Après avoir mis le feu à une ferme isolée où il vient d’enterrer un mystérieux cadavre, Stanton Carlisle (Bradley Cooper) trouve refuge dans un cirque. Il est vite pris sous la coupe de son directeur (Willem Dafoe), un homme sans scrupule qui joue de la crédulité des gens. Il se lie d’amitié avec une voyante (Toni Collette) et son mari (David Strathairn), un ancien mentaliste qui a sombré dans l’alcool et qui lui apprend ses tours. Carlisle séduit la belle Molly (Rooney Mara) et quitte le cirque pour Buffalo où le numéro qu’ils montent ensemble emporte un succès croissant. Son chemin y croise celui de Lilith Ritter (Kate Blanchett), une psychanalyste, avec la complicité de laquelle il arnaque des membres de la haute bourgeoisie.
Avec Nightmare Alley, Guillermo del Toro signe son onzième film. Reconnaissable à la première bobine, le cinéma du réalisateur de L’Echine du diable ou La Forme de l’eau (dont j’avais fait à sa sortie une critique vipérine) flirte souvent avec le fantastique et le surnaturel. Rien de tel ici dans l’adaptation du très classique roman de William Lindsay Graham publié en 1946. Rien de tel à première vue du moins car Guillermo del Toro parvient à réaliser un grand film de studio, d’une longueur intimidante (2h31), avec des décors et des costumes luxueux, avec une palanquée d’acteurs à faire pâlir une soirée des Oscars, sans rien renier de son style. La première scène où Carlisle découvre le cirque et ses coulisses, à la recherche du geek, ce « crétin », cet « idiot » réduit à un statut quasi-animal, qui sera le fil rouge du film, son héros silencieux, nous en donne l’avant-goût.
Nightmare Alley est d’une durée inhabituelle – même si les fans du MCU/DCU ont désormais l’habitude de métrages qui flirtent avec les trois heures. Elle pourrait nous sembler bien longue. Le film manque d’ailleurs d’unité, coupé en son milieu par le départ du cirque du héros, son arrivée en ville… et l’apparition de Kate Blanchett ultra-glamorisée qu’on attendait impatiemment depuis le générique. Mais cette durée-là, ce rythme là participent au plaisir régressif qu’on prend à retrouver un cinéma d’antan plus lent, plus long, moins dense que celui auquel on s’est habitué depuis quelques années (toutes choses égales par ailleurs, c’est la même longueur/langueur que j’ai ressentie devant Licorice Pizza).
Nightmare Alley fut un semi-échec aux Etats-Unis où il est sorti avant Noël, juste à temps pour concourir aux Oscars. Ce semi-échec le privera-t-il des récompenses qui lui semblaient promises ? C’est à craindre. Et c’est dommage. Car j’ai préféré – et de loin – ce film-là de Guillermo del Toro à La Forme de l’eau, Oscar surcôté du meilleur film en 2018. Et j’ai préféré l’interprétation de Bradley Cooper à celles qui lui ont valu trois nominations pour ses rôles dans Happiness Therapy, American Sniper et A Star is Born.
Pour ma part j’ai préféré de loin LA FORME DE L’EAU. Comme quoi…