L’affaire Kerviel présentait tous les ingrédients pour faire un film. Christophe Barratier l’a réalisé ; mais on n’y trouvera pas grand-chose en commun avec Les Choristes qui lui avait valu un immense – et mérité – succès. Il s’inspire largement du livre écrit en 2010 par Jérôme Kerviel. Du coup, c’est un procès à charge que le film instruit contre la Société générale. Il est surprenant qu’elle n’ait pas essayé et, en tout état de cause, pas réussi à en interdire la diffusion tant la charge est rude contre ses pratiques et son encadrement.
L’Outsider raconte l’ascension fulgurante et la chute vertigineuse d’un homme. L’histoire est connue. Jérôme Kerviel était trader à la Société générale. Il lui a fait gagner des millions… et perdre des milliards. L’a-t-il fait en violant la réglementation prudentielle ? Oui. Avec l’aval de sa hiérarchie, aveugle tant que ces tricheries rapportaient, impitoyable dès lors qu’elles cessaient de le faire ? C’est la ligne de défense de Jérôme Kerviel que le film reprend (aveuglément ?) à son compte.
N’est pas Martin Scorsese qui veut. L’Outsider souffre de la comparaison avec Le Loup de Wall Street. Il n’en a pas l’ambition, le souffle, la folie. Et Arthur Dupont, aussi excellent soit-il, n’est pas Leonardo DiCaprio. L’Outsider n’est pas non plus The Big Short ou Margin Call, deux excellents films américains qui présentaient l’avantage de nous faire comprendre les arcanes de la finance. L’Outsider ne parie pas sur l’intelligence du spectateur et ne s’aventure pas à lui expliquer les mécanismes d’une salle de marché. Dommage.
L’Outsider n’en demeure pas moins un film efficace, bien joué, bien réalisé. Le parti pris, annoncé par le titre, est de décrire Jérôme Kerviel comme un outsider. Il n’est pas parisien, pas diplômé des grandes écoles, pas issu d’un milieu privilégié. Sa réussite a des airs de revanche sociale, avant que sa chute ne soit filmée comme la remise au pas d’un trublion qui a osé jouer dans la cour des grands.