Le Crime du père Amaro (2002) ★★☆☆

À peine sorti du séminaire, un jeune prêtre (Gael Garcia Bernal) prend son premier ministère dans une petite ville mexicaine. Protégé par son évêque, il est placé sous la coupe du père Benito, un vieux prêtre expérimenté. Amaro découvre bientôt que Benito vit maritalement avec une paroissienne et qu’il utilise l’argent des narco-trafiquants pour construire un hôpital. Mais lui-même n’est pas irréprochable qui tombe  sous le charme de la jeune Amelia. Pendant ce temps, un troisième prêtre, le père Natalio, acquis à la Théologie de la libération, mène une vie frugale dans les montagnes avec les paysans, qui l’expose aux critiques de sa hiérarchie.

Le Crime du père Amaro est l’adaptation d’un roman écrit à la fin du XIXème siècle par le grand romancier portugais Eça de Queirós. Carlos Carrera a choisi d’en transposer le sujet à l’époque contemporaine. Bien lui en a pris ; car les enjeux du roman sont intemporels.

Sans jamais sombrer dans le manichéisme, il présente trois hommes d’Église qui, chacun à leur façon, répondent aux dilemmes auxquels la vie les a confrontés. En prêtre-guerillero, Natalio est le personnage le plus pur, et aussi le moins fouillé. Amaro est censé être le personnage central de l’histoire. C’est avec lui que le film commence et c’est avec lui qu’il se termine une fois conclue la poignante histoire d’amour avec Amelia (la jeune Ana Claudia Talancon, belle comme le jour, à laquelle on aurait volontiers promis une splendide carrière mais qui hélas n’a pas confirmé ces promesses).

Pourtant, c’est le père Benito qui est le personnage le plus intéressant. Sa richesse vient de son ambiguïté. Il n’est pas un saint comme le père Natalio tout entier dévoué à ses pauvres ouailles ; mais il n’est pas non plus un salaud comme s’avère l’être tout bien considéré le père Amaro, ivre d’égoïsme et d’ambition. C’est un homme tout simplement qui voudrait faire le bien (assister une veuve éplorée, construire un hôpital…) mais doit pécher pour y parvenir.

Désormais disponible sur Netflix, le film est sorti en 2003. Il a été accueilli par une moisson de récompenses aux Ariel, les Oscars mexicains. Il est passé inaperçu en France. Son classicisme intemporel le met pourtant à l’abri des années qui passent.

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Bird Box ★☆☆☆

Une femme et deux enfants descendent à leurs risques et périls une rivière les yeux bandés pour fuir un terrible fléau.
Cinq ans plus tôt, Malorie (Sandra Bullock) était une femme indépendante, enceinte de six mois, inconsciente du danger qui menaçait la planète, en chemin vers sa deuxième échographie avec sa sœur.

Bird Box est un film d’un genre que j’aime tout particulièrement : le survival post-apocalyptique. La Route, 28 jours après, Les Fils de l’Homme, L’Armée des douze singes ou Mad Max comptent parmi mes films préférés et sont construits sur la même trame : après une épidémie/une invasion d’extra-terrestres/ une guerre nucléaire, un héros courageux survit dans l’adversité. D’ailleurs, mon achat compulsif de PQ mi-mars s’explique en grande partie par la sur-consommation de ce genre de films et les peurs tapies qu’elle a fait naître.

Bird Box a deux qualités. Une première demi-heure trépidante, filmée sous la forme d’un flash-back qui raconte les premières heures de la catastrophe – ce que, notons-le, les films précités traitent souvent par euphémisme. Un danger qui se répand sous une forme pernicieuse et contre lequel le seul remède semble être l’occultation de la vue.

Mais ce sont là les seules et uniques qualités du film qui compte, sinon, bien des défauts qu’un bouche-à-oreille calamiteux s’est empressé d’épingler lestant Bird Box d’une bien mauvaise réputation.

Le principal est de sortir six mois seulement après Sans un bruit – mon film préféré de l’année 2018 – et d’en reproduire quasiment à l’identique le schéma sans en posséder les qualités : ici, on se cache les yeux pour éviter des visions suicidaires, là on évitait le moindre bruit pour tromper des créatures aveugles mais hyperacousiques.

