Chez les Pianelli, on est kiosquière de mère en fille. Alexandra, la petite dernière, a eu beau aller faire une école d’art à Strasbourg, son destin l’a rattrapée : pour joindre les deux bouts, elle donne un coup de mains à sa mère dans le kiosque que tenaient avant elle sa grand-mère et son arrière grand-mère, place Victor-Hugo dans le cossu seizième arrondissement de Paris. Elle y filme avec son téléphone portable les clients qui passent et la vie qui va.
Le Kiosque est un documentaire minuscule, qui n’est pourtant pas dénué d’ambition. Il raconte deux histoires : la grande et la petite.
La grande, c’est l’histoire de l’inexorable déclin des kiosques à journaux et de la presse écrite, victimes de la concurrence d’Internet. Qu’on soit parisien ou provincial, on pourra tous témoigner du phénomène : il y avait jadis trois kiosquiers place du Palais-Royal, où j’allais religieusement acheter chaque jour à 14h30 Le Monde ; il n’y en a plus qu’un seul – et je me suis abonné au Monde en ligne.
La petite, c’est celle des clients qui défilent : le chauffeur de l’ambassade d’Allemagne qui vient chaque matin récupérer son paquet, le clodo qui a perdu son chat, le voisin qui a déjà un coup dans le nez à dix heures du matin, la retraitée permanentée toujours très chic mais pas dénuée d’autodérision…. Cette galerie baroque est attachante.
La petite histoire c’est celle de la vie du kiosque, des horaires dingues, du local minuscule ouvert aux quatre vents, du flux des arrivées et des invendus et de la paperasserie qu’il génère. C’est enfin celle de la faillite inéluctable qui menace.
Au doigt (très) mouillé, Le Kiosque a dû coûter environ dix secondes du budget du dernier James Bond. Pourtant, j’aurai pris plus d’intérêt et de plaisir à le voir.