Tunnel ★★★☆

Le scénario de Tunnel se résume en deux phrases. Un homme est coincé dans sa voiture dans un tunnel écroulé. Les secours réussiront-ils à le sauver ?

Le survival movie est devenu un genre à part entière. Son principe en est simple. Naufragé sur une île déserte (Tom Hanks dans Seul au monde), piégé dans un bateau qui coule lentement (Robert Redford dans All is Lost), enterré six pieds sous terre (Ryan Reynolds dans Buried), le bras écrasé sous un rocher (James Franco dans 127 heures), le héros survivra-t-il ? Mais c’est un véritable casse-tête pour un scénariste. Que filmer sinon un homme seul ? Comment raconter sans lasser le lent écoulement du temps ? Comment donner du rythme au récit sans le ponctuer de rebondissements trop artificiels ?

Il faut parfois s’appuyer sur quelques béquilles. Ainsi de l’usage du téléphone portable dans Tunnel – comme dans Buried – particulièrement surprenant dans un film dont l’affiche annonce : « Ça va couper ». Ainsi de certaines rencontres inattendues qui brisent la solitude du survivant (j’ai toujours considéré un peu « facile » l’arrivée de Vendredi sur l’île de Robinson qui, si elle enrichit le roman de Daniel Defoe et plus encore celui de Michel Tournier d’une dimension fascinante (l’altérité), le distrait de son sujet original (la survie)). Ainsi des flashbacks qui éclairent le comportement du rescapé.

Le cinéma coréen relève la gageure de cacher, sous les traits anodins du film de genre, une critique politique aiguisée. C’était le cas des films de Bong Joon-Ho : Snowpiercer, The Host, Memories of Murder. C’était le cas aussi du précédent film de Kim Seong-Hun Hard Day. Ici, Tunnel est l’occasion de décocher quelques piques bien senties à la corruption d’un système dont la Présidente de la République vient d’être renversée pour concussion.

Mais là n’est pas l’essentiel. Le scénario ne s’éloigne jamais bien longtemps de la voiture où notre héros est reclus. Pendant son interminable rétention, se poseront à lui et à ceux qui le secourent des questions déchirantes : va-t-il partager le peu d’eau qui lui reste pour adoucir les derniers instants d’une autre victime dont on sait la mort certaine ? vont-ils poursuivre des opérations coûteuses de sauvetage alors qu’il n’y a plus d’espérance raisonnable que le disparu soit encore vivant ? va-t-il voter pour Emmanuel Macron ou s’abstenir [Ciel ! je m’égare !] ?

Comment Tunnel se termine-t-il ? Généralement les survival movies sacrifient au happy end. All is Lost de J.C. Chandor constitue une exception exotique. Je ne dirai bien entendu rien du bout de ce Tunnel. Les deux options étaient également concevables – je n’en conçois guère de troisième – et celle qui est choisie n’est pas la moins efficace.

La bande-annonce

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