Le deuxième est, comme dans une vulgaire sitcom, de réunir un échantillon d’humanité dans une maison cadenassée (un propriétaire misanthrope interprété par le détestable John Malkovich, un Noir en surpoids dont on sait qu’il sera bientôt sacrifié, un mâle séduisant dont Malorie tombera immanquablement amoureuse, un rescapé de la dernière heure dont le comportement louche suscite la défiance de ses compagnons, etc.). On sait par avance, puisqu’on vient de voir cinq ans plus tard Malorie livrée à elle-même, qu’ils mourront à tour de rôle. Reste à découvrir comment…

Le dernier est peut-être la nature du danger contre lequel les survivants doivent se prémunir. Il altère les pupilles, dans un mauvais effet spécial, des humains qui s’aventurent à le regarder. Il restera jusqu’au bout mystérieux. Sa seule manifestation : un gros ventilateur qui brasse les feuilles.

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La Ballade de Buster Scruggs ★★☆☆

Annoncé au départ comme devant former une mini-série de six épisodes d’une heure chacun, La Ballade de Buster Scruggs est finalement un film à sketchs de deux heures. On y croise un as de la gâchette amateur de bel canto, un braqueur de banque malchanceux, un homme-tronc et son impresario, un chercheur d’or têtu, une jeune femme en route vers l’Oregon et cinq voyageurs dans une diligence.

La soixantaine passée, les frères Coen se font rares. Leur célébrité remonte aux années 90 avec Barton Fink, Palme d’or à Cannes en 1991, et Fargo en 1997 ; mais elle ne se dément pas dans les années 2000 avec sans doute leur meilleur film No Country for Old men, Oscar du meilleur film et des meilleurs réalisateurs (au pluriel) en 2008. En revanche, on les voit moins depuis quelque temps : Inside Llewyn Davis remonte à 2013 et Ave, César !, leur dernier film au cinéma en 2016 était un échec.

On attendait beaucoup de leur collaboration avec Netflix – même si on pestait in petto de ne pas voir leur réalisation en salles. Une mini-série était annoncée ; finalement ce fut un film à sketchs annoncé dans un communiqué de presse plein d’humour : « Nous avons toujours aimé les films à sketchs, surtout les films italiens des années 1960, qui mettent côte à côte les œuvres de différents réalisateurs ­autour d’un même thème. Nous avons ­essayé de faire la même chose en écrivant un western à sketchs, dans l’espoir de s’entourer des meilleurs réalisateurs du moment. Par chance, ils ont tous les deux accepté de participer. »

À la différence des films italiens des années soixante qui agglutinaient des séquences très inégales, les six sketches de La Ballade de Buster Scruggs (ce titre renvoie en fait au premier sketch) frappent par leur homogénéité. On retrouve dans chacun le soin apporté à l’image, presque soyeuse, de la nature sauvage du Wild West, à l’interprétation qui rassemble quelques-unes des stars les plus connues de l’époque (James Franco, Liam Neeson, Brendan Gleeson…) et surtout cet humour noir si particulier qui distingue les films des frères Coen.

Comment le qualifier ? Même si la mort y a souvent maille à partir, il ne s’agit pas à proprement parler d’humour noir. Il ne s’agit pas non plus d’un humour cynique, grinçant ou sardonique à la Tarantino. Car il s’y glisse une part non négligeable de tendresse et de douceur.

La Ballade de Buster Scruggs se déguste gentiment, au rythme d’un cheval qui cheminerait au pas. Confortablement installé devant sa télévision, on peut, entre chaque épisode, interrompre sa vision pour aller faire autre chose. Plus de deux heures s’écoulent lestées de quelques pauses additionnelles. La Ballade de Buster Scruggs n’aura pas révolutionné le cinéma, mais aura fait passer un bon moment.

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Une femme dont on parle (1954) ★★☆☆

Une veuve dirige à Kyoto un okiya, une maison de plaisirs. Sa fille, partie vivre à Tokyo, est obligée d’en revenir après un chagrin d’amour. Un conflit de génération oppose les deux femmes qui tomberont sans le savoir amoureuses d’un même homme, le jeune médecin de l’okiya.

