Caniba ★☆☆☆

En juin 1981, Issei Sagawa attire dans sa chambre d’étudiant à Paris une camarade néerlandaise, la tue d’un coup de fusil à bout portant puis découpe et cuisine sa chair morte. Trois jours plus tard, il sera arrêté après avoir maladroitement tenté de se débarrasser de ses restes humains dans deux lourdes valises au bois de Boulogne.
Expertisé par un collège de psychiatres, il est déclaré pénalement irresponsable. La justice prononce un non-lieu. Il est d’abord interné à l’Unité pour malades difficiles de Villejuif puis transféré au Japon et rendu à la vie civile en 1984.
Dans l’impossibilité de cacher à ses employeurs son lourd passé, il décide d’en faire le commerce. Il publie des mangas qui décrivent avec complaisance son crime et les fantasmes de cannibalisme qui continuent à l’habiter ; il tourne dans des films pornographiques ; il passe régulièrement à la télévision pour commenter des affaires criminelles ou faire la publicité d’une chaîne de restaurant de viande.

Il y a deux façons d’aborder Caniba. La première est d’avoir lu ce qui précède, d’être informé de l’affaire du « cannibale japonais » et d’espérer comprendre les ressorts de son comportement monstrueux. La seconde est de n’en rien savoir, d’arriver vierge de tout préjugé et de toute information dans la salle, et de découvrir, un peu éberlué, filmé en très gros plan, en de longues séquences immobiles, le visage glabre d’un vieillard grabataire, qui ne survit guère que par les bons soins d’un frère, au moins aussi psychotique que lui, et d’une infirmière en cosplay.

Dans un cas comme dans l’autre, on sera déçu voire furieux. Certes, le travail tout en finesse de Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor, dont on avait déjà admiré l’étonnant Leviathan, tourné dans un chalutier de haute mer, sans un dialogue, est d’une autre facture qu’un vulgaire épisode de Faites entrer l’accusé. Ici, pas de flashbacks à l’emporte-pièces, pas de coups de théâtre faussement dramatiques. Mais d’interminables plans fixes filmés au plus près du visage de Sagawa – et de sa bouche qui s’ouvre pour manger un morceau de chocolat. Pourquoi ce parti pris ? pour nous faire ressentir l’humanité d’un monstre qui n’en est pas moins homme ? ou la monstruosité d’un homme emporté dans ses délires psychotiques, qui a commis l’acte le plus tabou qui soit et qui, loin de s’en excuser, le revendique ?

Caniba déçoit car il n’explique rien. Il ne nous dit rien des causes de ce comportement – que les médecins ont attribué à l’encéphalite dont Sagawa fut atteint dans sa prime enfance, de sa constitution chétive et de sa mère qui le forçait à manger de la viande pour se ragaillardir.
Mais, pire, Caniba choque par la complaisance avec laquelle les documentaristes filment Sagawa. Ils s’en défendent dans un carton que l’on ne lira qu’à condition de rester jusqu’à la fin du générique. « Caniba ne justifie ni ne légitime les actes de Issei Sagawa ». La phrase sonne comme un aveu caché : quand bien même les réalisateurs n’avaient nullement le projet de cautionner Sagawa, leur maladresse donne parfois cette impression dérangeante.

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Tom of Finland ★★☆☆

Touko Laaksonen est devenu mondialement célèbre dans les années soixante-dix par ses dessins homo-érotiques. Il a inventé un univers fétichiste de chair et de cuir, hyper viril et hyper sexué, qui a durablement influencé l’iconographie gay. Tom of Finland raconte sa vie depuis la Seconde Guerre mondiale où il a combattu les Russes jusqu’à l’épidémie du Sida dans les années quatre-vingts.

Pas besoin d’être exposé au musée d’Orsay pour avoir son biopic. Après Gauguin, Rodin et Lautrec, ce biopic finlandais est arrivé sur nos écrans à l’été 2017 et est rediffusé ces jours-ci au MK2 Beaubourg. Il n’est pas sans similitude, dans sa construction par exemple, avec ceux consacrés aux grands maîtres de l’impressionnisme. Mais il décrit un artiste et une époque si différents que la comparaison s’arrête là.

