Mildred Hayes est en colère. Sa fille a été violée, tuée et brûlée à quelques mètres de chez elle et ses meurtriers courent toujours. Pour sensibiliser l’opinion publique, elle décide de louer les trois panneaux publicitaires qui se dressent sur les lieux du crime et d’y afficher un message bien senti, exhortant la police locale et son chef à l’action.
3 Billboards a fait carton plein aux Golden Globes. Frances McDormand a emporté le prix de la meilleure interprétation féminine. Le film de Martin McDonagh compte parmi les favoris aux prochains Oscars. On voit mal comment la statuette pourrait échapper à l’héroïne de Fargo (co-réalisé par son époux Joel Coen) et de la mini-série Olive Ketteridge – même si Meryl Streep a ses chances, au moins autant pour son rôle dans Pentagon papers que pour ses prises de parole de l’année écoulée contre Trump et Weinstein.
Sans doute 3 Billboards est-il un excellent film qui mérite amplement ses trois étoiles. Frances McDormand – on l’a dit et redit – y livre une interprétation magistrale. Le rôle de sa vie. Celui d’une femme révoltée. Révoltée contre son mari qui la battait et qui l’a quittée pour une cruche de dix-neuf ans. Révoltée surtout par la mort terrible de sa fille qu’elle n’a pas su protéger et dont elle ne sait aujourd’hui comment défendre la mémoire sinon dans la quête vengeresse de ses assassins.
Mais 3 Billboards ne se limite pas seulement à un one-woman show. C’est l’histoire d’une petite ville perdue dans le MidWest – comme aiment à les peindre les frères Coen – avec ses flics caricaturaux et ses citoyens attachants (un nain au grand cœur, le directeur moins pleutre qu’on en l’aurait cru de l’agence de publicité). Le scénario semble s’engager sur une voix toute tracée : l’acharnement de Mildred Hayes va convaincre le chef Willoughby (étonnant Woody Harrelson) de rouvrir le dossier du meurtre de sa fille et permettra d’en identifier les auteurs. Mais le scénario nous prend à contre-pied au milieu du film, qui emprunte alors un cours inattendu jusqu’à un dénouement qui n’en est pas un et qui laisse les options ouvertes – même si, à y bien réfléchir, elles ne le sont pas tant que cela.
Un excellent film. Mais pas un chef d’œuvre inoubliable. Les jurés de L.A. n’ont pas toujours eu la main heureuse. Ils ont parfois désigné des films qui, sans démériter, ne méritaient pas de rentrer dans l’histoire du cinéma : ainsi de Argo en 2013, Chicago en 2003, Un homme d’exception en 2002 et bien sûr Moonlight l’an passé qui a spolié La La Land d’une récompense qui lui était acquise (ouille ! je sens que cette énumération va me valoir des commentaires dissidents !). 3 Billboards s’ajouterait selon moi à cette liste peu glorieuse. Surtout si on le mesure à Dunkerque, lui aussi favori avec huit nominations, qui, de mon point de vue, mériterait cette consécration.
Oui, vous avez parfaitement raison, Ces panneaux de la Vengeance sont un excellent film mais pas un chef d’oeuvre. Pourquoi donc? Il me semble que c’est le côté théâtral de l’oeuvre avec ces dialogues coup de poing( et pourtant quel talent!)
qui en est la cause. C’est normal car le scénariste: Martin Mc Donagh est dramaturge. Pourtant ne reproche-t-on pas aux films contemporains d’être trop pauvres en dialogues?
C’est aussi sa construction en spirale: on croit qu’il s’agit de la vengance d’une(mauvaise) mère, mais c’est le procès de l’Amérique du Midwest raciste, inculte, alcoolisée, laxiste, cynique, violente, amorale, et enfin on réalise que le film pourrait être une fable philosophique sur le Bien et le Mal. Avec , au final, une ouverture sur une certaine humanité. Car les méchants, les tarés , par une inversion subite, se révèlent pleins de bonne conscience et de bons sentiments. Même l’amour y trouve sa place! La fin, effectivement, n’en est pas vraiment une puisqu’elle laisse le choix au spectateur de choisir la version qui lui convient. Il y a de quoi déboussoler. Et c’est certainement le but que s’est donné le scénariste.
Mais le jeu des acteurs est juste phénoménal. Du plus grand (Fances MC Dormand) au plus petit rôle(celui du nain). Quant à l’humour noir, il est juste renversant. La provocation à tout va: du bonheur pur! Bon on pourrait rajouter une moitié d’étoile à ce film hors normes où on ne s’ennuie pas un seul instant…