Kenki Mizoguchi est surtout connu pour ses films historiques : Les Contes de la lune vague après la pluie, L’Intendant Sansho, Les Amants crucifiés… Mais une partie de sa prolifique filmographie a pour cadre le Japon contemporain.

Il a souvent filmé les geishas. Elles sont pour lui le symbole intemporel de la condition féminine. Mais elles sont en même temps les actrices d’un Japon qui change.

Cette ambiguïté est à l’oeuvre dans Une femme dont on parle qui met face à face une mère et sa fille. Abandonnée à elle même à la mort de son mari, la mère a dû se résigner à diriger un établissement pour survivre et éduquer sa famille. La fille réprouve cette profession qu’elle juge dégradante. Les deux femmes, obligées de cohabiter, feront le constat de leur désaccord et découvriront le moyen de les dépasser.

Un extrait

La Sapienza ★★☆☆

Il y a deux façons de considérer La Sapienza d’Eugène Green.
L’une est de détester un film totalement artificiel où les personnages, leur diction empruntée, leur raideur ampoulée, leurs états d’âme embourgeoisés feraient passer Rivette ou Rohmer pour des boulevardiers putassiers.
L’autre est au contraire d’applaudir un chef d’œuvre de sensibilité, un merveilleux voyage dans l’Italie de la Renaissance, des bords du Lac Majeur aux terrasses de la Villa Médicis, au son de la musique sublime (forcément sublime) de Monteverdi.

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Bricks ★☆☆☆

La crise des subprimes en Espagne filmée de trois points de vue. Une usine de briques condamnée à détruire sa production faute de réussir à l’écouler. Une Équatorienne et sa fille menacée d’expulsion qui réussit, grâce à la solidarité des membres de la Plateforme des victimes du crédit, à obtenir l’annulation de sa dette immobilière. Les tentatives désespérées du maire d’une nouvelle ville, construite en plein boom économique mais quasi désaffectée suite à la crise, de lui donner un semblant de vie.

Quentin Ravelli est sociologue au CNRS. Après une thèse sur l’industrie pharmaceutique soutenue en 2012, il s’est intéressé à l’Espagne plongée en pleine crise économique. De ses recherches il a tiré un livre Les Briques rouges. Dettes, logement et luttes sociales en Espagne, et un film Bricks.

La double démarche de ce chercheur en sciences humaines était stimulante. Elle ne convainc pas. Car le documentaire qu’il nous livre ne se distingue pas de la foule de ceux qui inondent nos écrans au risque de l’embolie. Alors que le jeune docteur avait probablement une foultitude de connaissances à nous faire partager sur la crise hypothécaire, ses origines, ses manifestations, ses éventuels remèdes, il ne nous en dit rien, satisfaisant à la sacro-sainte posture de l’enquête silencieuse, se contentant de filmer sans rien expliquer. Quel contraste par rapport aux documentaires américains Inside Job ou Capitalism: A love story qui, eux, se donnaient la peine d’expliquer les ressorts de la crise de 2008.

Le titre nous laisse penser que le documentariste va utiliser la métaphore de la brique pour nous raconter la crise. Belle idée hélas à demie exploitée. Ce n’est guère que le tiers de Bricks qui est consacré aux briques. Encore en parle-t-il sans en dire un mot puisque les plans tournés dans une usine de briques de Castille sont silencieux. On suit la fabrication des briques… et leur mise au rebut. Belles images filmées avec une paradoxale poésie et habillées dans une musique originale. Mais aucune explication sur ce dysfonctionnement absurde d’un capitalisme cul par dessus tête.

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Brooklyn Yiddish ★★☆☆

Dans la communauté juive orthodoxe de Brooklyn, Menashe vient de perdre sa femme. Il ne peut conserver la garde de son fils, Ruben, confié à la famille de son beau-frère, tant qu’il ne s’est pas remarié. Il s’insurge contre cette loi inique et obtient du rabbin le droit de passer une semaine avec son fils.