Avant d’être la description d’une œuvre, Tom of Finland est l’histoire d’un homme qui dessine pour sublimer une homosexualité que la société condamne. Sa vie est filmée dans les mêmes tons gris et marrons auxquels le cinéma finlandais de Aki Kaurismäki nous a habitué. Il ne faisait pas bon être homo à Helsinki dans les années cinquante. On se frôlait dans les parcs. On se retrouvait dans des bars clandestins. On vivait dans la peur des raids de police (non ! ce n’est pas une contrepèterie … quoique). On habitait chez sa sœur pour donner le change.

Tom of Finland prend une toute autre orientation – et s’éclaire d’une toute autre lumière – dans sa dernière partie. Touko Laaksonen s’exile en Californie où il rencontre le succès. Il y découvre une société libérée où des flics peuvent débouler dans une orgie gay sans arrêter personne. On le sent en décalage face à cette société trop libérale, trop libérée. Comme si, l’auto-censure à laquelle l’avait condamné la Finlande était devenue une seconde peau.

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O Grande Circo Místico ★☆☆☆

Une impératrice soi-disant vierge (Catherine Mouchet) et un docteur cardiaque (Antonio Fagundes) ont un fils, Fred (Rafael Lozano), qui, à la mort de son père, décide avec son héritage d’acheter un cirque à Beatriz (Bruna Linzmeyer), la femme qu’il aime. Charlotte (Marina Provenzzano), la fille de Fred et de Béatriz, mariée à un Français volage, Jean Paul (Vincent Cassel), a deux jumeaux, Oto (Juliano Cazzare) et Clara (Flora Diegues). Oto tombe sous le charme d’une actrice de cabaret héroïnomane, Lily Braun (Luzia Mariani) dont il a une fille trapéziste, Margarete (Mariana Ximenes) qui veut consacrer sa vie à Dieu. Mais Margarete, contrainte au mariage avec Ludwig (David Ogrodnik), tombe enceinte de deux jumelles après avoir été violée. Tandis que l’entreprise familiale tombe en faillite, Margarete décide de se venger.

Vous n’avez pas tout suivi ? Pas grave ! Moi non plus… même si j’ai mis une bonne demie heure à reconstituer patiemment l’histoire sur cinq générations depuis le début du vingtième siècle jusqu’à celui du vingt-et-unième du cirque acheté par Fred Kieps telle qu’elle est nous est racontée par Célavi, un monsieur Loyal sur lequel les années qui passent semblent ne pas avoir prise.

Danny Diegues est un géant du cinéma brésilien, l’un des fondateurs du Cinéma Novo dans les années soixante. Sa renommée a valu à son dernier film une projection spéciale au festival de Cannes. Mais hélas O Grande Circo Mistico y est passé inaperçu. C’est que le spectateur occidental, même s’il a lu Cent ans de solitude et aime son réalisme magique, n’est pas habitué à une telle profusion, à une telle exubérance. Le scénario du film, que j’ai péniblement essayé de résumer, nourrirait sans peine plusieurs saisons d’une série à succès.

Sans doute O Grande Circo Mistico peut-il se voir comme une métaphore de la création artistique, voire comme une fresque du Brésil contemporain. Mais le film, qui dure seulement une heure et quarante cinq minutes est si rempli de personnages, d’histoires, de destins contrariés qu’on nous présente à une telle vitesse, comme si le temps manquait pour les raconter calmement, qu’on frise vite l’overdose ou pire l’ennui.

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BlacKkKlansman – J’ai infiltré le Ku Klux Klan ★★☆☆

Ron Stallworth (John David Washington, fils de Denzel) vient d’être recruté par la police de Colorado Springs. Il s’ennuie dans un emploi de bureau et rêve d’être affecté sur le terrain. Avec l’aide d’un collègue blanc (Adam Driver), qui prendra sa place lors des réunions du Klan, il infiltre l’organisation extrémiste.

C’est l’histoire incroyable mais vraie d’un policier noir qui, au début des années soixante-dix infiltra le Ku Klux Klan. L’histoire est d’ailleurs si incroyable qu’on a du mal à y croire : pourquoi avoir confié cette mission à deux agents, avec le risque que les propos qu’ils tiennent au téléphone et sur le terrain ne divergent, plutôt qu’à un seul ? Mais on surmonte vite ses réticences pour se laisser entraîner dans ce polar bon enfant qui rappelle Starsky et Hutch et les comédies satiriques des frères Coen.

