Cristi (Vlad Ivanov, acteur fétiche de Cristian Mungiu) est un flic ripou en cheville avec la mafia. Gilda (Catrinel Marlon fémininement fatale) lui demande de faire évader Zsolt (Sabin Tembrea révélé par la mini-série allemande Berlin 56) qui cache trente millions d’euros tirés du blanchiment du trafic de drogue. Pour ce faire, il est dépêché aux Canaries sur l’île de La Gomera (qui donne son nom au titre original du film) pour y apprendre le Silbo, une langue sifflée avec laquelle il communiquera le jour de l’évasion de Zsolt.
Projeté à Cannes en compétition officielle, précédé d’une critique élogieuse, Les Siffleurs ne cache pas ses références au film noir américain : Gilda, Psychose… Mais il déçoit pour trois raisons.
Il sent un peu trop l’exercice appliqué du bon élève. Corneliu Porumboiu fait partie de la « Nouvelle Vague » roumaine, aux côtés de Cristian Mungui (Baccalauréat), d’Adrian Sitaru (Illégitime) ou de Cristi Puiu (Sieranevada). Ce mouvement de jeunes cinéastes dénonce avec un réalisme rêche les impasses morales de la société roumaine post-communiste. Les précédents films de Porumboiu s’inscrivaient dans cette filiation (Le Trésor, Football infini) dont il s’éloigne radicalement. Certes, le cinéma roumain n’est pas condamné aux avortements clandestins ou aux prêtres incestueux ; mais on voit la pertinence de ce Gilda transcarpathe que nous propose Les Siffleurs.
Deuxième défaut. Le Silbo. Corneliu Porumboui raconte avoir vu en France avec sa femme un reportage sur cette langue sifflée. Moi aussi, je regarde souvent à la télé des reportages fascinants. Je n’en fais pas pour autant un film. Mis à part l’exotisme de carte postale que le détour par les Canaries insuffle au récit, on voit mal ce que l’utilisation de cet artifice lui apporte.
Troisième et dernier défaut. Le plus grave. Si on se laisse souvent emporter par les films d’arnaque, par leurs personnages archétypaux (et ici, il faut être stylite pour ne pas s’enflammer pour Catrinel Marlon), par leurs tiroirs, c’est à condition d’en comprendre les rebondissements. Ici, hélas, je me suis perdu – je n’ai pas compris le double jeu de Magda. La faute à mon manque de concentration ou à un scénario illisible ? Toujours est-il que j’ai décroché durant la seconde moitié du film jusqu’à un épilogue, il est vrai d’un romantisme inoubliable, malgré son absence de crédibilité.