Quel bon titre ! Brooklyn Yiddish résume tout en deux mots : un film qui se déroule à Brooklyn et dont les dialogues sont en yiddish. Curieux quartier new-yorkais qui, sous la caméra de Joshua Z. Weinstein (un patronyme dur à porter par les temps qui courent), apparaît d’une étonnante homogénéité culturelle. Curieux idiome aux accents gutturaux, mélange d’allemand, de polonais, de slave.

Pour autant, il ne s’agit pas de radiographier une communauté. Comme Amos Gitai dans Kaddosh, le réalisateur resserre son attention sur un homme. Menashe est un sympathique loser. Ce gros nounours attendrissant – on dirait Gergory Gadebois avec papillotes et tsitsit – vit seul dans un appartement crasseux et exerce un petit boulot de manutentionnaire dans une épicerie du quartier dirigée par un patron sadique. Nulle héroïsation sous la caméra de Joshua Weinstein : Menashe n’est ni sympathique ni antipathique, ni rebelle, ni zélote. Il n’entend pas rompre avec sa communauté. Il n’a qu’un désir : se rapprocher de son fils qu’il voit grandir sous un toit étranger et mal-aimant. Il y parviendra sans tambour ni trompette jusqu’à une conclusion qui laisse les options ouvertes.

Brooklyn Yiddish n’a au fond qu’un seul défaut paradoxal : sa modestie qui le prive du souffle et de l’émotion qui m’auraient volontiers emporté.

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Le Jeune Karl Marx ★☆☆☆

En 1844, Karl Marx a vingt-six ans à peine. C’est un jeune homme fougueux dont les écrits contestataires lui valent d’être emprisonné dans les geôles allemandes. Il prend le chemin de l’exil avec sa jeune épouse Jenny et son enfant. À Paris il fait la connaissance de Friedrich Engels. Les deux hommes partagent la même révolte contre la misère des temps et le même désir de les changer par la force de leur pensée. Face aux autorités qui les persécutent, face à leurs compagnons de lutte dont ils ne partagent pas toujours les idées, ils créent ensemble les prémisses d’un parti communiste et en rédigent le manifeste.

Tant de crimes ont été commis en son nom au vingtième siècle que personne n’oserait défendre Karl Marx aujourd’hui. Sauf Raoul Peck. Inclassable cinéaste originaire de Haïti – dont il fut le ministre de la culture – qui grandit au Congo et se forma à Berlin avant de réaliser une œuvre militante. L’Homme des quais, son premier long métrage, est une chronique des années Duvallier. Lumumba est une ode à la gloire du politicien congolais qui mourut sous la torture. I am not your Negro est une adaptation d’un essai militant de l’activiste afro-américain James Baldwin.

On aurait pu craindre que ce biopic tourne à l’hagiographie. Ce n’est pas le cas. Parce qu’on ne connaît guère de lui que la photo d’un homme d’âge mur, engoncé dans un costume bourgeois, on n’imagine pas Karl Marx jeune. Interprété par August Diehl, aussi à l’aise en allemand qu’en français et en anglais – dans une Europe dont les élites n’étaient pas moins polyglottes que ne le sont celles d’aujourd’hui – Karl Marx est sympathique. On le voit travailler, réfléchir, frotter le cuir de ses théories à celles de Proudhon ou de Bakounine. On le voit aussi jouer aux échecs, fumer et boire jusqu’à l’ivresse. Les scènes traditionnelles de bordel – qui sont pourtant un passage obligé de ces restitutions d’époque – nous sont épargnées.

Reste néanmoins un malaise distillé par le générique de fin. Sur une musique de Bob Dylan, Raoul Peck n’a pas résisté à la tentation de montrer quelques images des grandes figures qu’a inspirées le marxisme : Patrice Lumumba bien sûr, mais aussi Che Guevara, Mandela ou les Anonymous de Occupy Wall Street. Or, quitte à clore le film par une anthologie, il aurait fallu qu’elle soit complète. L’oubli dans lequel sont laissés  les descendants les plus funestement illustres de Karl Marx (Staline, Mao, Pol Pot…) jette un doute sur l’objectivité de son auteur.

