « blade runner ». Sa tâche : retrouver les « replicants », des robots humanoïdes , et éliminer ceux qui sont entrés en rébellion contre les humains. À l’occasion d’une de ses missions, K fait une découverte bouleversante qui remet en cause la ligne de démarcation entre l’humain et la machine.

Depuis que la rumeur avait grossi qu’une suite à Blade Runner était en préparation, j’attendais avec impatience cette échéance. Je me suis rué dans les salles le jour même de sa sortie – en compagnie de quelques milliers d’aficionados aussi masculins, solitaires et quadragénaires que moi, me réjouissant par avance de ce que j’escomptais être le second meilleur film de l’année 2017 après La La Land bien entendu.

Je suis tombé de haut. De l’armoire. Que dis-je ? du gratte-ciel !

Certes, il y avait de quoi être intimidé par l’un des plus films les plus iconique de l’histoire du cinéma. Au point de se demander quel sens il y avait à lui donner une suite. Je ne sache pas qu’on ait jamais tourné 2002 Odyssée de l’espace ou Rencontres du quatrième type. Alors à quoi bon réaliser Blade Runner 2 – sinon pour décevoir les irréductibles fans de mon espèce ? Car de deux choses l’une : soit la suite est infidèle à l’original et nous crierons à la trahison, soit elle la recopie et on l’accusera de bégayer.

C’est dans ce second travers que tombe Blade Runner 2049. À force de se frotter à son modèle indépassable, Blade Runner 2049 s’écroule sur lui-même. Comme un trou noir qui implose.
Prenons par exemple les décors. On se souvient tous de la Los Angeles polluée, pluvieuse, polyglotte qui servait de cadre au film de 1982. Denis Villeneuve le recopie à l’identique. Pire : il l’enlaidit – là où on aurait pu escompter que les progrès des techniques en trente ans auraient permis  des effets autrement saisissants.

Les personnages ? Ryan Gosling fait du Harrison Ford Canada Dry. Je ne dirai jamais de mal du héros de La La Land. Mais s’il continue à afficher un masque mutique totalement dénué d’expression (parce qu’il joue le rôle d’un robot ?), je risque de réviser mon jugement. Et ce n’est pas l’apparition du grand Harrison – qui, dans un Marcel informe affiche désormais un bidon de septuagénaire – qui donnera à Blade Runner 2049 un peu de piment. Heureusement qu’il y a les femmes : Robin Wright (qui ressemble énormément à Claire Underwood), Ana de Armas, belle comme un cœur, et Sylvia Hoeks qui suscitera les mêmes fantasmes fétichistes que ceux qu’avaient déjà provoqués les héroïnes androïdes et latexées de Terminator 3 ou Catwoman.

Quant à l’intrigue, qu’en dire sinon qu’elle se traîne interminablement durant près de trois heures (oui TROIS heures !!!!!). Heureusement, le générique dure dix bonnes minutes, réduisant d’autant cet exténuant pensum. L’absence de rythme est effarante, à une époque où la production cinématographique et télévisuelle a atteint une telle sophistication, une telle énergie. Comme si Denis Villeneuve s’était fait un devoir de ralentir le tempo pour plonger les spectateurs dans une apathie maussade dont ils sont périodiquement réveillés par une musique aussi assourdissante qu’irritante. Et la philosophie qui l’inspire – « les robots, eux aussi, ont un cœur » – nous surprend autant qu’une laitue défraichie en solde chez Carrefour Market.

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Mother! ★☆☆☆

Jennifer Lawrence habite une belle maison à la campagne qu’elle a amoureusement rénovée. Son compagnon, interprété par Javier Bardem, est un écrivain célèbre en panne d’inspiration.

Mother! commence par deux images dont on comprendra à la fin du film qu’elles en sont la clé d’explication. Mais Mother! n’est pas – hélas – construit autour d’un suspense qui se dénouerait par un twist final.

Plus classiquement, Mother! est l’histoire d’une femme qui sombre dans la folie. Encore y a-t-il un doute sur cette présentation. Car, comme souvent dans les films qui ont le désordre mental comme thème, on se demande un instant si c’est Jennifer Lawrence qui devient folle ou si c’est son univers qui s’écroule.

Pendant la première moitié du film, l’ambiguïté demeure. C’est l’occasion pour les vétérans Ed Harris et Michelle Pfeiffer de deux apparitions impérissables. Mais la seconde moitié se perd dans une accumulation d’effets de plus en plus risibles. Jusqu’à un dénouement grand guignolesque qui plonge l’auditoire dans un silence gêné, hésitant entre le spasme d’horreur et l’éclat de rire.

