Lara Jenkins (impressionnante Corinna Harfouch, une star en Allemagne quasiment inconnue de ce côté-ci du Rhin faute d’avoir tourné hors de son pays) a soixante ans aujourd’hui. C’est encore une femme belle et élégante. Mais une vie de frustration l’a coupée du monde. Un professeur de piano tyrannique lui a fait renoncer à sa passion quand elle était en âge de devenir soliste. Elle a pris un poste administratif à la mairie de Berlin qui ne lui a apporté aucune joie et où elle ne s’est fait aucun ami. Son mari a divorcé et a refait sa vie avec une compagne plus jeune. Son voisin lui fait la cour ; mais elle repousse obstinément ses avances. Son fils est devenu un grand pianiste et donne ce soir son premier concert.
Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme. Lara Jenkins a le rythme et l’élégance d’un court roman de Stefan Zweig.
Il en a aussi l’âpreté. Car Lara, l’héroïne, n’a rien de sympathique. Cette Prussienne glaciale et vipérine ne peut s’empêcher de décocher des piques autour d’elle et de repousser les mains qui lui sont tendues.
L’accumulation est lourde sinon lassante. D’autant que le scénario refuse toute facilité : aucun rayon de soleil ni happy end. On pense évidemment à La Pianiste, l’affreux roman de la prix Nobel autrichienne Elfriede Jelinek, adapté par Michael Haneke avec Isabelle Huppert, les perversions sexuelles et le sadisme de son personnage principal en moins.
Je n’avais pas aimé La Pianiste. Je n’ai guère plus apprécié Lara Jenkins qui m’a donné envie d’aller me pendre en sortant de la salle. Suicidaires s’abstenir !