Souleiman travaille à Dakar à la construction d’une immense tour. La colère gronde parmi les ouvriers qui n’ont pas été payés depuis trois mois. Souleiman est amoureux de Ada, une jeune fille de son quartier que ses parents ont promise à Omar. Ada est elle aussi amoureuse de Souleiman et ne veut pas épouser le parti choisi par ses parents contre son gré.
Mais le destin de Souleiman et d’Ada sera tragique. Avec d’autres ouvriers, Souleiman prend la mer pour gagner l’Europe en quête d’une vie meilleure. Sa pirogue sombre.
Atlantique a fait sensation à Cannes en mai dernier. Sa réalisatrice est la première africaine en compétition. Franco-sénégalaise de trente-sept ans, elle est la fille du musicien Wasis Diop et la nièce du réalisateur Djibril Diop Mambéty. Atlantique est son premier long-métrage. Il est reparti de Cannes avec le Grand prix, lot de consolation des films qui ont raté d’un rien la Palme (BlacKkKlansman en 2018, 120 bpm en 2017, Juste la fin du monde en 2016…).
Un film politique sur l’émigration africaine et sur la place des femmes dans la société sénégalaise. Un film poétique sur Dakar – où j’ai vécu trois merveilleuses années. Atlantique avait tout pour me plaire – même si l’absence de toute publicité (pas une seule bande-annonce dans les cinémas, pas une seule affiche au cul des bus ou dans le métro) le condamnait à l’invisibilité.
Hélas j’ai été très déçu. D’abord parce qu’on ne voit presque rien – sinon deux couchers de soleils magnifiques depuis la piscine du Radisson et la terrasse du Sokhamon (ces seuls noms suffiront à se faire se pâmer de nostalgie les « anciens ») – de cette ville si photogénique. C’est la mer que Mati Diop filme, et ses reflets irisés. La terre ne l’intéresse pas.
Mais ce n’est pas le principal.
Alors que le sujet aurait pu se prêter à un traitement documentaire et naturaliste, Mati Diop opte pour la poésie et le fantastique. Elle imagine que les noyés viennent hanter les vivants. Souleiman se réincarne en la personne d’Issa, un jeune lieutenant de police chargé d’enquêter sur le mystérieux incendie qui s’est déclenché durant le mariage d’Ada et d’Omar. Les autres noyés, eux, prennent l’apparence de zombies qui viennent exiger de l’entrepreneur véreux qui avait détourné leurs salaires impayés le versement de leur dû.
Mal jouées, mal filmées, mal montées, ces séquences nocturnes sont le point faible du film. Si la scène finale, aussi attendue soit-elle, fait renaître l’émotion, elle arrive trop tard pour sauver l’ensemble.