Les Braises ★★☆☆

Karine et Jimmy forment un couple uni et aimant. Karine (Virgine Efira) travaille dans une pâtisserie industrielle. Jimmy (Arieh Worthalter) dirige une petite entreprise familiale de transport routier. En couple depuis une vingtaine d’années, ils ont eu un garçon et une fille désormais lycéens l’un et l’autre. Quand éclate fin 2018 le mouvement des Gilets jaunes, Karine en devient l’une des militantes les plus enflammées alors que Jimmy n’y croit pas.

Quelques réalisateurs français, rompant avec la vieille habitude très gauloise d’en parler le moins possible, se frottent à la chose publique et à la politique : Pierre Schoeller (L’Exercice de l’Etat, Rembrandt), Stéphane Demoustier (L’Inconnu de la Grande Arche), Sylvain Desclous (La Campagne de France, De grandes espérances), Nicolas Pariser (Alice et le maire, Le Grand Jeu)… Thomas Kruithof est de ceux-là qui, avec Les Promesses, avait consacré son précédent film à une édile locale du 9.3 qui peinait à organiser sa succession.

Il s’attaque à un des mouvements les plus importants et les plus passionnants qu’ait connu la France ces dernières années : les Gilets jaunes. Chacun d’entre nous y a été confronté et s’en est fait son opinion. Pour certains, c’est le cri de colère légitime d’une France périphérique qui étouffe ; pour d’autres, c’est un chaos sans mot d’ordre, une explosion de violence sans raison.

Thomas Kruithof n’écrit pas un essai politique sur les Gilets jaunes qui en éclairerait la généalogie, en proposerait une typologie (mouvement d’extrême droite ? d’extrême gauche ?) et en raconterait l’histoire. C’est un cinéaste. Il choisit de rabattre le mouvement des Gilets jaunes sur un couple. Les braises du titre, ces feux dormants qu’une étincelle peut relancer, sont une métaphore qui peut être interprétée dans deux sens : métaphore politique, celle d’une France qui pourrait s’enflammer et métaphore sentimentale, celle d’un couple vieilli qui brûle encore des feux de l’amour.

J’ai un peu regretté ce parti pris. J’aurais aimé voir un film qui ait le courage de s’attaquer à son vrai sujet : les Gilets jaunes. L’idée de le traiter par le crible du déchirement d’un couple me semblait mièvre et réductrice.

Mais je dois lucidement reconnaître que le résultat est bon. Il l’est d’abord grâce aux deux acteurs. On peut regretter de voir Virginie Efira et Ariel Worthalter partout et tout le temps. mais il faut reconnaître qu’ils sont l’un comme l’autre absolument excellents et qu’on ne saurait leur reprocher la moindre erreur de carre.
Mais il l’est surtout parce qu’à travers ce couple, c’est tous les Gilets jaunes qui sont évoqués, la peur du déclassement (analysée doctement dans les ouvrages d’Eric Maurin et de Louis Chauvel), la France périphérique, le sens de l’engagement, l’invention d’autres formes d’actions citoyennes…

La bande-annonce

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *