Luc Hermann, codirigeant de l’agence Premières Lignes, une société de production spécialisée dans le journalisme d’investigation notamment productrice de Cash Investigation sur France 2, et Valentine Oberti, journaliste à Mediapart passée par Cash Investigation ou Quotidien sur Canal, ont réalisé en quelques mois à peine ce documentaire dont la sortie à la mi-février a coïncidé avec les travaux de la commission d’enquête du Sénat sur la concentration des médias.
Ils y dénoncent le danger que fait peser sur la démocratie la concentration des médias français, de la presse écrite et audiovisuelle, entre les mains de quelques milliardaires.
Découpé en trois chapitres (les incendiaires, les barbouzes et les complices), le documentaire se présente, au risque de l’éparpillement voire du hors sujet, comme une succession de mini-reportages d’une dizaine de minutes chacun.
Media Crash montre comment les chaines de Vincent Bolloré, C News et D8, ont servi de rampe de lancement aux idées d’extrême-droite et à la campagne d’Eric Zemmour. Il montre aussi les pressions que le milliardaire s’est autorisées sur Le Monde quand le quotidien du soir a publié une enquête dénonçant ses opérations en Afrique.
De longs développements sont également consacrés à Bernard Arnault, le président de LVMH, et sur la façon dont, avec l’aide de l’ancien patron des RG, Bernard Squarcini, il a en 2013 bâillonné François Ruffin, qui dirigeait à l’époque le journal Fakir et tournait Merci patron !. Un reportage montre les pressions qu’il exerce sur Tristan Waleckx, un journaliste parti enquêter en Roumanie sur les sous-traitants du maroquinier de luxe.
Une dernière séquence – dont on peine à comprendre le lien avec le sujet du documentaire – raconte les difficultés rencontrées par Valentine Oberti, accusée de mettre en cause la sécurité nationale, pour enquêter sur les ventes d’armes françaises à l’Arabie saoudite et leur utilisation au Yémen contre des cibles civiles.
Les faits que Media Crash documentent sont choquants. Ils révèlent les dérives que la concentration des médias aux mains de quelques capitaines d’industrie autorise. Pour autant, comme le montre d’ailleurs honnêtement ce documentaire, les pressions exercées par les Bolloré ou Arnault rencontrent des résistances : plusieurs reportages du service public de France Télévisions ont finalement été diffusés sans changement malgré les interventions pressantes visant à les censurer.
En affirmant « Il y a ce que vous voyez, ce que certains souhaitent que vous voyiez, et ce que vous ne voyez pas », Media Crash jette la suspicion sur l’ensemble des médias, encourage la défiance et nourrit le complotisme.