Sur la ligne ★★★☆

L’action se déroule en 1984 en Tchécoslovaquie. Anna court le 200 mètres et espère se qualifier pour les prochains JO. Mais, à l’époque communiste, le sport n’était pas une activité innocente. Le prestige du bloc communiste était en jeu. Tous les moyens étaient bons, dopage compris, pour faire triompher les athlètes.

« Sur la ligne » (traduit du tchèque « Fair play ») traite donc de deux sujets.
Premièrement le dopage dans le sport – qui n’avait à ma connaissance jamais été évoqué au cinéma et qui le sera quelques mois olus tard dans le film de Stephen Frears consacré à Lance Armstrong.
Deuxièmement la vie à l’époque communiste, la misère triste et grise, la police omniprésente, l’étouffement…

« Sur la ligne » n’égale pas « La vie des autres » ou « Barbara ». Mais sa matière est si riche, les dilemmes moraux qu’il expose si déchirants que sa facture télévisuelle ne réussit pas à le vider de son intérêt.

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La Fille du train ★☆☆☆


Rachel se remet difficilement d’un divorce douloureux. Elle passe tous les jours en train devant son ancienne maison qu’occupe désormais son ex-mari, sa compagne et leur bébé. Juste à côté, une autre maison abrite un jeune couple dont Rachel fantasme la vie parfaite. Jusqu’au jour où elle est témoin – ou croît l’être – d’une scène étonnante…

« La Fille du train » a été annoncé par une lourde campagne de publicité. C’est l’adaptation d’un roman à succès sorti en 2015 dont les droits ont été immédiatement achetés par DreamWorks. Le casting rassemble les plus jolies minois de l’heure : Emily Blunt (« Sicario », « Edge of Tomorrow »), Rebecca Ferguson (« Mission impossible: Rogue Nation »), Haley Bennett (« Les sept mercenaires ») et, puisqu’il en faut pour tous les goûts, Justin Theroux (le compagnon de Jennifer Anniston à la ville et le héros de l’envoutante série « The Leftovers »).

L’intrigue est passablement emberlificotée, entraînant le spectateur, à coup de flashbacks, dans uns série de retournements. Pendant le premier voire le deuxième tiers, on se laisse prendre à ce jeu de masques. Qui de Rachel, de Megan ou d’Ana faut-il croire ? À laquelle de ces réalités se fier ? Il faut bien qu’hélas l’intrigue se dénoue. Elle le fait de la plus prévisible des façons dans une scène finale dont la grandiloquence gore arrache quelques rires gênés dans l’audience. Ce n’est pas très bon signe…

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Snowden ★★☆☆

En juin 2013, Edward Snowden, un ancien employé de la CIA et de la NSA, a lancé l’alerte sur les programmes de surveillance électronique mis en œuvre par les agences américaines de renseignement.

Oliver Stone a pris à bras-le-corps l’histoire des États-Unis pour livrer sa vision personnelle et engagée de ses épisodes les plus polémiques : la guerre du Vietnam (« Platoon »), la spéculation boursière  (« Wall street »), l’assassinat de Kennedy (« JFK »), le 11-septembre (« World Trade Center »)… Pas étonnant qu’il se saisisse de la figure de Snowden pour instruire, une fois de plus, le procès à charge d’une Amérique orpheline de ses valeurs.

Son film a de nombreux défauts. Il raconte une histoire dont on connaît par avance les principaux rebondissements : la carrière de Snowden dans les services de renseignement, ses révélations dans les médias, sa fuite rocambolesque, son exil en Russie. Du coup, tout suspense est tué dans l’œuf. Il le fait avec un manichéisme outrancier, opposant la figure quasi-christique du jeune informaticien, prêt à sacrifier sa vie pour racheter les pêchés de son gouvernement, à d’odieux militaires sans scrupule. Et il ne peut s’empêcher de lester son histoire d’une inutile romance qui, malgré la joliesse de Shailene Woodley (« Divergente », « Nos étoiles contraires »), pèse des tonnes.

Mais son film a deux atouts. Le premier est sa maîtrise. Oliver Stone sait y faire. Même si « Snowden » dure trente bonnes minutes de trop, il possède ce souffle épique qui nous emporte. Le second est son acteur principal. Joseph Gordon-Levitt n’est pas encore une star ; mais il est à  deux doigts de l’être.  Si vous en doutiez encore courez voir « Don Jon », le film qu’il avait réalisé en 2013 et dont il interprétait le rôle principal.

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Mission: Impossible – Rogue Nation ☆☆☆☆

Il y a vingt ans, j’adorais les James Bond, les Mission Impossible, les Jason Bourne…
Mission Impossible 5 – que les producteurs n’osent plus désigner par son numéro de série – m’a fait bailler d’ennui.
Est-ce moi qui ai vieilli ? Suis-je arrivé à un âge où ce genre de films ne m’excite plus ? parce que j’en ai trop vus ? ou parce que je n’ai plus la bonne capacité à m’enthousiasmer / acuité visuelle / masse capillaire / production de testostérone ?

