Après trente-cinq années de bons et loyaux services dans la police milanaise, l’inspecteur Franco Amore (Pierfrancesco Favino) s’apprête à raccrocher les gants. Mais un dernier service qu’il rend à son cousin Cosino pour la mafia chinoise avec son collègue Dino risque de lui être fatal.
Le pitch ultra-balisé de ce polar aurait pu me faire fuir. Mais les critiques enthousiastes de plusieurs amis m’ont convaincu d’aller voir L’Ultima Notte Di Amore dont le titre original, qui joue sur le patronyme de son héros, a plus de saveur que sa pâle traduction française.
Dès le premier plan, long travelling aérien au-dessus de la nuit milanaise, j’ai été happé par un récit dont la tension ne s’est pas relâchée jusqu’au dernier plan, deux heures plus tard. Dernière Nuit à Milan coche toutes les cases du polar qui assume sans vergogne son classicisme. Il ne va pas chercher à tout prix, comme parfois les jeunes cinéastes ont la tentation de le faire pour se démarquer de leurs aînés, à moderniser un genre hyper-référencé. Au contraire, il en revisite avec talent tous les éléments. Sa musique, ses lumières, ses personnages m’ont rappelé Le Samouraï de Melville.
L’interprétation de Pierfrancesco Favino mérite tous les éloges. À défaut d’avoir mémorisé son nom, on se souvient de sa gueule cabossée pour l’avoir vu en mafieux repenti dans Le Traître ou plus récemment, en Napolitain de retour au pays, dans Nostalgia (dont je suis probablement le seul à n’avoir pas dit le plus grand bien). Il a ce mélange de virilité latino et de faiblesse fatiguée qui le rend irrésistible (il m’a fait penser à Fabio Montale, le héros des polars marseillais du regretté Jean-Claude Izzo).
Dernière Nuit à Milan contient une scène d’anthologie qui se déroule dans un tunnel autoroutier. Le suspense qu’elle maintient, ses angles de vue, le rythme de son montage, tout y est exceptionnel, de fluidité et d’intelligence. Si on savait déjà que Pierfrancesco Favino est un grand acteur, on découvre après une telle scène que Andrea Di Stefano, un acteur passé sur le tard derrière la caméra, est peut-être un grand réalisateur.