Hugo (Félix Lefebvre) a bien changé. Ce fils de bonne famille a perdu trente kilos grâce à un régime draconien et à un training intensif. Il a même une copine, qui le rejoint à Noirmoutier le temps des vacances. Esthéticienne, faux ongles et chihuahua, Queen (Anja Verderosa) détonne au milieu des amis BCBG de Hugo.
Depuis sa sortie il y a une semaine, je n’entends que du bien de ce premier film atlantique et estival. Les mêmes éloges ont fusé, dès la fin du film, chez mes amis avec qui je suis allé le voir hier soir, avant de finir la soirée chez Gaetano en parfaits touristes.
L’Épreuve du feu mérite amplement ces compliments. C’est un film juste et sensible. Ses deux principaux personnages sont très fouillés. Hugo est le plus complexe, interprété par l’une des deux révélations de Été 85 – l’autre, Benjamin Voisin, faisant depuis la carrière que l’on sait. On ignore son passé familial ; rien n’est dit de ses parents ; mais on imagine qu’il fait partie du même milieu que ses amis bien nés, ces Parisiens en vacances dans la résidence secondaire de leurs riches parents. Son régime l’a transfiguré et lui rouvre les portes d’un cercle d’amis qui l’avaient longtemps tenu à distance.
Si Hugo a longtemps été marginalisé par son surpoids, Queen risque de l’être par sa classe sociale, son métier et son look outrancier de parfaite « cagole » toulonnaise. Anja Verderosa est irrésistible, comme l’était déjà une autre bimbo varoise, Malou Khebizi dans Diamant brut, dans un rôle pourtant casse-gueule. Aux préjugés qui la précédent, elle oppose une sincérité désarmante. Son rôle d’ailleurs, tiré vers la sainteté sacrificielle, souffre paradoxalement de ce défaut-là : il est dénué de toute ambiguïté.
Hugo et Queen forment un attelage disparate, comme la coiffeuse arrageoise interprétée par Emilie Dequenne et l’agrégé de philo de Pas son genre, comme encore, si on ose cette référence proustienne, Charles et Odette. Le scénario devait, après nous l’avoir présenté, relever le défi de le faire évoluer. C’est là à mon sens que le bât blesse. Concentrée en quelques jours à peine, l’intrigue repose sur un revirement radical et guère plausible de Hugo, coupable d’une double trahison. Son ressort est bien puéril, digne du Club des Cinq plus que d’Un amour de Swann, et le scénario aurait pu faire l’économie de nous en mâcher l’explication.
Dernière objection, tout aussi vétilleuse que les précédentes : je trouve le titre du film trop terrien pour un film si maritime.