Ethan Hunt est aux prises avec une inquiétante organisation internationale qui s’emploie à déstabiliser le monde. Son nom ? le sceptre était déjà pris ; du coup les producteurs ont opté pour « le Syndicat ».
Le méchant : un ancien du MI6 (Never Trust the Brits!) passé du côté obscur de la force.
La James Bond Girl : une Suédoise inconnue mais solidement customisée qui déambule en talons de 14 cm sur les toits de l’Opéra de Vienne.
Le héros : l’immarcescible Tom Cruise, 52 ans au compteur, fait des acrobaties de jeune homme. Sauf qu’on s’en fout ! Il décolle sur les ailes d’un A400 M ? il manque mourir en apnée ? Il fait une course poursuite en moto ? Zéro suspense. Parce qu’on connaît déjà la fin.

J’invite à déjeuner celui/celle qui me dira que : 1/ que je ne suis pas vieux 2/ ce film est bien une daube dépourvue d’intérêt.

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Le Client ★★★☆

Le dernier film du réalisateur iranien Ashgar Farhadi a frôlé la Palme d’Or à Cannes, obtenant le prix du meilleur scénario et celui de la meilleur interprétation masculine. Il suscite une impatience d’autant plus grande qu’il succède à deux chefs d’œuvre : « Une séparation » (2011) et « Le Passé » (2013).

Le plus russe des réalisateurs iraniens creuse le sillon tracé par ses précédents films. On y retrouve les mêmes personnages issus de l’élite intellectuelle libérale iranienne. Ils sont confrontés à des dilemmes moraux similaires. Ils sont filmés dans les mêmes intérieurs étouffants dont la caméra ne s’évade quasiment jamais, métaphore à peine voilée  (c’est le cas de le dire) de la société iranienne au bord de l’implosion.

Comme dans ses précédents films, Fahradi recherche une vérité aux multiples facettes. Dans « Le Client », cette quête prend des allures d’enquête policière. Il s’agit de découvrir l’identité du client de la précédente locataire de l’appartement où Rana et Emad viennent de s’installer.

Féministe sans le savoir, Fahradi égratigne chacun des personnages masculins tandis qu’il épargne chacun des personnages féminins. C’est un trait commun qu’il partage avec le réalisateur coréen de « Mademoiselle ».

Comme ces précédents films, « Le Client » met mal à l’aise. C’est un feel bad movie. Mais qui a dit que les bons films devaient faire du bien ?

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Derrière le mur la Californie ★★★☆

Vous aimez l’histoire contemporaine ? l’Allemagne ? le skate board ? la coupe de cheveux Vokuhila (vorne kurz hinten lang) ? Alors vous aimerez ce docu d’outre-Rhin « Derrière le mur » qui raconte l’histoire du skate board en RDA

Je vous entends d’ici : « L’histoire du skate board en RDA ????? » Oui ! Absolument !

Ou comment à travers la pratique d’un sport manifester le dégoût d’un système qui étouffe la liberté humaine.

Le réalisateur retrouve une bande de skateurs. Ils avaient 15 ans en RDA dans les années 80. Ils s’ennuyaient en bas de HLM déshumanisés. Ils refusaient de devenir des athlètes anabolisés pour la plus grande gloire du socialisme.

Le documentaire écoute leurs témoignages, illustrés de films en Super-8. Il s’attache au plus charismatique d’entre eux, Dennis alias Panik, un démon à la figure d’ange, dont on apprend vite le destin tragique.

Comme « Red Army » – qui revenait sur les grandes heures du hockey sur glace soviétique – « Derrière le mur » parle de la grande histoire en nous en racontant une petite. Ce n’est pas la manière la plus idiote de le faire. Ce n’est certainement pas la plus désagréable.

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Youth ☆☆☆☆

L’opinion qu’on a d’un film peut varier selon le moment auquel on l’exprime. Certains sont des chemins de croix qui, à la réflexion, se révèlent des chefs d’œuvre. D’autres qui font passer un bon moment tombent dans un puits d’oubli la semaine suivante. Youth de Paolo Sorrentino relève d’une troisième catégorie : la supercherie.

En sortant de la salle, je criais au chef d’œuvre. Le jeu des acteurs, la splendeur des décors, la morale tendre et cruelle de l’histoire m’avaient enthousiasmé. Mais à la réflexion la baudruche se dégonfle.

