Les Nuits blanches du facteur ★★☆☆

Au nord de la Russie. Tout au nord. Près du cercle polaire et de ses nuits blanches.

Le lieu, les images à couper le souffle, les thèmes (le capitalisme triomphant, la corruption, l’alcoolisme) : tout rappelle « Leviathan », l’extraordinaire film d’Andrei Zviaguintsev, un de mes coups de cœur de 2014.

Pourtant, ces nuits blanches n’en constituent qu’un fade succédané. La complaisance de Kontchalovski à l’égard du régime de Poutine n’a d’égal que la virulence des critiques de Zviaguintsev. Le second décrivait une Russie en pleine déréliction dostoievskienne ; le premier louche plutôt vers Tchekhov ou Gogol : une peinture teintée d’ironie bienveillante d’une société en mal de repères. Konchalovski pourrait avoir de moins solides références. Il pourrait aussi avoir plus d’ambition…

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Nos futurs ★★★☆

Deux camarades de lycée que la vie a séparés se retrouvent à la trentaine : l’un (Pierre Rochefort) est devenu trop sérieux, l’autre (Pio Marmaï) pas assez. Ils décident de réunir tous leurs anciens amis pour reconstituer à l’identique la mémorable soirée de leur dix-huitième anniversaire.

« Nos futurs » chemine sur les sentiers bien balisés de la nostalgie adulescente. On a le sentiment, confortable et paresseux, de retrouver les recettes des précédents films de Rémi Bezançon : « Ma vie en l’air », « Le premier jour du reste de ta vie »…

Mais, petit à petit, le film bifurque vers autre chose. Vers un film plus grave, plus macabre. Une réflexion plus adulte sur la mort. Quelques allusions auraient dû nous mettre la puce à l’oreille. On les déchiffre plus ou moins tardivement (en ce qui me confirme c’était plutôt plus !) jusqu’à un dénouement très surprenant, très réussi, très triste…

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La Rage au ventre ★☆☆☆

Dans « La rage au ventre » (traduction paresseuse de Southpaw), il est question, comme son titre en français ne l’indique pas, de boxe. Et pas de problèmes intestinaux.

Jake Gyllenhaal, l’acteur le plus imprononçablement sexy du moment, y confirme tout le bien qu’on pensait de lui – surtout depuis que je l’ai croisé au musée Picasso.

Capable de prendre dix kilos de muscle et de perdre dix kilos de graisse pour un rôle, il joue avec une conviction communicative le rôle de Billy Hope, un orphelin du Bronx devenu champion du monde à force de courage. Avec sa femme aimante et sa fille adorable, il vit une vie de nabab.

Mais il n’y a qu’un pas du Capitole à la Roche tarpéienne Ouh la la ! Ça, c’était une phrase furieusement décalée ! Dit plus simplement : il va accumuler les galères avant de se relever fièrement.

Le problème avec les films de boxe, c’est qu’après « Rocky », « Raging Bull » et « Million Dollar Baby », il est difficile sinon impossible d’ajouter quoi que ce soit.

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Sur la ligne ★★★☆

L’action se déroule en 1984 en Tchécoslovaquie. Anna court le 200 mètres et espère se qualifier pour les prochains JO. Mais, à l’époque communiste, le sport n’était pas une activité innocente. Le prestige du bloc communiste était en jeu. Tous les moyens étaient bons, dopage compris, pour faire triompher les athlètes.

« Sur la ligne » (traduit du tchèque « Fair play ») traite donc de deux sujets.
Premièrement le dopage dans le sport – qui n’avait à ma connaissance jamais été évoqué au cinéma et qui le sera quelques mois olus tard dans le film de Stephen Frears consacré à Lance Armstrong.
Deuxièmement la vie à l’époque communiste, la misère triste et grise, la police omniprésente, l’étouffement…

« Sur la ligne » n’égale pas « La vie des autres » ou « Barbara ». Mais sa matière est si riche, les dilemmes moraux qu’il expose si déchirants que sa facture télévisuelle ne réussit pas à le vider de son intérêt.

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Mission: Impossible – Rogue Nation ☆☆☆☆

Il y a vingt ans, j’adorais les James Bond, les Mission Impossible, les Jason Bourne…
Mission Impossible 5 – que les producteurs n’osent plus désigner par son numéro de série – m’a fait bailler d’ennui.
Est-ce moi qui ai vieilli ? Suis-je arrivé à un âge où ce genre de films ne m’excite plus ? parce que j’en ai trop vus ? ou parce que je n’ai plus la bonne capacité à m’enthousiasmer / acuité visuelle / masse capillaire / production de testostérone ?

Ethan Hunt est aux prises avec une inquiétante organisation internationale qui s’emploie à déstabiliser le monde. Son nom ? le sceptre était déjà pris ; du coup les producteurs ont opté pour « le Syndicat ».
Le méchant : un ancien du MI6 (Never Trust the Brits!) passé du côté obscur de la force.
La James Bond Girl : une Suédoise inconnue mais solidement customisée qui déambule en talons de 14 cm sur les toits de l’Opéra de Vienne.
Le héros : l’immarcescible Tom Cruise, 52 ans au compteur, fait des acrobaties de jeune homme. Sauf qu’on s’en fout ! Il décolle sur les ailes d’un A400 M ? il manque mourir en apnée ? Il fait une course poursuite en moto ? Zéro suspense. Parce qu’on connaît déjà la fin.