BlacKkKlansman n’en est pas pour autant un « gentil » film, une « tarantinerie » façon Jackie Brown dont la seule qualité se résumerait à la reconstitution irréprochable des années soixante-dix, ses coupes afros, ses pantalons à pattes d’eph… C’est avant tout un film de Spike Lee, un cinéaste engagé, un angry black man qui n’a rien perdu de sa rage. Le réalisateur de Nola Darling n’en fait qu’à sa tête, Do the right thing et Malcom X, raconte toujours la même histoire : celle des Noirs américains qui cherchent désespérément leur place dans une société raciste. Le refrain est connu. Il pourrait lasser.

L’ambition de BlacKkKlansman est immense. Il s’agit de faire le procès de l’Amérique Wasp, depuis The Birth of a Nation, le premier blockbuster de l’histoire du cinéma, jusqu’à Donald Trump et aux événements de Charlottesville de l’été dernier. Spike Lee instruit ce procès à la truelle. C’est sa marque de fabrique. On peut lui reprocher son manichéisme. On ne peut en revanche lui contester son efficacité.

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Under the Silver Lake ★☆☆☆

Sam (Andrew Garfield) vivote à Los Angeles dans le quartier de Silver Lake. Sur le balcon de l’appartement dont il va être chassé à force de loyers impayés, il observe ses voisins à la jumelle. Il est attiré par Sarah (Riley Keough) qui, après l’avoir invité un soir chez elle, disparaît brusquement. Sam se lance à sa recherche. Il croisera un auteur de comics, le roi des SDF, un compositeur fou, la fille paumée d’un milliardaire…

Under the Silver Lake est tout à la fois un film très riche et très pauvre.

Force est d’abord de reconnaître sa richesse. Le film de David Robert Mitchell, jeune réalisateur surdoué qui s’est fait connaître en 2015 avec It Follows, qui bouleversait intelligemment les codes du film de genre, s’inscrit dans une riche généalogie. Ils sont nombreux, depuis les films noirs des années quarante jusqu’aux réalisations de Lynch ou Cronenberg, les films qui ont pour cadre voire pour personnage principal la cité des anges. David Robert Mitchell le sait qui en a intégré tous les codes. Son whodunit (qu’est-il advenu de Sarah ?) n’est qu’un prétexte à une cauchemardesque déambulation sur les pas de Marilyn Monroe, Alfred Hitchcock, James Dean et Kurt Cobain. Au son d’une musique délicieusement démodée tous les ingrédients d’un L.A. iconique sont convoqués : boulevards ensoleillés, disparitions mystérieuses, soirées huppées, femmes fatales…

Mais le problème est que ce cocktail frelaté à force d’avoir été déjà mille fois filmé manque furieusement de profondeur. Le mal-être existentiel de Sam – dont l’interprétation pataude par Andrew Garfield le tire parfois (involontairement ?) vers le comique – n’a rien d’intéressant. Aucune empathie ne se crée avec le personnage principal que la caméra ne quitte pas d’une semelle. Aucune antipathie non plus car le personnage est sympathique. Rien qu’un désintérêt qui ne cesse de croître au fur et à mesure des cent-trente-neuf minutes de Under the Silver Lake, durée hélas incompressible de ces films dont la longueur participe de leur capacité à assommer le spectateur.

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Sur la plage de Chesil ★☆☆☆

Dans l’Angleterre encore corsetée par une morale victorienne, Florence et Edward viennent de se marier. Elle est la fille d’un petit industriel conservateur et d’une enseignante en philosophie à Oxford ; il est issu d’un milieu plus modeste. Leur inexpérience – ils sont vierges l’un et l’autre – n’a d’égale que leur fébrilité quand vient leur nuit de noces qu’ils passent dans un hôtel sur la plage de Chesil dans le Dorset.

Ian McEwan est à la mode cet été. Deux semaines seulement après My Lady – tiré de L’Intérêt de l’enfant – voici l’adaptation éponyme d’un autre de ses romans. On y retrouve toutes les qualités de son œuvre : le soin porté à la psychologie des caractères, la reconstitution minutieuse d’un temps révolu, la description des rapports de classe, portrait en creux d’une société anglaise plus lente à évoluer qu’on ne le pense.

