Setsuko, la cinquantaine, s’ennuie à Tokyo entre son appartement et son travail. Jusqu’au jour où sa nièce Mika lui fait rencontrer John, un jeune professeur d’anglais aux méthodes hétérodoxes. Contre toute raison, Lucy s’éprend de lui et lorsqu’il rentre soudainement en Californie, décide de l’y suivre. La mère de Mika l’accompagne.
Il y a deux films dans Oh Lucy!
Le premier, à cheval entre le Japon et les États-Unis, en décrit les différences culturelles. Le premier plan du film montre une foule de Japonais, dont beaucoup arborent un masque chirurgical, massés sur un quai de métro. Un homme se détache de la foule, se précipite sous les rails du métro et se tue. La caméra se resserre sur Setsuko, notre héroïne, qui se rend à son travail sous le choc du drame dont elle vient d’être le témoin. À son bureau, tout est codifié : les relations faussement cordiales entre collègues, la déférence respectueuse affichée avec le chef de bureau.
Tout est différent lorsqu’elle rencontre John qui l’affuble d’un nouveau prénom, Lucy, et d’une perruque blonde, l’oblige à ouvrir largement la bouche (le comble de l’inconvenance au Japon) en guise d’exercice de prononciation et la prend dans ses bras en une accolade rituelle (« hug ») qu’affectionnent les Américains pour manifester leur sympathie mais dont la signification décontenance les sociétés chez lesquelles le contact corporel est moins spontané.
Le second film dans le film raconte la crise de la cinquantaine d’une Japonaise qui étouffe dans une vie étriquée. Le sujet est moins original. Il n’en est pas moins remarquablement traité par la réalisatrice Atsuko Hirayanagi, qui avait réalisé sur ce thème un court métrage de vingt-deux minutes trois ans plus tôt. Dans le rôle de Setsuko/Lucy, Shinobi Terajima, une star au Japon, quasi-inconnue chez nous, réussit à rendre crédible un personnage qui aurait pu ne pas l’être. Au bord de la dépression voire du suicide au début du film, elle se réveille au contact de John et décide de briser les amarres en partant à sa poursuite dans une fuite en avant à la Thelma et Louise.
En salles depuis le 31 janvier, Oh Lucy! est condamné à l’anonymat par la sortie des blockbusters Les Tuche 3, Le Labyrinthe, Cinquante nuances plus claires… Dommage