Epicentro est une plongée immersive dans La Havane, la capitale cubaine, sur les pas de ses habitants, à la fin de l’ère castriste.
Epicentro est réalisé par le documentariste Hubert Sauper qui avait signé avec Le Cauchemar de Darwin un des documentaires les plus marquants et les plus stimulants de ces dernières années. J’avais même réussi à en faire paraître une critique dans la section, normalement réservée aux seuls livres, d’une revue très sérieuse de relations internationales [c’était ma minute prétentieuse].
Epicentro souffre d’une ambiguïté. Son titre nous entraîne sur une fausse piste. Hubert Sauper considère que l’explosion du USS Maine qui a entraîné l’invasion de Cuba par les Etats-Unis en 1898 constitue « l’épicentre » de l’impérialisme américain. Outre que le terme soit mal choisi – on lui aurait préférer celui de « moment fondateur » certes moins percutant – ce postulat de départ appelait une vaste démonstration historique exposant l’ensemble des actions impérialistes – et il y en eut – menées par les Etats-Unis tout au long du vingtième siècle.
Or Epicentro ne quitte jamais Cuba. Mieux, il ne quitte jamais La Havane où l’on a parfois l’impression que Hubert Sauper filme ses souvenirs de vacances en nous présentant les sympathiques Cubains qui ont croisé son chemin.
Que nous dit-il de Cuba au lendemain du décès du Lider Maximo, engagé dans une impossible réconciliation avec le grand frère américain dont l’embargo l’étouffe ? Pas grand-chose. Il ne s’agit pas d’une ode au castrisme, môle de résistance face à l’impérialisme américain, ou au contraire d’une dénonciation de l’oppression politique qui y règne et de la misère sociale qui s’y perpétue. Epicentro dure près de deux heures mais est étonnamment vide de contenu. Et côté sensations, on n’est guère mieux récompensé avec les sempiternels clichés des Chevrolet rutilantes qui font le tour du capitole et des vagues furieuses qui fouettent le Malecon. La seule pique que décoche ce documentaire bien fade vise le tourisme de masse qui s’installe sans y être invité dans l’intimité des êtres – et qu’alimente pourtant lui aussi le « touriste » Hubert Sauper.
Je trouve la critique sévère. Il y manque quelque chose comme la construction d’une idéologie, de la propagande anti américaine en réponse à l’embargo des USA. Comment le mythe, l’événement fondateur, victimise Cuba et justifie, donne du sens aujourd’hui à
l’incroyable résistance des cubains. Je connais bien Cuba, et pas que comme touriste, au travers d’une histoire personnelle, et je suis toujours frappée par l’acceptation de conditions de vie qui nous semblent impossibles. Et par la résilience ( même si le mot es aujourd’hui mis à toutes les sauces ) de la population. Mais on ne saurait parler de Cuba que comme enfer ou paradis, disait je ne sais plus qui ….
Je n’ai, chère Michèle, jamais mis les pieds à Cuba.
Et j’ai du coup, par rapport à vous, un handicap structurel pour porter un jugement sur Epicentro que vous avez pu, en connaissance de cause, mieux apprécier que moi.