Toutefois, et en dépit de la remarquable interprétation de Saoirse Ronan – qui n’est pas sans rappeler le rôle qu’elle tenait dans l’excellent Brooklyn Sur la plage de Chesil pâtit de deux défauts rédhibitoires.

Le premier est sa mise en scène pataude, théâtrale, languissante qui en ralentit inutilement le rythme. La nuit de noces des deux jeunes époux est entrecoupée de flashbacks qui racontent leur rencontre et leur amour naissant. Le procédé, trop académique, devient vite lassant.

Le second est l’épilogue que le réalisateur a cru bon d’ajouter à l’histoire. Deux courtes scènes sont rajoutées censées se dérouler en 1975 et en 2007. Les acteurs y réapparaissent, odieusement grimés pour donner l’illusion de leur âge. Plus grave : cet épilogue dénature le roman qui se terminait différemment. Trahison d’autant plus étrange que Ian McEwan en personne a supervisé le scénario du film.

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Bad Lieutenant ★★☆☆

Bad Lieutenant ressort sur les écrans en version restaurée. Le film a plus d’un quart de siècle et n’a pas si bien vieilli. Il a ce grain épais, ces images tremblées, ce son parasité des films des années quatre-vingts avant l’invention du Dolby Digital et de la SteadyCam.

L’action de Bad Lieutenant se déroule à New York, une immense mégalopole encore engluée dans la crise financière des années soixante-dix, sale et mal famée, comme Scorsese l’avait peinte quinze ans plus tôt dans Taxi Driver.

Abel Ferrara, qui n’en est pas à un excès près, charge la barque avec son personnage principal. Son lieutenant de police est le pire des ripoux. Après avoir déposé ses enfants à l’école, il use de ses prérogatives pour violer la loi éhontément. Il relâche deux braqueurs d’une épicerie après avoir détourné leur magot. Il traque des dealers pour détourner leur came. Il fait chanter deux jeunes filles dont les feux de signalisation ne fonctionnent pas pour se masturber devant elles. Cocaïnomane au dernier degré, il est un parieur compulsif qui s’entête à miser l’argent qu’il n’a pas sur l’équipe de baseball de Los Angeles, les Dodgers, qui ne cessent de perdre leurs matchs.

Bad Lieutenant est un film culte. Une légende noire circule à son sujet. Les acteurs auraient filmé sans doublures ni coupes, consommant eux-mêmes les drogues qu’ils injectent ou sniffent. Les addictions de Abel Ferrara et de Harvey Keitel étaient notoires. celles de Zoe Lund, la co-scénariste, aussi – qui en mourut quelques années plus tard.

Bad Lieutenant a pour héros une figure inventée quelques années plus tôt : celle du flic véreux contaminé par un cynisme qui gangrène la société tout entière (Inspecteur Harry, French Connection, Serpico…). Mais il lui offre une rédemption toute dostoïevskienne sur fond de morale judéo-chrétienne. C’est le viol sadique d’une religieuse, filmée non sans complaisance sur fond de musique religieuse, dans une esthétique qui rappelle le giallo italien, qui déclenchera cette prise de conscience.

Mais il est déjà trop tard. Bad Lieutenant se conclut sur un long plan fixe d’une voiture à l’arrêt dans une artère passante. J’avais vu le film à sa sortie en 1993 et cette scène là était restée gravée à jamais dans ma mémoire.

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Papillon ★☆☆☆

Henri Charrière dit Papillon a été condamné pour un meurtre qu’il a toujours nié aux travaux forcés à perpétuité en 1931. Déporté en 1933 en Guyane, il réussit à s’évader en 1944.
Ses mémoires, publiées en 1969, sont un best-seller. Elles sont portées à l’écran en 1973 avec Steve MacQueen dans le rôle de Papillon et Dustin Hoffman dans celui Louis Delga, son camarade d’infortune.

Pourquoi diable avoir fait le remake du film culte de  Franklin J. Schaffner ? Qui ne l’a pas déjà vu à l’occasion de l’une de ses innombrables rediffusions télévisuelles ? Qui ne se souvient pas des yeux bleus de Steve McQueen qui incarnait si bien la révolte contre l’erreur judiciaire – au même endroit où quarante ans plus tôt le capitaine Dreyfus avait été lui aussi injustement déporté – et la soif inextinguible de liberté ?

