Cassie (Carey Mulligan) fut longtemps une jeune femme à l’avenir prometteur. Mais, à l’aube de la trentaine, elle végète chez papa-maman dans un job minable. Chaque week-end, outrancièrement maquillée, elle va en boîte où elle simule la gueule de bois pour donner une leçon aux prédateurs qui feignent de jouer au bon Samaritain pour abuser d’elle. Quel drame dans sa vie explique un tel comportement ? La rencontre de Ryan (Bo Burnham), un ancien camarade de faculté, qui lui fait une cour assidue, la conduira-t-elle à enfin tourner la page ?
Promising Young Woman, premier film d’Emerald Fennell, l’actrice qui campe Camilla Parker Bowles dans la série The Crown, vient d’obtenir l’Oscar du meilleur scénario original. Original, son scénario l’est en effet, qui est construit autour d’une énigme qu’on découvre peu à peu et qui nous ménage jusqu’à sa conclusion d’étonnants rebondissements.
Ces énigmes, ces twists, compliquent la tâche de la critique bien en mal de parler d’un film dont elle s’interdit de divulgâcher ce qui en fait tout le prix. Dire, comme on en lit partout, qu’il relève du rape and revenge, c’est déjà trop en dire – sauf à ajouter immédiatement, pour contredire la conclusion à laquelle vous avez, cher lecteur, trop vite sauté, que, non, Cassie n’a pas été violée durant ses études. Mais cet ajout – dont le seul but était de vous éviter de vous lancer sur une fausse piste – n’est-il pas déjà de trop, l’un des ressorts du film étant peut-être justement de laisser imaginer au spectateur qu’elle avait en fait été violée ? Oh la la… je sens que je m’enfonce…..
Bref, comme on l’aura compris (ou pas !), Promising Young Woman est construit autour d’un concept (mais n’en dis-je pas déjà trop en l’écrivant ?) : l’espoir post #MeToo de modifier les comportements prédateurs masculinistes qu’on a subis en frappant ceux qui les ont fait subir.
Le sujet est d’actualité. Il est même d’utilité publique. Il parlera, espérons-le, aux jeunes spectateurs, garçons ou filles, auxquels le film s’adresse. Reste maintenant, au-delà de toutes considérations éthiques ou politiques, à apprécier sa valeur cinématographique. Et c’est là peut-être que le bât blesse.
Car, après s’être laissé prendre au jeu d’une bande annonce aguichante, on se retrouve face à un rouleau compresseur. Le personnage de Cassie, loin de susciter l’empathie, et aussi remarquablement interprété qu’il soit par la toujours excellente Carey Mulligan (Une éducation, Drive, Shame, Gatsby le magnifique, Loin de la foule déchaînée, Wildlife, The Dig …), se réduit à une seule dimension : être l’instrument d’une vengeance voire d’une croisade. Une fois qu’on a compris son rôle, on prend moins d’intérêt aux événements qu’elle traverse. On en prend d’autant moins que leur crédibilité se réduit de plus en plus jusqu’à un dénouement certes surprenant, mais totalement abracadabrantesque.