Tout de suite maintenant annonce dès son titre un film sur l’arrivisme. Nora Sator (quel nom merveilleux !) nous est présentée comme une Rastignac en tailleur-pantalon recrutée par un prestigieux cabinet, spécialisé dans les fusions-acquisitions, dont elle grimpera tous les échelons en écrasant les obstacles qui se dresseront sur sa route. Pourtant le dernier film de Pascal Bonitzer ne nous mène pas là où on l’attendait. Est-ce à mettre à son actif ? Hélas non, pour trois raisons.
Tout de suite maintenant manque de cohérence. Il essaie de raconter deux histoires en une. La première, on l’a dit, est celle de l’ascension d’une jeune femme dans le monde, ô combien hostile, de la haute finance. Elle aurait pu à elle seule constituer la matière d’un film. Mais Pascal Bonitzer et sa co-scénariste Agnès de Sacy ont cru bon de lui en adjoindre une autre : celle de la vieille hostilité qui oppose le père de Nora (Jean-Pierre Bacri comme d’habitude génial) au patron de celle-ci (Lambert Wilson).
Deuxième défaut : l’héroïne. C’est Agathe Bonitzer qui tient le rôle de Nora. Certes, l’actrice, qu’on a déjà vue chez Sébastien Betbeder ou Frédéric Videau, n’en est pas à son coup d’essai. Toutefois, on ne peut s’empêcher de se demander si elle doit ce premier rôle à son talent ou à son patronyme. D’autant que sa moue boudeuse et son phlegme d’endive ne collent pas au rôle.
Dernier défaut, le plus grave : l’incapacité à filmer le monde de l’entreprise. Qu’il s’agisse de la haute administration ou de la haute finance, le cinéma français est comme paralysé par une déférence pataude. Lui qui sait si bien décrire le monde ouvrier (Élise ou la vraie vie) ou le petit commerce (L’horloger de Saint-Paul) filme des pantins sans crédibilité qui évoluent dans des bureaux immaculés, qui passent leur temps à manger et à boire, qu’on ne voit jamais réfléchir, chercher, écrire, bref « travailler ».