Inséparable de ses deux fidèles amis, Jean-Yves et Francis, Anthony, surnommé Totone, fait les quatre cents coups dans son Jura natal. Mais la dure réalité s’impose à lui quand son père meurt brutalement, lui laissant sa ferme, ses dettes et sa petite sœur de sept ans à peine. Pour se renflouer, Totone décide de participer au concours du Comté d’or. Seul problème : il ne connaît rien à la confection du fromage.
J’avais quelques préventions à l’égard de Vingt Dieux : je pensais en connaître par avance les enjeux (la sortie de l’adolescence d’un paysan jurassien obligé de faire face à ses responsabilités après la mort de son père) et les développements (à force de débrouillardise, sa victoire aux comices agricoles et le renflouement de son exploitation). Les prestigieuses récompenses qui l’auréolaient – prix de la jeunesse au dernier festival de Cannes, meilleur film au festival d’Angoulême, prix Jean-Vigo 2024 – n’avaient pas suffi à infléchir mes préjugés.
Sans doute Vingt Dieux contient-il quelques maladresses et quelques passages obligés. Une amie qui connaît mieux la ruralité que moi me pointait quelques incohérences : Marie-Lise ne vivrait pas seule dans une ferme sans un chien par exemple. Il serait bien indulgent d’affirmer que Vingt Dieux révolutionne à lui seul le coming of age movie. Il n’en comporte pas moins trois ou quatre éléments qui en font selon moi le meilleur film sinon du mois du moins de la semaine.
Vingt Dieux participe d’un mouvement cinématographique typiquement français qui utilise le monde rural et les agriculteurs comme un sujet de cinéma à part entière. On ne filmait plus guère la campagne dans les années 80 ou 90 – sinon avec Le Grand Chemin. On la filme de plus en plus dans les années 2010, 2020. Le succès public et critique emporté par Petit Paysan en est la preuve. Mais il n’est pas le seul : La Famille Bélier, Au nom de la terre avec Guillaume Canet, La Terre des hommes, etc. Il louche du côté du documentaire, nous enseignant par le menu (si j’ose dire) les différentes étapes de la fabrication et de l’affinage du Comté. Il évoque aussi le monde étonnant des courses de stock-cars.
Vingt Dieux raconte l’éveil à l’amour de Totone avec Marie-Lise. Ce personnage est étonnant. Il est interprété par une actrice amatrice, agricultrice de profession. Il nous renvoie une image de la féminité différente des canons dans lesquels elle est usuellement enfermée : sans coquetterie, avare de mots, vivant à la dure, Marie-Lise a peut-être des sentiments pour Totone mais les exprime avec une retenue qu’on n’a pas l’habitude de voir au cinéma.
Enfin, le scénario de Vingt Dieux nous révèle des surprises. Il ne nous raconte pas l’histoire qu’on avait imaginée et le dénouement qu’on avait pronostiqué. Il en raconte un autre, imprévisible et pour autant parfaitement crédible.
Un peu déçue par le film par rapport au livre puissant et remarquablement écrit, je partage votre critique sur la performance des acteurs non professionnels
De quel livre ce film est-il tiré ?