Anna (Julie Gayet) est une actrice célèbre qui approche la cinquantaine et qui peine à réparer des ans l’irréparable outrage. Elle forme avec Antoine (Benjamin Biolay) un couple qui s’est construit autour de la passion commune de la scène mais qui, avec le temps, s’est usé.
Pour lutter contre le trac, Anna se fait prescrire, dans l’arrière-salle d’une boutique chinoise, un philtre dont le surdosage accidentel aura des effets étonnants : Anna aura le don de prendre les traits de n’importe quelle femme. Usant de ce subterfuge, Anna se transforme en Delphine (Agathe Bonitzer), la critique de théâtre dont Antoine est en train de tomber amoureux.
Comme une actrice est une étonnante comédie dramatique sur l’usure du couple et la jeunesse qui fuit. La recette est agrémentée d’une larme de fantastique, un ingrédient très difficile à doser dont je trouve qu’il détruit souvent l’équilibre d’un film. Mais tel n’est pas le cas ici.
Le seul reproche que j’adresserais à Comme une actrice est marginal. Je trouve qu’il comportait une veine à la fois très drôle et vertigineuse – la possibilité pour Anna d’emprunter les traits de n’importe quelle femme et de se retrouver entraînée de ce fait dans mille et une histoires – que le film utilise trop tard ou trop peu. Il aurait dû en faire sa première partie avant de se focaliser sur la relation d’Antoine et de Delphine et le subterfuge d’Anna.
Mais ce reproche ne pèse guère au regard des nombreuses qualités que j’ai trouvées à ce film.
Il s’agit bien sûr, comme l’annoncent son titre et son affiche – une photo empruntée à sa toute première scène, une longue scène de maquillage et de coiffure où Anna se transfigure – d’une réflexion sur le métier d’actrice. Un métier qui donne l’occasion de « vivre mille vies » au risque de s’y perdre.
C’est aussi, c’est peut-être surtout, un film sur la jeunesse qui fuit et le désir insensé de la préserver à jamais. J’ai pensé à Dorian Gray et au pacte méphistophélique qu’il avait conclu pour garder une éternelle jeunesse. J’ai surtout pensé à la chirurgie esthétique et à ses effets délétères : quand bien même elle mettrait sa santé en danger, Anna ne peut plus s’empêcher de boire le philtre qui lui permet de prendre les traits de Delphine et de retrouver les baisers d’Antoine.
Enfin, Comme une actrice est un film déchirant sur le couple, sur le désir qui insidieusement l’a quitté, sur la crise de la cinquantaine, sur la lâcheté masculine, sur la fidélité féminine… Il se conclut sur une séquence ensoleillée dont je ne suis pas sûr du statut : s’agit-il du souvenir nostalgique des premiers commencements ? ou de la promesse radieuse d’un éternel retour ?