La réalisatrice Valérie Donzelli est revenue au Conservatoire national supérieur d’art dramatique dont elle avait raté le concours d’entrée en 1996, pour y donner une master class. Elle s’attache à une élève, Clémence Coullon, et décide de filmer la pièce que celle-ci monte avec ses camarades pour clore leur scolarité. Il s’agit d’une version moderne et détournée de Hamlet.
On connaît et on aime tous Valérie Donzelli, l’actrice débordante d’énergie, la réalisatrice de La guerre est déclarée ou L’Amour et les Forêts, la femme engagée à gauche pour l’égalité et la diversité dans le cinéma. On savait par avance qu’on la retrouverait égale à elle-même dans un exercice sans surprise, mais pas sans émotion pour autant, de transmission généreuse. Tour à tour marraine, égérie, grande sœur ou meilleure copine, elle accompagne une promotion du Conservatoire dans la préparation de son spectacle de fin d’année.
Ce documentaire est l’occasion de faire le portrait d’une troupe et de ses personnalités incandescentes. On pense aux Amandiers qui se livrait, sur le mode de la fiction, au même exercice. Le jeu en vaut la chandelle. Ces jeunes acteurs sont aussi doués qu’attachants, qui confessent leurs espérances et leurs doutes, et qu’on voit répéter et créer. On aimerait avoir connu dans sa jeunesse la même passion et la même camaraderie que ces jeunes talentueux qui viennent de passer trois ou quatre ans ensemble et sont sur le point de se séparer, tristes de cette rupture et anxieux des possibles qui s’ouvrent devant eux.
Ils travaillent sous la direction de leur metteuse en scène et camarade. Clémence Coullon est la vraie héroïne de Rue du conservatoire. Comme son aînée qui la filme avec empathie, elle a étudié la comédie avant de bifurquer vers la mise en scène. Sans doute Valérie Donzelli voit-elle en elle, son double autobiographique, la même énergie, la même fougue qui l’animaient quand elle avait vingt-cinq ans. Cette énergie, cette fougue sont diablement séduisantes : on s’enthousiasme de ses élans créateurs, on partage ses affres, on est presque aussi anxieux qu’elle le soir de la première.