C’est un gâchis terrible. Car le film du génial Darren Aronofsky (l’auteur de Pi et de Requiem for a Dream) présentait deux atouts de poids. Jennifer Lawrence, qui reste parfaite de bout en bout, d’une remarquable dignité dans le naufrage du film. Et une caméra et un son (il faut absolument voir Mother! en Dolby stereo) virtuoses qui la suivent dans chaque pièce de cette maison labyrinthique qui se transforme au gré de ses humeurs.

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Voyage of Time ☆☆☆☆

« Le passé, le présent, le futur ». Rien de moins…

Terrence Malick voit grand. Trop peut-être. Voyage of Time que les producteurs français ont sous-titré, pour des motifs qui m’échappent, Au fil de la vie a l’ambition insensée de raconter l’histoire du monde depuis sa création. Docu écolo pour Disney Channel ? Pas vraiment. Terrence Malick ne s’abaisse pas à faire œuvre de pédagogue. On n’apprendra rien avec Voyage of Time : rien sur l’histoire de la Terre, son passé, son présent et encore moins son futur.

Car, hélas, Terrence Malick vise plus haut. Il veut réaliser un hymne beethovénien à la vie, une œuvre à la saisissante beauté et au puissant message panthéiste. Des images à la beauté confondante, une musique symphonique envahissante, la voix éthérée de Cate Blanchett (ou celle de Brad Pitt dans la version IMAX) qui ânonne des commentaires aussi creux que vains (« After all those years, what does that mean to be us? »).

Comme une mouche devant une lampe à lave, on peut lentement se laisser hypnotiser. On peut aussi s’endormir. Alternativement, on peut se foutre en rogne. Ou encore aller voir un autre film.

D’ailleurs les distributeurs ont opté sur une stratégie de diffusion insolite. Le film a été diffusé en « séance unique » le jeudi 4 mai à 20 heures. Il ne faut jamais dire jamais : la séance soi-disant unique a été dupliquée le jeudi 29 juin (voir l’affiche ci-contre). Pourquoi un tel choix ? Mystère…

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Mad Max: Fury Road ★☆☆☆

Après Mad Max (1979), Mad Max II – le défi (1981) et Mad Max – Au delà du dôme du tonnerre (1985), il a fallu attendre trente ans la sortie de Mad Max: Fury Road.
Dit autrement : les trois quarts de l’audience juvénile de la salle où j’étais allé le voir en 2015 n’étaient pas nés à la sortie des premiers épisodes !
Si les vrombissements post-apocalyptiques des bolides customisés et le perfecto de Mel Gibson ont bercé mon enfance, sur quel ressort cet opus tardif joue-t-il chez un public nourri entretemps de mille autres références ?

Deux longues heures ne m’auront pas donné la réponse à cette question.
George Miller nous livre un spectacle visuel gratuit.
Gratuit ? pas tant que ça. Le moindre plan est si sophistiqué qu’il a probablement coûté à lui seul le PIB du Swaziland.

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Les Fantômes d’Ismaël ★☆☆☆

Ismaël Vuillard (Mathieu Amalric) est un réalisateur installé. Il écrit un film dont le rôle principal, celui d’un jeune diplomate, se nomme Ivan Dédalus (Louis Garrel). Il fut marié à Carlotta Bloom (Marion Cotillard) qui disparut de sa vie. Il parvient difficilement à l’oublier en nouant une liaison avec Sylvia (Charlotte Birkin). Jusqu’au jour où Carlotta réapparaît…

Arnaud Despelchin est de retour. Avec Mathieu Amalric, son acteur fétiche (ils ont tourné huit films ensemble), son double de cinéma (Ismaël est un réalisateur égocentrique dévoré par le doute). Son film a fait l’ouverture du festival de Cannes. C’est dire l’importance de Desplechin dans le cinéma français contemporain.

Pourtant je n’aime pas son cinéma. J’ai vu tous ses films, attiré par la richesse de ses thèmes et une critique élogieuse. Depuis La Vie des morts en 1991 – dont le scénario sera repris à l’identique dix-sept ans plus tard dans Un conte de Noël – et La Sentinelle – qui racontait déjà les premiers plats d’un diplomate. J’en admire la cohérence. Mais j’en déplore le narcissisme.

Car de film en film, Desplechin ressasse les mêmes obsessions : l’enfance roubaisienne, la femme, mise sur un piédestal et méprisée pour son inconstance dans le même mouvement, la famille qui protège et qui étouffe, une lecture paranoïaque du métier de diplomate, les allusions à une obsédante judéité, les références révérencieuses à Joyce … Chacun de ses thèmes a tour à tour été développé dans chacun de ses films. Les Fantômes d’Ismaël est un film somme qui les convoque tous. En fait un film gloubiboulga qui les mélange tous au point d’y perdre le spectateur.

Le cinéma n’est pas une opération cathartique qui permet à un réalisateur de faire l’économie d’une cure psychanalytique.

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