« Rocco » c’est d’abord une grosse b…lessure d’amour propre pour le spectateur masculin. Le nu frontal de la première scène aura eu raison de son orgueil. Rocco est sans conteste un acteur hors catégorie. Et si les documentaristes Thierry Demaizière et Alban Teurlai (auxquels on doit le récent Relève tout à la gloire de Benjamin Millepied) réussissent à ne pas filmer de scènes qui les exposeraient à une interdiction au moins de dix-huit ans, un classement -16 ans les autorise à ne rien cacher du glorieux appendice de l’étalon transalpin.
Mais « Rocco » c’est surtout un double malaise.
D’une part le malaise d’être allé le voir dans une salle obscure au milieu d’un auditoire à 95 % masculin et solitaire. Et le malaise d’en parler ici, tiraillé entre l’honnêteté intellectuelle d’en rendre compte comme je rends compte des autres films que je vais voir au cinéma et la gêne de confesser des choix cinématographiques qui révèlent le cochon qui sommeille en moi (et en chacun d’entre nous ?)
D’autre part le malaise exactement symétrique du bourgeois horrifié et un peu bégueule. Car « Rocco » est un film profondément dérangeant. De quoi s’agit-il ? D’un pauvre Italien un peu perturbé du (gros) zizi, qui voue à sa défunte mère un respect morbide, qui a rencontré sa femme sur un tournage et qui demande devant la caméra à ses garçons, manifestement mal à l’aise avec le sujet, si la renommée de leur père les dérange. De son cousin qui lui sert tout à la fois de caméraman, de garde du corps et de souffre-douleur.
Et de femmes. De toutes ces femmes. La force de caractère de certaines force l’admiration : telle la star du porno Kelly Stafford qui explique, selon une logique toute hégélienne, que l’esclave soumise qu’elle se plaît à jouer est en fait le maître de son maître. Mais la vulnérabilité des autres émeut ou écœure : elle cette malheureuse débutante tchèque, aux seins pas encore siliconés, à la dentition imparfaite, à l’anglais rudimentaire, qui, pour décrocher un rôle, affirme crânement accepter toutes les pratiques mais qu’on sent terrifiée avant sa première DP.