La quarantaine bien entamée, Rashi est flic à Tel Aviv. Il effectue consciencieusement son travail dans des conditions pas toujours faciles. Sous ses dehors placides, il est particulièrement ébranlé d’avoir été mis à pied suite à une enquête interne de l’inspection des polices pour abus d’autorité sur mineur.
Rashi est marié à Avigail. La jeune femme a eu une fille d’un premier lit qui vit avec le couple. La cohabitation n’est pas toujours fluide entre le beau-père et sa belle-fille. Et les difficultés du couple à avoir ensemble un enfant révèlent des tensions qui menacent de dégénérer.
Chained est un film éprouvant. De la première scène – où l’on voit Rashi et son acolyte interpeler un père violent – jusqu’à la dernière – dont on ne dira rien – on sera scotché à son fauteuil et très mal à l’aise. On s’étonne d’ailleurs que la commission de classification ait délivré un visa tous publics sans aucun avertissement – là où l’inoffensif Lucky Strike que j’ai chroniqué hier écopait d’une sévère interdiction aux moins de douze ans.
Chained est construit selon un procédé simple mais terriblement efficace : sans aucun temps mort, sans aucune respiration, chaque scène raconte jusqu’à l’épuisement une dispute, plus ou moins violente. C’est d’abord, on l’a dit, Rashi dans son métier, qui arrête un père de famille ou qui procède à la fouille d’adolescents suspectés de vendre de la drogue. C’est ensuite Rashi et sa belle-fille avec laquelle il se montre trop protecteur, lui interdisant toute sortie, ce qui stimule en retour l’esprit de rebellion de l’adolescente. C’est enfin Rashi et Avigail dans leur PMA infructueuse et dont le couple se défait inexorablement.
Rashi est au centre de chacune de ses disputes, qu’il les provoque ou qu’il les subisse. Le personnage est ambivalent, servi par l’interprétation impeccable de Eran Naim. Son physique, de gros nounours tendre, est plutôt rassurant ; mais on sent en lui une violence qui ne demande qu’à éclater. Sans être un saint, il n’est ni un flic ripoux, ni un beau-père abusif ni un mari violent. La richesse du personnage vient précisément de son ambiguïté.
Chained est le premier volet d’un diptyque. Beloved sortira sur les écrans mercredi prochain. Il est filmé du point de vue d’Avigail. Je courrai le voir.