Camille ★★★☆

Camille Lepage était une  photoreporter passionnée et exigeante. À vingt-six ans seulement, en mai 2014, elle est morte en République centrafricaine au cours d’un reportage.
Le biopic que lui consacre Boris Lojkine raconte les six derniers mois de sa vie.

Boris Lojkine avait réalisé un très beau premier film : Hope sur la migration semée d’embûches d’une Africaine vers l’Europe. Il a mis près de cinq ans à sortir son second film qui tangente encore avec le documentaire.

Camille est en effet un mausolée à une jeune femme trop tôt décédée. Comment ne pas être séduit par cette journaliste, l’œil collé à son appareil, les Ray Ban en casquette, le sac en bandoulière, qui essaie de capter « l’instant décisif » ? Quelques séquences en France pendant les fêtes de Noël permettent de comprendre le milieu d’où elle vient : une famille provinciale et aimante (on reconnaît Mireille Perrier, qu’on aime depuis Un monde sans pitié, dans le rôle de sa mère) qui n’a jamais contrecarré ses rêves d’ailleurs.

Camille est aussi un film sur la Centrafrique et sur la sanglante guerre civile qu’elle a traversée entre 2013 et 2015. Elle opposait des milices chrétiennes et musulmanes. Mais seule une lecture simpliste y verrait un conflit de civilisations similaire à ceux prophétisés par Samuel Huntington. Camille Lepage, qui avait rencontré des étudiants à l’université de Bangui et les avait suivis après leur enrôlement aux milices anti-balaka, en fut une victime collatérale.

Mais Camille est aussi un film sur la rencontre entre cette femme-là et ce pays-ci. Une rencontre impossible tant le fossé est immense entre une jeune fille blanche et les habitants d’un pays parmi les plus pauvres de la planète. On craint un temps que, avec un angélisme surfait, ce fossé soit nié, que Camille raconte – comme Out of Africa ou La Massaï blanche – une histoire d’amour et une épiphanie comme les Occidentaux en rêvent quand ils vont en vacances au Club Med du Cap Skirring.
Mais Camille ne sombre pas dans ce travers. Il interroge la distance : distance entre le photographe et son sujet, distance entre le Blanc nanti et le Noir pauvre, distance entre le journaliste de passage et la victime de guerre à laquelle nul avion, nul visa ne permettra de quitter son pays.

La bande-annonce

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