La trentaine bien entamée, Geoffrey a fini de purger la longue peine à laquelle il avait été condamné pour un crime commis dans la capitale. À sa sortie de prison, son oncle le ramène à Shimoni, le village du sud du pays où il a grandi. Le curé a accepté de le prendre à son service en cachant au reste de la population son passé. Ancien professeur d’anglais, Geoffrey se voit ravalé au statut de garçon de ferme.
Un beau jour, Geoffrey fait une rencontre qui fait remonter en lui un passé longtemps enfoui.
Le Kenya n’est pas un grand pays de cinéma. Si on exclut Out of Africa, on serait bien en peine de citer un film qui y ait été réalisé. En cherchant bien, on se souviendra peut-être de Rafiki et du parfum de scandale dont cette comédie girly et lesbienne fut entourée à sa sortie en 2018.
Comme Rafiki hélas, Shimoni ne cède pas à l’exotisme et ne nous montre rien de ce pays où j’ai vécu, jeune, ingambe et chevelu, trois des plus belles années de ma vie. L’histoire qu’il raconte pourrait se dérouler n’importe où.
C’est une histoire sinistre dont les ressorts se dévoilent lentement. Le scénario de Shimoni est en effet suspendu à deux énigmes : quel crime Geoffrey a-t-il commis ? quel traumatisme a-t-il subi dans son enfance qui explique peut-être ses pulsions criminelles ? Il réussit à ne pas les élucider trop tôt pour maintenir le spectateur en haleine ; mais elles sont trop transparentes pour être vraiment stimulantes.
Geoffrey se voit au surplus dénier le droit de retrouver une place dans la société alors qu’il a purgé sa peine. De ce point de vue, les personnages du prêtre qui le recueille, de la villageoise débonnaire qui travaille avec lui et de la jeune voisine qui s’est entichée de lui et qui aimerait bien le voir sortir de sa mélancolie sont particulièrement intéressants : ils incarnent, chacun avec sa part d’ambiguïté, les réactions archétypales d’un groupe humain face à ses brebis galeuses.
Shimoni dresse le portrait d’un homme brisé, rongé par la culpabilité et par ses démons intérieurs. Sa conclusion est sinistre. Un film mainstream n’aurait pas eu une telle audace.