Certes Youth est constellé de quelques plans joliment troussés – pour la plupart hélas déjà éventés dans la BO. Mais Michael Caine et Harvey Keitel, en vieilles gloires revenues de tout, cabotinent. Et que dire du sujet même du film ? Ode au renoncement ? À la vie ? À la mort ? La cohérence des personnages est rompue par les deux décisions incompréhensibles qu’ils prennent l’un et l’autre à la fin du film.

Ceux qui ont aimé La Grande Bellezza y trouveront-ils néanmoins leur compte ? Même pas. La Grande Bellezza était un hymne aux merveilles artistiques de l’Italie ; Youth est tout au plus une brochure publicitaire pour l’hôtellerie suisse !

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La Vache ★★☆☆

Un paysan algérien  traverse la France à pied pour participer au Salon de l’agriculture où sa vache a été autorisée à concourir.
On imagine volontiers le scepticisme des producteurs auxquels le réalisateur Mohamed Hamidi est allé présenter son projet. Et on admire d’autant plus leur audace à avoir accepté de financer ce feel-good movie qui, grâce à un bouche à oreille enthousiaste, s’est transformé en succès public début 2016.
Comme Fernandel et Marguerite, Fatah et Jacqueline marchent. Leur parcours est ponctué de rencontres : un beau-frère à Marseille qui a fait sa vie en France contre l’avis de sa famille (Jamel Debbouze à contre-emploi), un comte désargenté qui n’a plus les moyens d’entretenir son domaine (Lambert Wilson), des agriculteurs en colère qui déversent des seaux de purrin devant la sous-préfecture… Pendant ce temps, au bled, en Algérie, la famille et les amis suivent à distance la progression de Fatah et de sa vache‎.
« La Vache » n’est pas un chef d’œuvre et n’en a pas la prétention. Sa modestie revendiquée n’est pas le moindre de ses atouts. Du coup, on pardonne aux personnages qui frisent la caricature, à l’intrigue prévisible. Et on se laisse porter par la joie communicative de son épilogue.La bande-annonce

Sing street ★★☆☆

Vous avez 40-50 ans ? Vous avez biberonné au Top 50 ? Vous avez adoré Joy Division, Duran Duran, Motörhead ? Les murs de votre chambre étaient tapissés des posters de David Bowie, Madonna ou Joe Jackson ? Alors vous adorerez « Sing Street » qui vous ramènera au temps des cheveux crêpés, des bottines et du fluo.

À Dublin au millieu des 80ies, Conor a quinze ans (comme moi… sauf que je n’habitais pas Dublin). Ses parents le changent de lycée pour le placer dans une institution catholique collet monté. Pour y séduire Raphina, il décide de monter un groupe. Il l’appelera Sing Street.

« Sing street » est un feel good movie comme on en a déjà vus beaucoup. Moitié récit initiatique, moitié film musical, il a la tendresse du premier (les relations entre Conor et son frère aîné sont particulièrement touchantes) et l’énergie du second.

Sans doute « Sing street » ne revolutionne-t-il pas un genre dont les règles furent fixées il y a un quart de siècle par l’indépassable Commitments de Alan Parker. Pour autant, aussi oubliable soit-il, il offre le plaisir régressif de se replonger, pour le meilleur (The Cure) et pour le pire (A-ha), dans la musique de notre adolescence.

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Bleeder ★★☆☆

Tourné en 1999, le deuxième film de Nicolas Winding Refn était jusqu’alors inédit en France.

« Bleeder » reprend les mêmes décors  (la banlieue grise de Copenhague), les mêmes acteurs (Kim Bodnia qui ne percera pas et Mads Mikkelsen qui deviendra une star mondiale) et la même histoire que « Pusher ». Comme dans son premier film, Winding Refn filme les bas-fonds de la capitale danoise, ses losers, ses petits trafics. Rien de romantique dans sa caméra mais au contraire un goût pour l’hyperviolence qui ira crescendo dans ses films suivants.

Léo (Kim Bodnia), le héros de « Bleeder », vit avec Louise qui attend un enfant. Lenny (Mads Mikkelsen) est célibataire et travaille dans un vidéo-club. Le film raconte la lente dérive du premier dans la violence et la rédemption du second dans l’amour.

« Bleeder » offre un portrait touchant de Winding Refn sous les traits de Lenny. Comme son personnage, sa cinéphilie – il voit dix à douze films par semaine – le coupe du monde. Comme son personnage, il est amoureux – c’est Liv Corfixen qui deviendra Mme Winding Refn à la ville qui interprète le rôle de la serveuse draguée par Lenny.

« Bleeder » n’est pas un chef d’œuvre. Il n’a pas la prétention de l’être. C’est un petit film tourné avec quatre bouts de ficelles par un réalisateur qui n’a pas trente ans et sa bande de potes. C’est une curiosité cinéphilique pour les fans de « Drive », « Only God Forgives » et « The Neon Demon ».

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