Quatre personnages se croisent à Istanbul, l’espace d’une journée rendue chaotique par une gigantesque panne d’électricité : une jeune danseuse de hip hop qui court les castings, une mère de famille réduite aux dernières extrémités pour payer la dette que son fils a contractée en prison, un vendeur de sommeil impliqué dans toutes sortes de trafics louches, une activiste féministe.
Les Fantômes d’Istanbul est le premier long métrage d’Azra Deniz Okyay. Prix de la semaine de la critique à Venise en 2020, il a mis trois ans à se frayer un chemin jusqu’aux écrans français.
Une caméra épileptique – « saisie par la fièvre de Saint-Guy » écrit méchamment Jacques Mandelbaum dans Le Monde – filme au plus près les corps avec l’objectif envahissant de montrer une Turquie en surtension au bord de l’explosion. Tous les sujets graves du moment sont évoqués, au risque de tout survoler : la liberté d’expression, la condition féminine, la corruption du pouvoir, le sort des immigrés syriens…
La construction en puzzle de ce film choral est inutilement emberlificotée – même si j’ai dit hier que cette accumulation de flashbacks et de flashforwards était particulièrement séduisante, qui rompait avec la linéarité ennuyeuse du récit chronologique. On a un peu l’impression, à la fin du film, de s’être fait arnaquer et on se dit qu’on aurait mieux passé son temps, quand on aime Istanbul, à lire ou relire Le Sillon de Valérie Manteau.