J’invite à déjeuner celui/celle qui me dira que : 1/ que je ne suis pas vieux 2/ ce film est bien une daube dépourvue d’intérêt.

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Derrière le mur la Californie ★★★☆

Vous aimez l’histoire contemporaine ? l’Allemagne ? le skate board ? la coupe de cheveux Vokuhila (vorne kurz hinten lang) ? Alors vous aimerez ce docu d’outre-Rhin « Derrière le mur » qui raconte l’histoire du skate board en RDA

Je vous entends d’ici : « L’histoire du skate board en RDA ????? » Oui ! Absolument !

Ou comment à travers la pratique d’un sport manifester le dégoût d’un système qui étouffe la liberté humaine.

Le réalisateur retrouve une bande de skateurs. Ils avaient 15 ans en RDA dans les années 80. Ils s’ennuyaient en bas de HLM déshumanisés. Ils refusaient de devenir des athlètes anabolisés pour la plus grande gloire du socialisme.

Le documentaire écoute leurs témoignages, illustrés de films en Super-8. Il s’attache au plus charismatique d’entre eux, Dennis alias Panik, un démon à la figure d’ange, dont on apprend vite le destin tragique.

Comme « Red Army » – qui revenait sur les grandes heures du hockey sur glace soviétique – « Derrière le mur » parle de la grande histoire en nous en racontant une petite. Ce n’est pas la manière la plus idiote de le faire. Ce n’est certainement pas la plus désagréable.

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Youth ☆☆☆☆

L’opinion qu’on a d’un film peut varier selon le moment auquel on l’exprime. Certains sont des chemins de croix qui, à la réflexion, se révèlent des chefs d’œuvre. D’autres qui font passer un bon moment tombent dans un puits d’oubli la semaine suivante. Youth de Paolo Sorrentino relève d’une troisième catégorie : la supercherie.

En sortant de la salle, je criais au chef d’œuvre. Le jeu des acteurs, la splendeur des décors, la morale tendre et cruelle de l’histoire m’avaient enthousiasmé. Mais à la réflexion la baudruche se dégonfle.

Certes Youth est constellé de quelques plans joliment troussés – pour la plupart hélas déjà éventés dans la BO. Mais Michael Caine et Harvey Keitel, en vieilles gloires revenues de tout, cabotinent. Et que dire du sujet même du film ? Ode au renoncement ? À la vie ? À la mort ? La cohérence des personnages est rompue par les deux décisions incompréhensibles qu’ils prennent l’un et l’autre à la fin du film.

Ceux qui ont aimé La Grande Bellezza y trouveront-ils néanmoins leur compte ? Même pas. La Grande Bellezza était un hymne aux merveilles artistiques de l’Italie ; Youth est tout au plus une brochure publicitaire pour l’hôtellerie suisse !

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La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil ★★☆☆

Japrisot a écrit au début de sa carrière des petits polars malins : « Adieu pour Cendrillon », « Compartiment tueurs »… Joann Sfar est un auteur de bande dessinée passé derrière la caméra pour y adopter son Chat du rabbin. La rencontre des deux n’allait pas de soi.

Le roman de Japrisot repose sur une énigme : Dany est-elle folle ? Sa cavale en Thunderbird sur la Riviera est-elle fantasmée ? Joann Sfar prend le partie d’une adaptation très stylisée, à la limite du clip video.

Il est servi par le choix de son héroïne, la bombissime Freya Mavor. Ami masculin, tape son nom sur Google Images … et reviens me remercier en bavant ! Amie féminine, tu as le droit aussi de le faire… mais épargne moi tes commentaires jaloux !

Mais le clip dure 1h33, connaît des baisses de régime et déçoit à sa conclusion.

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Coup de chaud ★★★★

Voilà un film français passé inaperçu, plombé d’avance par sa date de sortie au milieu de l’été 2015. Pourtant « Coup de chaud » a de quoi séduire.

On est dans un petit village du Lot-et-Garonne écrasé par la chaleur d’un été sans pluie. On pourrait être dans un western ou sur une scène de théâtre.
Une dizaine de personnages solidement campés : un maire bonhomme victime de sa gentillesse (Jean-Pierre Darroussin), une agricultrice en colère (Carole Franck), un artisan récemment arrivé (Grégory Gadebois) et Joseph (Karim Leklou, César du meilleur espoir 2015), l’idiot du village qui n’a jamais fait de mal à un chat mais qui met tout le monde mal à l’aise.

Le film décrit un fait divers, un engrenage stupide et fascinant. Sans jamais verser dans le manichéisme. La chronique sociale se double d’un whodunit qui nous tient en haleine.
Et la fin du film donne lieu à de belles questions : « et toi qu’aurais tu fait ? »

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La Niña de Fuego ★☆☆☆

La Niña de fuego nous arrive d’outre-Pyrénées précédé d’une réputation flatteuse. Pour Almodovar c’est la « révélation du siècle ». Pas moins !

Et il est vrai que cette Niña-là rappelle les derniers films du maître. Même ambiance glacée que dans La Piel que habito ; même scenario compliqué que dans Étreintes brisées.

Mais la comparaison s’arrête là hélas. Car ce qui marche si bien chez Almodovar ne fonctionne jamais chez Vermut. La froideur des personnages et des situations nous réfrigère sans nous glacer. La complexité du scenario – pour ne pas dire ses invraisemblances – nous égare sans nous stimuler.

Merci au bon Samaritain qui m’expliquera le dénouement auquel je n’ai rien compris !

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