Papillon 2018 est une pâle copie du Papillon 1973. Plutôt que de s’en écarter, Michael Noer, un réalisateur danois auteur de deux films coups de poing R et Northwest, dont il y a fort à craindre qu’il soit allé perdre son âme à Hollywood, se contente de le décalquer. Les deux acteurs, Charlie Hunman (le héros de Sons of Anarchy) et Rami Malek, semblent moins avoir été choisis pour leur talent que pour leur ressemblance avec Steve McQueen et Dustin Hoffman.

Particulièrement horripilant pour l’auditoire français est l’américanisation des héros et des décors. Le film commence par une calamiteuse reconstitution en carton-pâte du Paris de l’entre-deux-guerres qui tire plus vers Moulin rouge que vers Quai des brumes. Tous les héros, supposément français, y parlent un anglais parfait. Ensuite, c’est la déportation en Guyane, filmée dans les décors naturels de la Croatie et du Monténégro… Ceci étant dit, le film de 1973 avait été filmé à Hawaï et à la Jamaïque.

Le seul intérêt de ce film : nous donner envie de (re)revoir le chef d’œuvre de Franklin J. Schaffner.

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Under the Tree ★★☆☆

Accusé d’adultère, Atli est mis à la porte de chez lui par sa femme. Il retourne s’installer chez ses parents vieillissants, qui ne se remettent pas de la disparition mystérieuse de son frère aîné. Un arbre dans leur jardin fait de l’ombre à celui de leurs voisins. La querelle bientôt s’envenime.

Contrairement à ce que laisse augurer sa bande-annonce, Under the Tree n’est pas une version islandaise de la comédie américaine Nos pires voisins. Tout au plus quelques scènes d’humour noir y prêtent-elles à sourire. Under the Tree est plutôt un film angoissant habité par une tension permanente, remarquablement écrit. Les frictions entre les parents d’Atli et leurs voisins se succèdent et s’accumulent, d’une gravité croissante. Leur point de départ peut sembler frivole : le faîtage d’un arbre fait de l’ombre à la terrasse des voisins qui aimeraient pouvoir y bronzer (on imagine qu’en Islande les bains de soleil sont rares).

On a tous connu un jour ou l’autre avec ses voisins une situation comparable : des nuisances sonores, visuelles, olfactives. Des hauts talons qui claquent dans l’appartement des voisins du dessus. Un étage surélevé qui nous bloque la vue sur la mer. Des poubelles jamais rentrées qui empuantissent l’allée. Selon qu’on est plus ou moins sensibles, on en fait une jaunisse ou contre mauvaise fortune bon cœur.

Under the Tree montre comment les choses lentement dégénèrent. Il le ferait avec d’autant plus d’efficacité s’il n’était pas handicapé par deux défauts. Le premier est l’histoire d’Atli avec sa femme, sans lien avec la querelle de voisinage de ses parents et qui occupe pourtant un bon tiers du film. La seconde est son dénouement inutilement gore qui décrédibilise la minutieuse horlogerie qui le précédait. Dommage…

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Une valse dans les allées ★☆☆☆

Christian est embauché comme manutentionnaire dans un supermarché. Bruno, le chef du rayon des boissons, prend en charge sa formation. Marion travaille au rayon confiseries. Christian s’en rapproche vite.

Une valse dans les allées n’est pas sans qualités. Il est d’abord servi par l’interprétation toute en nuances des deux comédiens en vogue du cinéma allemand : l’héroïne de Toni Erdmann (Sandra Hüller) et le héros de Transit (Franz Rogowski). Il raconte ensuite dans l’espace clos d’un supermarché sans âme, qui ne constitue a priori pas le cadre idéal d’une romance poétique, une histoire d’amour minimaliste. Il dépeint en filigrane une société est-allemande, ballottée entre précarité et déclassement, qui n’a toujours pas cicatrisé les plaies de la réunification.

Mais Une valse dans les allées a un défaut rédhibitoire : sa durée excessive. L’adaptation d’une courte nouvelle de vingt-cinq pages s’étire inutilement pendant plus de deux heures. Rien dans le scénario ou dans la mise en scène ne justifiait une telle longueur – à la différence par exemple du Poirier sauvage dont la durée participait de la raison d’être. Plus ramassé, plus dense, Une valse dans les allées aurait été un joli pas de danse. Inutilement dilué, il se condamne à n’être qu’une ennuyeuse pantomime.

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