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Le Labyrinthe du silence ★★☆☆

À Francfort, à la fin des années cinquante, un jeune procureur enquête sur les crimes contre l’humanité commis à Auschwitz. Dix ans après le procès de Nuremberg, c’est la première fois que la justice allemande accepte de regarder son passé en face.

Le cinéma allemand – ou du moins celui qu’on connaît en France – n’en finit pas de revisiter l’histoire contemporaine : La Vie des autres, Good Bye, Lenin !, Barbara, Phoenix, Fritz Bauer, un héros allemand, Elser, un héros ordinaire, L’Œuvre sans auteur, La Révolution silencieuse, Le Vent de la liberté … La liste est longue.

Le Labyrinthe du silence révèle une monstruosité : en 1958, le nom d’Auschwitz ne signifiait rien à la majorité des Allemands (de l’Ouest). La priorité était à la reconstruction. Elle nécessitait de tourner la page du passé et de taire la compromission des Allemands dans les crimes nazis.

Le Labyrinthe du silence raconte la préparation du procès de Francfort de 1963-1965 qui a révélé à l’opinion publique allemande le génocide juif et la responsabilité des soldats allemands dans son exécution.

Pour donner plus de force à son sujet, le réalisateur a fondu les figures des trois procureurs en une seule : un jeune et brillant juriste, épris de vérité, mais dont le passé familial cache de lourds secrets.

Le film est d’un classicisme éprouvé, suivant méthodiquement les étapes de l’enquête judiciaire, avec son lot de gentils (la fraîche fiancée, la secrétaire dévouée…) et de méchants (l’opportuniste procureur en chef, le méchant Nazi reconverti dans l’industrie…). Il relève la gageure de filmer les témoignages des survivants – témoignages archi-connus dont la répétition aurait fatalement lassé – sans leur laisser la parole : la caméra s’éloigne de la salle, la musique se fait plus grave, la porte se referme… jusqu’à ce que la greffière ne la rouvre, écrasée par le chagrin des confessions qu’elle vient de retranscrire.

Cette mise en scène trop classique, le jeu des acteurs trop lisse, l’histoire trop manichéenne sont les écueils que ce sujet en or ne parvient pas à éviter.

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Kingsman : Le Cercle d’or ★☆☆☆

Eggsy (Taron Eggerton), le jeune Londonien sorti du ruisseau par l’élégant Harry Hart (Colin Forth), lui a succédé au sein de Kingsman, un club britannique très secret chargé de défendre la paix dans le monde.
Mais depuis sa base secrète, la machiavélique Poppy Adams (Julianne Moore) a conçu un plan monstrueux. Pour l’arrêter, Kingsman devra se rapprocher de ses cousins d’Amérique.

Kingsman, la suite. Le premier opus était rafraichissant : une parodie de James Bond chorégraphiée comme un wu xia pan. Son succès a entraîné, hélas, le lancement d’une suite. Mais les ingrédients qui avaient contribué au succès du premier film ne fonctionnent plus dans le deuxième. Il reposait sur un ressort simple : le choc de deux cultures, celle très Saville Row de Colin Firth avec celle, plus cockney, de Taron Egerton. Il utilisait une recette qui a fait ses preuves : le recrutement d’un nouvel agent et les différentes épreuves initiatiques qu’il doit franchir.

Rien de tel n’est possible dans le deuxième tome. Taron Egerton a déjà été recruté. La kaïra de banlieue s’est déjà transformée en élégant 007 – et s’est même fiancée avec une bombissime princesse suédoise. Pour faire fonctionner le scénario, il faut trouver autre chose. Le réalisateur est allé le chercher au fond du Cambodge (suscitant le courroux du royaume khmer et la censure du film dans ce pays) avec une méchante hors pair : Julianne Moore s’en donne à cœur joie dans le rôle d’une baronne de la drogue affublée de quelques gadgets aussi high tech que meurtriers (des dogues cybernétiques, un hachoir géant, une pandémie mondiale… et Elton John dans son propre rôle). Chacune de ses apparitions est hilarante. Mais cela ne suffit pas à maintenir l’intérêt pendant plus de deux heures.

Kingsman 2 a coûté cent millions de dollars. Il en a rapporté trois fois plus. Une suite est déjà prévue. Hélas.

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